Chapitre 14

8 0 0
                                    


Vendredi 8 janvier 2016. 19:58 PM

Elle arriva au banc de l'abribus, brandissant un petit papier plié en huit qu'elle avait dû trouver au même endroit ce matin.

_ Qu'est-ce que c'est que ce truc ? Sourit-elle, intriguée. J'haussai les épaules.
_ Tu as passé une bonne journée aujourd'hui ?
_ Tu veux qu'on joue comme cela Ethan, vraiment ?
Elle continuait de retenir le sourire qui s'élargissait de plus en plus sur son visage blanchi par les températures froides de cet hiver bien qu'il ne neige pas encore.
_ Je sais pas, c'était simplement de la politesse.
_ Alors oui, j'ai passé une bonne journée, merci. Elle sourit, et passa la main dans ses longs cheveux. Sa main presque bleue tellement elle était gelée.
_ Tiens, dis-je en ôtant ma veste en cuir et elle rit, mais accepta tout de même en tremblant.
_ Pourquoi est-ce que j'ai le droit au grand jeu ce soir ? Sourit-elle, amusée.
_ Tu viens ? Prononçais-je comme unique réponse à sa question.

Je n'avais pas envie de rester ici, là où tout le monde peut nous voir, nous regarder. Ce soir, j'avais prévu de me retrouver avec elle, elle seule avec moi. Alors sans un mot, elle se leva elle aussi et me suivit.

_ Au fait, j'aime bien ton écriture, me dit-elle de sa spontanéité naturelle.
_ Merci.

Et c'était la première fois que je lui disais, merci. Pour toutes ces fois où elle l'aurait mérité, bien plus qu'aujourd'hui, que maintenant, c'est à ce moment que je l'ai enfin fait. Et même si je ne la remerciais que pour un compliment en carton, j'espère qu'il serait valable pour tout le reste.

_ Pourquoi est-ce que tu t'es intéressée à moi ? Demandais-je quand nous fûmes arrivés là où je voulais l'emmener. Rien de mieux qu'un endroit un peu oublié d'une rue banale, avec un parc plus petit qu'un garage et aucun banc. On s'est assis parterre dans l'herbe, l'un en face de l'autre.
_ Bah tu sais au début, je m'intéressais pas vraiment. C'est juste que je ne rejette pas les personnes quoi.
_ Pourtant quand tu m'as demandé où est-ce que j'allais la première fois, tu as eu l'air de savoir des choses, mais de vouloir surtout en savoir plus.
_ Non pas du tout,
elle secoua la tête, j'avais juste envie de parler à quelqu'un. Et je me suis dit juste pourquoi pas à toi, t'étais la seule personne que je croisais d'à peu près mon âge. Et si j't'ai demandé où t'allais c'est parce que je pensais que je t'interpellerais plus en parlant de ce qui t'intéresse.
_ Comment tu savais que j'allais voir mon ex ?
_ Je te l'ai déjà dit. Rien de plus, rien de moins. Pourquoi tu me demandes tout ça ?
_ Parce que j'ai envie de savoir. Pourquoi est-ce que tu as essayé de m'aider avec Laura ?
_ Parce que je n'aime pas que les gens soient tristes.
_ Mais tu ne me connaissais pas !
_ Et alors, c'est une excuse pour ne pas aider quelqu'un ?
_ Non... Je réfléchis. Mais j'étais désagréable avec toi.

Elle rit.

_ T'inquiètes pas, tu l'es encore souvent. Après un court silence, elle reprit. Je rigole, t'inquiètes pas. C'est juste que ça ne me blesse pas. 'Fin, j'attendais pas une nouvelle amitié, non je voulais juste te remonter le moral, juste un peu. Et même si je t'agaçais les neuf dixièmes du temps, ça a quand même un peu marché non ?
_ Un peu marché, ouais.
_ Ca fait un moment que t'es pas retourné la voir.
_ Comment tu sais ?
_ Je sais pas, je trouve ça flagrant c'est tout. Mais ça l'est pas pour tout le monde.
_ Pourquoi tu fais attention aux gens ?
_ Pourquoi ne le ferais-je pas ?
_ Tu m'intrigues Rose, beaucoup.
_ Et toi, tu m'intéresse.
Dit-elle en venant se blottir contre moi.

Ca ne sonnait pas comme une phrase d'approche, ou de drague. Ca sonnait comme les paroles d'une fille qui tombe amoureuse, et qui ne cherche pas à le cacher. Ou du moins pas totalement. Et ce rapprochement soudain, quand elle s'assit entre mes jambes et se laissa aller contre mon torse, me raidit. Elle cherchait juste à se réconforter, je la sentais fragile comme une enfant que je pourrais réparer rien quand la serrant dans mes bras. Mais j'en étais incapable, parce que ce rapprochement me dérangeait. Rose me troublait, mais la seule personne que je pouvais voir dans mes bras, c'était Laura. Et c'était elle la dernière que j'avais réconforté contre mon torse, et je voulais qu'elle le reste. 

Street HelloOù les histoires vivent. Découvrez maintenant