Ma vie n'est qu'une longue série d'étiquette. Depuis le temps, j'ai l'habitude qu'on définisse toute mon existence en un seul regard. N'est-ce pas ce que nous faisons tous ? Regardez, par exemple, cet homme dans le bus. Personne ne veut s'asseoir proche de lui. Il dégage trop une forte odeur, c'est insupportable. On se demande même comment il a pu obtenir assez d'argent pour se payer un ticket de bus. Il est mal habillé, il est sale. Alcoolique. Sans abris. Il doit vivre sous un pont et il a surement une maladie mentale. S'il vit cette vie, c'est parce qu'il l'a choisi et qu'il le mérite bien. Point barre.
On ne cherche pas à en savoir plus. À savoir les raisons qui l'ont poussé à être ce qu'il est aujourd'hui. On ne veut pas connaître son histoire. On ne prend pas la peine de lui adresser la parole. On ne veut pas avoir à faire avec ce genre de personne. Tout ce que l'on sait faire, c'est le mépriser du regard et le juger. Car nous avons tous le jugement facile.
C'est la même chose pour moi, et ce, depuis toujours.
Ça a commencé avec l'étiquette d'enfant à problème. Un peu trop turbulent, qui ne fait aucun effort de concentration et ne s'intègre pas du tout avec les autres enfants de la maternelle.
Ensuite, il y a eu l'étiquette de l'enfant introverti. Toujours replié sur soi et un peu trop réservé. Je n'avais toujours pas d'amis de mon âge en dehors des supers-héros de mes bandes dessinées. Ça devenait un problème. Qu'est-ce que ça serait une fois rendu au lycée ?
Après j'ai eu le droit d'être étiqueté dépressif. Il faut dire qu'avec la mort soudaine de ma mère, j'ai dû faire face à quelques problèmes de conscience. Et c'est sûrement plus profond que ça, mais mon premier thérapeute a décidé que c'était une dépression passagère, donc il doit bien avoir la science infuse.
Pour finir, maintenant on me voit comme un malade mental. Ou c'est ce que je me persuade d'être aux yeux du monde entier. Je suis atteint de troubles psychotiques. Et aussi de trouble du comportement. Je suis renfermé et solitaire, limite en marge de la société. Je crains l'extérieur. J'ai des troubles d'anxiété. J'ai une expérience de la vie beaucoup trop avancée pour mon âge. J'ai des problèmes de confiance. Et par dessus le marché, je suis atteint de troubles de l'humeur. Bref, je suis une machine défectueuse et beaucoup trop abîmée pour que l'on essaie de la réparer.
Mon psychologue s'est mis en tête que de faire une thérapie de groupe me ferait du bien. Parce que je garde trop de chose en moi et même avec lui, j'ai une réserve. Pardon docteur, si je ne m'ouvre pas facilement à vous, je vais encore moins le faire devant un groupe de déglingués de la vie comme moi. Ça ne ferait que m'enfoncer, d'entendre leurs histoires les plus sordides les unes que les autres. Je n'ai pas besoin de prendre le poids du malheur des autres en plus. C'est beaucoup trop écrasant pour une seule et unique personne. Sauf si votre but est de me pousser à avoir des pensées suicidaires, alors dans ce cas, ce serait le meilleur des remèdes.
Il est aussi persuadé que me faire au moins un ami dans mon lycée serait une chose bénéfique pour moi. Pardon docteur, je crois que vous avez besoin d'une consultation à votre tour. Je crois que vous n'avez rien compris de ce que je vous raconte depuis plusieurs années... Je n'appartiens pas au même monde que les étudiants de mon lycée. Je ne corresponds à aucun monde.
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sounds like a phobia
Fanfiction« J'envie les gens. Parfois il m'arrive d'imaginer que j'ai la possibilité d'échanger ma vie avec celle d'un autre. Ce serait tellement plus facile, d'échanger mon passé avec celui de n'importe qui ayant passablement une enfance heureuse. Je ne dema...