Morceaux d'adolescence

Rappelle toi

Rappelle moi comment c'était, avant tout ça. Quand on riait, chantait et ne souciait de rien ? Qu'est-il arrivé depuis ? Tu m'attendais et nous nous rendions en classe ensemble, où nous oubliions que la vie est bizarre parfois.

Rappelle moi comment c'était, nos messages sur les réseaux sociaux, toi qui prenait des photos, moi qui m'occupait de mes plantes. Les crêpes de maman et les biscuits de ta mamie. Les exercices de maths qu'on faisait près de la balançoire et les secrets que je te disais de ne jamais répéter. C'est si futile maintenant, non ?

Rappelle moi l'innocence, les chansons qui nous berçaient et construisaient les souvenirs que nous chérissons maintenant aujourd'hui. Les nuits blanches passées à s'enticher de nos avenirs, de nos rêves. Tu voulais devenir artiste et moi avocate, on s'échangeait nos idées et on se promettait d'y arriver. De ne jamais renoncer.

Ce jour où tu t'es ouvert le front et que tes parents n'étaient pas là, que tu es venu chez moi, je m'en souviens encore. Maman t'as mis du désinfectant et nous a fait regarder un Disney. On était si petits, j'en ris encore, quand j'y pense. Le temps nous a bien changé mais les souvenirs sont immortels.

Tu te souviens quand tu m'as dit que nous allions aller dans le même lycée ? On ne se parlait presque plus à ce moment là mais tu es venue, et j'ai été ravie. Mais la magie avait disparue, les arbres étaient moins spectaculaires et nos illusions dissipées. Je pense qu'on aurait aimer garder contact mais l'Univers en a décidé autrement. C'est ce que tu m'as écrit.

Rappelle toi ce que disait Elizabeth Bishop : « Dans l'art de perdre il n'est pas dur de passer maître ». Qu'as tu (qu'avons ?) nous perdu ? Peut-on encore le retrouver dans la rosée des nuages, dans la rosée du matin ou dans mon coeur brisé ? Dit le moi, je t'en supplie.

Rappelle toi nos rêves et nos promesses, nos pensées et nos idées. Le sourire de ton petit frère, les câlins de la vieille Sophie (tu sais, la folle du village). Notre premier baiser et le dernier, nos étreintes et nos âmes esseulées.

C'est toi qui a fait que je sois tant déterminée et prête à vivre. C'est cette amitié d'enfance, que les livres ne comprennent pas et que les films rendent clichés, c'est cet amour qui nous a forgé autant que notre propre famille. Tu es ma famille.

Rappelle toi de tout cela, et donne moi des réponses. Qu'est ce qui est passé dans ta tête, ce soir-là ? As-tu souffert ? As-tu compris la souffrance que tu allais causer, la dépression de ta maman, le départ de ta soeur et la destruction de mon quotidien ?

Rappelle toi, s'il te plaît. Et réponds moi.