Plus Jamais

Chapitre 23

Point de vue de Xavier

Quelques minutes après avoir redémarré elle s'est endormie, la bouche légèrement entrouverte. Puis, je les ai entendu. En fermant les yeux on pouvait s'imaginer être à côté d'un homme âgé, assez bedonnant.
Surpris, j'ai d'abord pensé que le bruit venait d'ailleurs, mais non. C'était bien elle. Elle, mon adorable blonde, qui laissait échapper ces incroyables ronflements.
Certains garçons pourraient trouver ça pénible, d'autres relativiseraient et trouveraient ça mignon. Personnellement j'ai juste envie de rire devant le comique de la scène. Comment une fille aussi menue arrive à produire de tels bruits ?
Je n'ai pas envie de la vexer, donc je me retiens. Mais c'est dur, croyez-moi.
J'arrive sur l'allée de la propriété, et me gare une fois arrivé devant celle-ci.
L'arrêt du moteur ne suffit pas à réveiller ma marmotte, je me penche donc vers elle et lui caresse la joue tendrement.

- "Hummm..." Elle se met à grogner et se tourne, dos à moi.

- "Mïa... Nous sommes arrivés."

Je la vois se redresser péniblement, bailler, et ouvrir la portière en s'étirant. Elle est toute décoiffée et son teeshirt complètement froissé, mais pour rien au monde je ne voudrais être avec quelqu'un d'autre.

- "Où sommes-nous ?" Me demande-t-elle d'une voix encore légèrement endormie.

Je la prends par la main et l'emmène dans le jardin.

- "Essaye de deviner." Je lui dis à l'oreille.

Elle sourit puis se concentre en inspirant et expirant de manière exagérée, pour me montrer qu'elle jouait réellement le jeu.

Point de vue de Mïa :

J'entends des oiseaux. Une légère brise vient rafraîchir ma peau exposée aux rayons du soleil et sinon... Le silence. Un silence apaisant.

- "Hummm... Je dirais... À la montagne ?"

- "Gagné ! Mais attends... Laisse-moi te décrire le paysage." Me dit-il, sans lâcher ma main. "Nous sommes garés devant un immense chalet, aux nombreuses baies vitrées, laissant entrapercevoir du mobilier moderne. Cette propriété a été bâtie en pente et surplombe un immense bois de pins, lui-même entouré d'un imposant massif montagneux. Au loin, il y a même un petit lac. Le ciel est très bleu aujourd'hui, il n'y a aucun nuage dans le ciel et le soleil rend ce paysage magistral."

Sa description très précise me permet de visualiser la scène et les sons que j'avais entendus s'y superposent parfaitement.

- "Mïa... Tu es déçue ?" Me demande-t-il, légèrement inquiet.

- "Non ! Bien sûr que non ! Ça me semble vraiment magnifique..."

- "Alors pourquoi je vois une larme couler le long de ta joue ?" Me dit-il en passant son pouce sur ma pommette pour essuyer celle-ci.

Je lui souris et serre sa main un peu plus fort dans la mienne.

- "C'est juste que... J'aurais aimé voir ça de mes propres yeux. Mais Xavier, je ne suis absolument pas déçue, au contraire. Personne, mis à part mes parents, n'avait fait tout ça pour moi. Je suis chanceuse de t'avoir."

Ses lèvres viennent rencontrer les miennes et ses bras s'enroulent autour de ma taille pour me rapprocher de lui.

- "Non Mïa, c'est moi qui suis chanceux."

Il m'embrasse à nouveau, me mord la lèvre, et me soulève pour que je puisse tenir debout sur ses pieds.

- "Bon ! Vous allez passer votre nuit blanche sur la pelouse ou tu nous présente cette charmante demoiselle !"

Je me détache subitement de Xavier, surprise par cette voix masculine inconnue.

- "Salut Nico... Salut Hanna ! Comment ça va ?" S'exclame alors Xavier, d'une voix trop enthousiaste pour cacher sa gêne, tout en me prenant par la main.

- "Et bien écoute je viens de sortir un nouveau tube, cette demoiselle est toujours aussi sexy, enfin bref, tout roule !"

- "Eh ! Espèce de gros macho !" S'exclame la supposée Hanna. "Je suis contente de te voir Xavier, ça fait si longtemps ! Et qui est cette jolie jeune fille que tu nous amènes là ?"

- "Nico, Hanna, je vous présente Mïa, ma petite amie."

- "Enchantée Mïa, je suis Hanna, une amie d'enfance de Xavier." Me dit-elle d'une voix douce et enivrante en posant sa main sur mon épaule.

Je l'imaginais parfaitement : une fille grande, incroyablement belle, drôle, et avec de grands yeux en état de marche. Bref, un canon. Mais d'où se connaissaient-ils tous ? Si ça se trouve, Xavier et cette "Hanna" étaient sortis ensemble. Rien qu'en imaginant ça, une colère sourde se pointa en moi, ce qui me fit serrer la main de Xavier un peu plus fort encore.

- "Je la connais depuis que je suis en maternelle" commença à m'expliquer Xavier, "Lorsqu'un jour une petite brute haute comme trois pommes est venue me piquer mon goûter et qu'Hanna est venue me réconforter en me disant : il est vraiment trop méchant, mais t'inquiète pas, si on devient amis je te défendrai!! Depuis lors et jusqu'à... la mort d'Anne, nous étions les meilleurs amis du monde, complémentaires et aussi proches que des frères et sœurs." Ajouta Xavier.

Une pointe de jalousie vint alors me titiller. Il ne m'avait jamais parlé d'elle et maintenant qu'ils se retrouvent, c'est comme si ils n'avaient jamais été séparés. Mon cœur me chuchota alors que cette Hanna était vraiment beaucoup mieux que moi, et que Xavier méritait une fille comme elle, pas comme moi.

- "Ahahah oui en effet, c'était la belle époque..." ajouta Hanna "C'est vraiment dommage que l'on ait perdu contact tous les deux..."

C'en était trop pour moi, ma main se sépara brusquement de celle de Xavier. C'était peut-être immature de réagir comme ça mais imaginez-vous à ma place, incapable de voir cette fille dévisager mon copain, ni de voir comment celui-ci réagissait. J'entends seulement leurs voix nostalgiques et leurs tons taquins, ce qui est franchement insupportable.

- "Ça va Mïa ?" Me demanda Xavier d'un ton surpris en posant une main sur mon avant bras.

- "Oui oui." Je lui répondis.

- "Dans ce cas... Tous à table ! Notre bonne nous a préparé du homard aux cèpes et petits agrumes ! J'en ai l'eau à la bouche, venez !" S'exclama alors Nico d'un ton mi-impatient mi-exaspéré.

Xavier reprit donc ma main, sûrement pour me guider jusqu'à la maison, et on commença à marcher.

- "Tu es sûre que ça va ?" Me chuchota-t-il. "Tu n'es pas trop déçue que l'on ne soit pas que tous les deux ?"

- "Non non..."

Le séjour allait être prometteur, j'en étais certaine.