Chapitre 117 : Nono, tu vas tellement me manquer.

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Je m'assois sur un des bancs en bois durs et douloureux de l'église, tout devant, avec les garçons. Ma mère est sur le banc d'en face, assise entre Maxime et Niall. Mon père est assis à côté de Nana a qui il tient la main dans un geste réconfortant ; elle pleure contre son épaule. Pratiquement toute l'église est en larmes, en réalité, mais moi, je ne pleure pas. Je n'y arrive pas, j'ai beaucoup trop pleuré ces deux derniers jours.
Je tapote l'épaule de ma mère pour lui faire part de ma présence et elle se tourne vers moi pour me sourire doucement, malgré ses larmes. Je fais la bise à mon père, puis prends Maxime et Nana -qui en profite pour me féliciter pour ma grossesse- dans mes bras avant de me rasseoir.
Au moment où mes fesses touchent le banc, j'aperçois Niall se pencher sur ma mère pour lui chuchoter quelque chose à l'oreille. Elle se tourne vers lui avant de lui faire un petit sourire et poser sa tête sur son épaule. Ils n'ont donc plus aucune pudeur ? Même à l'enterrement de Nono ?
Je lève les yeux au ciel au moment même où Harry me prend délicatement la main et la serre dans les siennes. Un petit sourire reconnaissant se dessine sur mes lèvres pour le remercier.
Un prêtre prend la parole dans le micro :

- Mesdames et messieurs, je vais vous demander de vous installer et de faire silence, s'il vous plaît. Les funérailles de monsieur Henry Strockonov vont commencer.

"Les funérailles de Monsieur Henry Strockonov". Jamais je n'aurais pensé entendre ces mots sortir de la bouche de n'importe qui, jamais je n'aurais pensé que ça puisse faire autant mal.
Je serre un peu plus la main d'Harry dans la mienne et me mords la lèvre inférieure pour ne pas pleurer.

- La famille doit s'installer dans la rangée de droite et les amis, dans celle de gauche, merci.

Je soupire. Ce n'est pas un soupire agacé, mais un soupir malheureux. Un soupir presque déchirant.
Je regarde autour de moi pour vérifier que personnes de ma famille n'est installée dans la rangée de gauche, juste au cas où, mais surtout parce que je déteste fixer la photo de Nono qui a été installée devant l'autel.
Le calme s'installe instantanément lorsque le cercueil de Nono entre dans la paroisse, porté par quatre hommes assez baraqués : mon oncle Patrick, ses fils Edward et Johnson, et le cousin de ma mère, Kent.
A la vue du cercueil, les larmes me montent aux yeux. Je sens la poigne d'Harry se resserrer autour de ma main et me tourne vers lui. Il regardait le cercueil, mais lorsqu'il s'est rendu compte que je le fixais, a posé ses yeux sur moi. Lui aussi a les larmes aux yeux. Il s'était sans doute attaché à Nono. Touchée par le fait qu'il ne soit pas insensible à la situation, je lui fais un petit sourire, mais il s'efface dès le moment où j'aperçois les porteurs poser le cercueil sur le catafalque. Ça y est, ça va commencer, je vais lui dire adieu.
Lorsque le prêtre l'appelle, ma mère se lève du banc sur lequel elle était assise et s'avance, une feuille entre les mains.
Elle prend une profonde inspiration avant de commencer :

- Bonjour à tous, famille et amis. Nous sommes aujourd'hui rassemblés dans la tristesse pour enterrer mon père, Henry Strockonov.

Elle s'arrête un instant, afin d'inspirer et d'expirer une nouvelle fois, puis poursuit :

- Henry Edgar Strockonov naît le 17 juin 1943 dans une cabane au sud de la Russie, autrefois appelée l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques. Lui et sa famille sont obligés de se cacher pour ne pas se faire déporter car ils sont de religion juive, tandis que son grand frère et son père combattent contre les États ennemis. Ces deux-derniers sont tués durant les combats...

Ma mère s'arrête un instant, la voix tremblante.

- Alors qu'il n'a seulement que 7 ans, il perd sa mère des suites d'une longue maladie. C'est donc sa tante, Rosie, qui l'élève. Mais son mari est violent et les bat tous les deux. Heureusement pour eux, cet homme meurt des suites d'une maladie dont le nom m'est impossible de retenir.

Don't run away » h.s ─ TOME 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant