Chapitre 7

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J'ai l'habitude qu'on me dise oui. Il s'agit là de ma principale qualité dans le monde des affaires. Ma richesse, ma réputation, ma place dans la société, tout dépend de ma capacité à obtenir l'assentiment de mon interlocuteur. Ce n'est pas tant que je désire avoir toujours raison, mais mon éthique de vie l'impose. C'est le fardeau de l'entrepreneur qui se respecte : ne jamais baisser la garde, viser toujours plus loin, creuser la distance qui sépare l'Homme de la masse beuglante des suiveurs. Etrange d'ailleurs qu'on les appelle les suiveurs, alors que mon but premier est de les perdre, de les oublier loin derrière moi dans mon périple vers les sommets. Je préfèrerais utiliser le terme d'Oubliés, les Oubliés de la Route, mais j'ai le devoir d'une certaine retenue dans mes propos. Les affaires s'accommodent mal de la liberté de mépris. Un jour j'écrirai un précis pour pallier cette incorrection de l'histoire.

S'il est donc vrai qu'un instant, lorsque Marlowe m'a tourné le dos, j'ai douté, il m'a suffi de doubler le montant de ses honoraires pour qu'il reprenne sa raison et qu'il accède, comme tous les autres, à ma demande. Souvent ma femme m'a demandé pourquoi j'accumulais ainsi les sociétés, les contrats, les zéros. Elle sait aujourd'hui que, si notre enfant est retrouvé, c'est parce que j'en avais les moyens. La police est un service public, lui ai-je expliqué, et donc faillible par définition, imparfait... Un détective privé, par contre, a tant pour me plaire et me rassurer, ne serait-ce que son qualificatif. Et je l'avoue: son refus initial a eu pour effet de balayer mes derniers doutes. Oserais-je dire, dans des circonstances ainsi pénibles, qu'il a aiguisé mon sens de la compétition. Je ferai tout pour qu'il accepte mon argent. Qui serait-il d'ailleurs pour oser le refuser ?

    Et s'il retrouve notre fils, c'est du bonus.

Traduit de l'américainOù les histoires vivent. Découvrez maintenant