Du sage à l'Ampe - 2

290 63 33
                                    

La psychologie n'existait plus. La discipline avait disparu quelques années auparavant, à l'issue de ce qui se révéla être la crise la plus importante de son existence. La faute à qui ? Difficile à dire.

Après une apogée du recours à la psychologie au début des années 20, plusieurs contestations se firent entendre : absolument tout le monde allait consulter et ça n'aidait absolument personne. Rien ne changeait, hormis le prix des consultations qui augmentait fortement. Puis ce fut l'affaire Graviat. La première grande affaire judiciaire de laquelle avait sans doute découlé tout le reste.

Plusieurs clients, non contents de ne pas aller mieux à l'issue de leur "travail", s'assemblèrent pour porter plainte contre leurs psychologues. Après des mois de polémique dans les médias, la cour finit par trancher en faveur des plaignants. Condamnés pour escroquerie en bande organisée ou quelque chose de ce goût-là. L'affaire fit jurisprudence.

Ce fut un carnage. On soupçonna même certaines personnes de commencer un "travail" uniquement pour se retourner contre leur psy. Ces derniers se firent plus rares, jusqu'à disparaître. Chassés par la meute, haïs, conspués. Des blagues naquirent... Faire appel à un psychologue était devenu une honte.

C'est à ce moment-là que les premiers sages apparurent. Ils proposaient toutes sortes d'aide. Du simple conseil au plus long "travail". Mais ils ne détenaient aucun diplôme qui les rendent responsables devant la loi. De plus, on pouvait les consulter pour obtenir toutes sortes de conseils, informations...

Faire appel aux sages était devenu courant, c'était un signe de bon-sens. Tous ceux qui aboyaient contre ces charlatans de psychologues se ruèrent aussitôt sur les sages. (Qui étaient pour la plupart d'anciens psychologues reconvertis.)

Édouard saisit une veste en plastique recyclé (il n'était pas écolo mais il jugeait que c'était à la mode). Il passa sa porte dématérialisée et se rua dans son smartscenseur.

Les ascenseurs avaient fait des progrès considérables en terme de vitesse et de fonctionnalités depuis qu'Apple s'était penché dessus, avec le premier Iscenseur. Tout le monde avait d'abord rigolé. Au bout de quatre ans ( et autant de versions), la plupart des escaliers avaient disparu des villes. Désormais, on se moquait des gens qui avaient un Iscenseur alors qu'un smartscenseur était moins cher.

Il descendit directement au sous-sol, où l'attendait sa voitube (on en parlera plus tard). Il entra, "pianota" l'adresse du sage, rue Retrovain. La porte scanna l'intérieur du véhicule et se ferma. La ceinture ceintura le passager, et la voiture fila à la vitesse du son dans le réseau souterrain de la ville.

Une minute plus tard (il fallait ralentir avant de s'arrêter), la porte s'ouvrit sur le sous-sol d'un cabinet de sages. Édouard prit l'Iscenseur.

Wattys 2040Où les histoires vivent. Découvrez maintenant