La petite fille aux soupirs

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Il fait très froid et la nuit engloutit l'enfant dans cette grande ville. La neige lui mouille les pieds tandis qu'elle déambule dans les rues faiblement éclairées. Pourtant, c'est ce qu'elle préfère : avoir une vue sur la ville et ses habitants. Mille lumières jaillissent dans ses petits yeux humides.

Là, elle voit un grand homme en costume chic, avec une valise sous le bras. Sûrement un grand homme, comme son papa. Il est au téléphone et semble tant accaparé par ses soucis qu'il ne preste guère attention à la jeune femme qui marche près de lui. Elle le regarde d'une tendresse malheureuse. Y'a t'il quelque chose d'assez important pour oublier de profiter de ceux qui nous aiment ? La petite fille soupire.

Au détour d'une rue, elle aperçoit un adolescent qui crie sur sa maman. Tout deux se lancent des choses que ses parents lui ont toujours interdit de répéter. Le garçon sait-il que sa mère n'est pas éternelle et qu'il regrettera bien assez tôt son comportement ? Sait-elle le mal qu'un enfant peut avoir, quand sa maman ne l'aime pas correctement ? Mais qu'est ce qui détruit tant la vie pour que tout devienne si incompris ? Tandis qu'elle s'éloigne, la petite fille soupire.

Un petit chien vient se presser contre elle. Ce soir, c'est Noël. Lui ne fêtera pas, il aura froid. L'enfant le serre dans ses bras en étouffant ses pleurs, car l'amour est la plus belle des chaleurs.

La petite marche et rencontre des enfants qui crient et rient. Ils lancent des boules de neige, ne pensent qu'à s'amuser. Des lueurs malicieuses brillent dans leurs yeux encore si innocents. Ils ont l'air si heureux, elle aurait aimer courir vers eux.

Assise sur un banc, il y a une vieille dame, qui semble sereine. A t'elle compris à quel point la vie est courte et que le temps n'existe pas ? Que le bonheur est ici, juste là ? Près d'elle, un artiste achève de ranger ses oeuvres. Aujourd'hui encore, personne ne s'est intéressé à lui. Ce qu'il fait est pourtant beau, pense l'enfant, mais les gens sont bien trop occupés à penser à leur propre idéaux. La petite fille soupire.

Elle finit par se diriger vers la colline, là ou la neige arrive jusqu'à ses petits genoux. C'est bien ici son endroit favori : elle y voit la ville et la vie, où chacun est accaparé par ses petits soucis. Elle n'a pas froid aux pieds mais froid au coeur, car elle est témoin de ce malheur. « Il est si futile » pense-t'elle, car les lumières ne cessent d'être belles. La vie c'est donc ça, comprend-elle, aimer ce qu'on a et apprécier ceux qui sont là. Les lueurs de la nuit tâchent son petit visage qui soupire, qui soupire tellement fort que la neige s'envole d'un éclat doré, épousant son éphémère beauté.

La petite fille s'est depuis bien longtemps envolée.

Morceaux d'adolescenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant