• Chapitre 3

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Le cœur tambourinant contre ma poitrine, je pose deux doigts sur sa jugulaire.

°°°°°

Une pulsation. Je soupire de soulagement. Je me tiens toujours au-dessus de lui, à écouter sa respiration lorsque Sara entre dans l'édifice. Elle s'approche de moi, soulève une mèche de cheveux qui recouvre mon arcade qui saigne toujours. Elle grimace et me dit :

- Ce n'est pas très profond. Tu as eu de la chance. Sois plus prudente à l'avenir, ou les Paras ne feront qu'une bouchée de toi.

- Mais qu'est-ce qu'un Para, bon sang ?!

Sara se mord la lèvre superieur, et reste silencieuse. Quelques secondes s'écoulent puis elle finit par me donner une explication. C'est comme placer la première pièce d'un puzzle qui me semble de plus en plus complexe.

- Ce sont des Paranos. La perte de mémoire n'est pas la seule conséquence des éruptions sur les humains. Nous avons tous, sans exception développer une paranoïa. Tu as sûrement dû t'en apercevoir toi-même. Pour nous, c'est simplement des impressions, des ressentiments, ou de la méfiance. Pour les plus sévèrement touché, ce sont des hallucinations. Ils ne distinguent plus la réalité de l'imagination, ce qui les rend particulièrement dangereux.

Mon désarroi doit se lire sur mon visage, car Sara pose sa main sur la mienne comme pour me rassurer.

- Ne t'inquiète pas, ça va aller. Allez viens, on y vas.

Nous sortons d'ici en enjambant le corps du "Paras" que je viens de combattre. Nous apercevons difficilement la silhouette de Chuck et Miles à travers la pluie de cendres. Ils nous attendent. Alors que je m'apprête à les rejoindre, Sara m'arrête en me retenant le bras.

- Je sais ce que tu traverse, je suis passée par là. Cette peur, ce désespoir que tu éprouves, je l'ai vécu également. Mais ça passera, d'accord ? Elle sort un médaillon de sa poche et me le tend. Tu tenais ça dans ta main lorsqu'on t'a trouvé. Ouvre-le.

J'ouvre le médaillon. A l'intérieur se trouve une photographie d'un homme assez jeune d'une beauté à couper le souffle et d'une femme au cheveux grisonnant. Je les fixe pendant un long moment, à essayer de me souvenir d'eux, à tenter de distinguer une quelconque ressemblance, à me forcer à avoir ne serait-ce qu'une impression familière. Mais non, rien. Ces gens me sont totalement étrangers, et pourtant il y à de grandes chances pour que ce soit ma famille. Je le referme, passe le médaillon autour de mon cou et le serre fort entre mes mains, en tâchant de ravaler mes larmes. Je remercie Sara d'une voix tremblante, et nous partons rejoindre les autres.

Sara finit par convaincre Miles de me retirer les menottes. Il lui faut une bonne vingtaine de minutes et l'appui de Chuck pour qu'il accepte enfin de me relâcher. Je ressens une vive douleur lorsque Miles me les retirent, tellement elles étaient ancrée dans ma peau, mais rapidement suivie d'un grand soulagement lorsque Chuck verse un peu d'eau sur mes plaies ouvertes.

Nous reprenons ensuite la route. Ils refusent toujours de me dire où. Cependant, la discrétion n'est pas leur point fort alors que laisser traîner mes oreilles est le mien. Il me semble avoir entendu qu'on doit rejoindre un autre groupe de survivants. Une vive appréhension s'empare de moi, mais elle est rapidement balayée par un grand intérêt pour ces nouvelles personnes.

Plusieurs heures de marche plus tard, nous arrivons à la lisière d'une forêt. Je ne suis pas rassurée, et j'hésite à y pénétrer. Mais je n'ai pas le choix, Miles qui marche derrière moi me bouscule jusqu'à ce que je presse le pas.
Le côté positif de cette forêt inquiétante, c'est que les arbres nous fournissent une protection, et ainsi les cendres parviennent distillées jusqu'à nous.

