¤ Chapitre 16

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- Prends l'arme, Esmelana.

Cette voix me paraît tellement distante. Comme dans un rêve. Oui, c'est ça. Je dois être en train de rêver.

Je fixe attentivement la main tendue vers moi. Ou plutôt, ce qui se trouve dans sa paume. Un revolver.

- Prends l'arme, répète une voix masculine et ferme.

Je relève enfin les yeux vers mon interlocuteur. Un visage familier, des yeux réptiliens intimidants, la même animosité envers cet homme.

Avec mes petits doigts frêles et tremblants, j'empoigne l'arme qu'il m'incite à prendre, et je me retourne lentement. Je me trouve dans une cave sombre et froide, un homme est attaché sur une chaise en face de moi. Je pointe mon arme sur lui.

- Ne tremble pas, ma chérie.

Je tiens l'arme tellement fort entre mes doigts pour ne pas trembler que mes jointures deviennent endolories. Je n'ai plus qu'à appuyer sur la détente...
Je n'y parviens pas.

- Papa s'il te plaît, le suppliais-je en me retournant vers lui.

Le regard qu'il me lance me glace le sang. La crainte qu'il m'inspire est encore plus grande que la crainte de ce que je m'apprête à faire. Et je sais, que si je ne tue pas cet homme, mon père s'en chargera. De lui, comme de moi. Alors j'appuie sur la détente.

Une cave sombre et froide, un cadavre ligoté à une chaise avec une balle entre les deux yeux, un homme au regard aussi froid que la glace qui sourit fièrement, une petite fille, arme à la main, sa robe rose tâchée de rouge, qui pleure.

- Ne sois pas triste Esmelana, dit l'homme à l'intention de la petite fille. Tu es née pour ça. La première victime est la plus dur à supporter.

La petite fille l'observe de ses yeux imbibés de larmes. Ce que cet homme ignore, c'est que la victime, ce n'est pas le mort. La victime, c'est la petite fille. Cette petite fille, c'est moi.

***

Je me réveille en sursaut, de retour dans ma cellule miteuse, dégoulinante de sueur. Mes joues sont encore humide des larmes qui ont roulé sur mes joues pendant mon sommeil. Encore un rêve qui n'avait absolument pas l'air d'un rêve, avec le même homme qui me hante. Ce ne sont pas des rêves, cette fois j'en suis sûr, ce sont des souvenirs.

Il semble que le meurtre a toujours été dans ma nature.

- Mauvais rêve ?

Je tourne ma tête pour apercevoir mon interlocuteur. Elle est assise à même le sol, sa jambe repliée vers sa poitrine. Azaella. Je la distingue difficilement à cause de la pénombre ambiante. Je l'ignore, trop perturbée pour faire la conversation.

- Tu as rêvée de Will ? Poursuit-elle.

-Flashback 24h plus tôt-

La lance que je tiens fermement transperce Will de part en part. Immobilisé et blessé, il semble soudainement beaucoup moins effrayant, presque fragile. On dirait même que la lueur de folie à quitter son regard.

Il tombe à genoux, et se trouve désormais à ma hauteur. Du sang s'écoule de sa bouche, s'étale sur le sol, créant un contraste saisissant entre le rouge vif de son sang et les cendres blanches. Il baisse les yeux vers sa blessure, avant de les rapporter vers moi. Des yeux doux, inquiet. Plus de doute possible, c'est bien lui. Il est revenue à lui.

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