Chapitre 17 : Opale

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Assise sur la plus haute branche d'un arbre, je fouillais l'obscurité des yeux. Aussi loin que se portait le regard, la forêt.  Cet endroit m'était familier et me rassurait et, sans qu'on ait besoin de se le dire, je savais que Maïlys et Herod partageaient ce sentiment. Notre lien devenait de plus en plus fort au fur et à mesure que le temps passait. Il m'arrivait de ressentir les sentiments de mes amis et j'avais même discerné une fois, me semblait-il, une des pensées d'Herod.

Je me calai plus confortablement et levai les yeux. Le ciel étincelait d'étoiles au-dessus de moi. Je me surpris à penser à l'enchanteresse. Que lui avait-on fait pour qu'elle cherche ainsi à se venger ? Je fermai les yeux et tentai de comprendre ce qu'elle ressentait. D'une certaine façon, je me sentais proche d'elle, je n'aurais su dire pourquoi. Soudain, je sentis mon esprit se faire aspirer. Je ne connaissais que trop bien cette sensation. Me laissant tomber en arrière, je me laissai emporter par la vision.

Un corps calciné devant moi. Des larmes mouillant mon visage. Ce cadavre, je ne le connais pas, mais au fond de moi, je sais qui est cette personne brûlée, gisant sans vie dans l'herbe. Prise d'une rage incontrôlée, je me lève et fixe la silhouette qui se tient à l'autre bout de la clairière, les mains illuminées d'un feu ardent. Une voix qui n'est pas la mienne sort de ma bouche :

-Halcyon, comment as-tu pu ...?

La silhouette baisse les mains, désemparée, et la lumière de sa magie s'éteint.

-Opale, je n'avais pas le choix. Je te le jure.

Je ne le crois pas et je le fixe durement, les larmes ruisselant sur mes joues.

-Ton meilleur ami, Halcyon. Il était ton meilleur ami. L'as-tu oublié ?

-Azur... commence l'autre, hésitant. Azur... n'était pas celui que l'on croyait.

-Mensonge !

Cette fois, j'ai crié. Je hurle, et les mots se déversent en torrents, contenant toute la haine du monde.

-Mensonge ! Tu étais jaloux, Halcyon, et tu l'as tué parce que c'est lui que j'avais choisi ! Je te déteste ! Je te hais !  Comment croyais-tu que j'allais t'aimer après ce que tu as fait ?

-Opale, je te jure...

-Tais-toi ! Je ne veux plus t'entendre ! Tu me dégoûtes !

Je ne veux plus le voir. Le désir de tuer m'envahit. Je sors mon sabre. La Rose Noire. Elle qui m'a été toujours fidèle. Mon sabre qui fera couler le sang de cet homme que je déteste. Halcyon a un pas de recul.

-Opale, je ne veux pas me battre contre toi. Ecoute-moi, je t'en prie. Tu ne sais pas la vérité. Azur nous a trompés, il n'était pas juste un loup-garou. Je t'en prie, Opale, crois-moi, me supplie-t-il, les mains tendues vers moi.

La haine m'envahit. Tel un fauve, je gronde :

-Je vais te tuer, Halcyon !

Je bondis. Puis je me sens tirée en arrière tandis que ma vision se termine. Avant que le monde ne se brouille, j'ai juste le temps de voir le visage d'Halcyon. Et j'étouffe un hoquet de terreur.

Puis c'est le noir.

Je me réveillai soudain dans l'herbe de la clairière. Tremblante, je me relevai en comprenant tout à coup que ce que j'avais vu était le passé de l'Enchanteresse. Mais ce visage entraperçu me hantait. J'en étais certaine, c'était celui de Masque de Mort.

Le lien du sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant