Volcanic

• Chapitre 2

Le sang-froid que je gardais jusqu'ici commence à s'ébranler. Comment est-ce possible ? Mon cerveau fonctionne, il prend la mesure de la situation, et pourtant je suis perdue. Les souvenirs de ma mémoire sélective refont surface. Je me rappelle comment le monde est censé tourner : la neige sur les arbres, les voitures sur les routes, un délicieux hamburger dans ma bouche, une place peuplée et bruyante. Pourtant le monde que je découvre n'a rien à voir avec tout ça. Rien du tout. Je suis incapable de dire d'où je viens, qui sont mes parents, quel est mon nom ?
Étrangement, toutes les questions soulevées par mon incertitude réveillent en moi une vive curiosité. J'ai hâte d'avoir les réponses à mes interrogations.

J'observe à droite et à gauche avec insistance, comme pour prendre conscience de ce nouvel environnement. Je lève la tête en l'air et constate que le ciel a cette teinte rouge omniprésente, gradué du gris causé par cette pluie de cendre.
Je souhaiterais pouvoir dire que ce que je vois n'est pas aussi effrayant, mais j'ai comme l'impression d'être en enfer. Peut-être le sol est-il plus rassurant ? Mes yeux fixent mes chaussures, et je ne parviens pas à distinguer mes bottes noires du sol entièrement calciné. La couleur est identique. Avec un soupir de frustration, je me résous à observer le gamin qui marche devant moi. Il est assez trapu, ses joues rosées et ses cheveux hirsutes lui donnent un air encore plus enfantin. Ma curiosité continue de me dévorer, et je meurs d'envie d'avoir les réponses à mes questions. Le blond n'a pas l'air très loquace, et la jeune femme semble être sous son influence. Le choix se fait donc assez facilement, l'enfant est certainement le plus enclin à me parler.

- Psst ! Hé... Le gosse ! Murmurais-je, afin que les deux autres ne m'entendent pas.

- Je suis pas un gosse, peste-t-il en se retournant.

Avant que je n'ai eu le temps de poser la moindre question, le blond s'écrie :

- C'est quoi ces messes basses, hein ? Chuck, viens par ici ! A ma grande déception, il s'exécute.

La jeune femme suggère de faire une pause, afin de nous nourrir. Elle a parlé d'un endroit appelé la station, et elle a utilisé tout un tas d'autres mots qui me sont complètement étrangers, notamment celui que j'ai déjà entendu plus tôt, "Paras". C'est tellement étrange. Ils utilisent cet argot avec tellement de naturel que ça me semble bizarre de ne pas les comprendre. C'est comme si toute une partie de mon vocabulaire a disparu avec mon nom -et avec une tonne d'autres souvenirs-. J'ai également découvert le prénom du blond, Miles.

Nous arrivons près d'une bâtisse, l'une des moins saccagées que j'ai vus pour l'instant. Miles me traîne à l'intérieur sans ménagement en me tirant par les menottes qui commencent à déchirer la chair de mes poignets. Avec une grimace de douleur, j'entre dans le bâtiment.

J'examine l'endroit. Une dizaine d'étagère sont éparpillées à travers la pièce mal éclairée. Certaines sont encore debout, d'autres sont complètement détruites. Sur celles qui tiennent encore se trouvent des boîtes de conserve. Elles sont peu nombreuses, et Miles et Chuck s'empressent de les ramasser, en en gardant quelques une à la main, et en refourguant les autres dans leurs besaces. Mon regard se dirige ensuite vers la jeune femme, qui attrape plusieurs bouteilles d'eau qu'elle tient difficilement entre ses petits bras. Elle me fait signe de m'asseoir , et je me place en tailleur à même le sol, rapidement suivis par les autres qui forment un arc de cercle autour de moi.

Elle me tend une bouteille d'eau que je m'empresse de boire. Le liquide qui pénètre dans mon gosier me fait un bien inimaginable. Je n'avais pas réalisé à quel point j'étais déshydratée. Miles ouvre une boîte de conserve -du ragoût de lapin- et me la tend. Je n'ai pas très faim mais je la prends tout de même. Je sens que je vais avoir besoin de force pour ce qui m'attend. Au bout de longues, très longues minutes, Miles prend la parole :