Nous approchons d'une rivière, où plusieurs personnes sont installées confortablement. Arrivée à hauteur de ces personnes, Sara sourit de toutes ses dents, Miles écarte les bras et rit de sa voix rauque tandis que Chuck reste de marbre.

J'examine le groupe. Un homme, grand, brun et barbu me dévisage avec des grands yeux, en se balançant d'avant en arrière sur ses talons. Un Asiatique dont les cheveux couvrent presque les yeux me sourit timidement. Une femme qui m'a l'air peu commode me toise du regard, bras croisés sur sa poitrine. Et un jeune homme me regarde d'un air amusé. Je dois faire une drôle de tête, en tout cas je ne me sens pas à l'aise. Tous ces gens me paraissent...menaçants. Peut-être est-ce parce qu'ils sont tous armée jusqu'aux dents ? Ou peut-être est-ce simplement la paranoïa dont me parlait Sara un peu plus tôt.

Le jeune homme s'approche de moi, il semble avoir une quinzaine d'années. Je réalise alors avec effroi que je ne me rappelle plus de mon âge non plus. Il me tend la main avec un sourire charmeur.

- Salut ! Moi c'est Blake.

Je lui serre la main et ouvre la bouche pour me présenter à mon tour, mais les mots ne sortent pas. Je n'ai pas de nom, pas d'identité. Réalisant ma détresse, Blake me lance un grand sourire qui se veut rassurant.

- Ne t'en fais pas, on va te trouver un prénom.

- Me trouver un prénom ?

- Oui. Comme on l'a fait pour tous les autres.

Il s'éloigne sans me laisser le temps de répondre. J'observe la rivière qui s'étend devant moi, et je meurs d'envie de découvrir à quoi je ressemble. C'est comme si je n'étais jamais passé devant un miroir auparavant.

Je m'approche de l'eau et découvre mon reflet pour la toute première fois. Je hausse les sourcils et j'ai un mouvement de recul. Quelle réaction ridicule, pensais-je. Mes cheveux bruns tombent en cascade sur mes épaules, mes yeux bleus se confondent avec la couleur de l'eau, et ma joue gauche est rougie par le sang qui coule de mon arcade. Je suis arraché à ma contemplation par Chuck qui m'invite à les rejoindre pour manger. L'asiatique dont j'ignore le nom et Blake sont revenue de la chasse avec un pigeon, et Chuck et Miles sortent les boîtes de conserve de leur besace. Un maigre repas pour sept personnes, mais les ressources manque dans cet environnement ravagé.

Ils discutent de chose futile, tandis que je reste silencieuse. L'ambiance est conviviale, et pourtant je suis loin d'oublier que je suis une prisonnière. On peut apercevoir au loin le seul immeuble encore immaculé, et les mots de Miles repassent en boucle dans ma tête. "Tu es importante pour eux, ce qui veut dire que tu es importante pour nous". Le building se rapproche étrangement. Je suis quasiment sûr que c'est là bas qu'on se rend. Mais pourquoi ? Et pourquoi suis-je spéciale ? Pourquoi ont-ils besoin de moi ?

Au bout d'un moment, la question de mon identité vient à se poser et ils commencent à proposer des prénoms. Je suis surprise, vont-ils vraiment décider de mon nom ? C'est réellement comme ça que Sara, Chuck et les autres ont eu le leurs ? Bien évidemment, lorsque je tente de m'opposer, ils m'ignorent. Je n'ai pas mon mot à dire. Après moult discussions, Chuck se retourne vers moi avec un grand sourire.

- Allison. Tu t'appelle Allison.

...Allison. Je m'appelle Allison.

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Voilà pour ce chapitre! Qu'en avez-vous pensé ? Selon vous qu'est-ce que Allison a de si spécial ? :)

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