Le Roi en Exil, tome 1 [TERMINÉ]

4.17 : À travers les collines, dans le froid

Ce ne fut pas la lumière du soleil qui la réveilla — il n'y en avait pas en ce jour bien gris — mais le froid intense qui recouvrit son corps quand Cavan abandonna ses bras pour ramper hors de l'abri.
Neve ouvrit les yeux, et malgré la fatigue qu'elle ressentait encore, elle se sentit apaisée. Elle comprit que quelque chose s'était passé hier soir. Elle avait enfin dénoué un des nœuds de sa vie. La corde était encore très emmêlée, mais à présent, elle avait confiance : elle réussirait à la dénouer complètement.
Le sourire aux lèvres, elle sortit à son tour... et fit la grimace quand une rafale de vent glacial s'engouffra sous ses jupes. Elle s'enveloppa étroitement dans son manteau et descendit vers le petit ru. Elle passa un coup d'eau sur son visage pour effacer les derniers vestiges de la nuit, et but quelques gorgées.
Elle se redressa, à la recherche de son compagnon, et le découvrit juché sur la plus haute colline des alentours, le regard au loin. Immédiatement, son cœur bondit dans sa poitrine. Il ressemblait à un chef de guerre, avec sa cape qui claquait au vent, ses bras hâlés entourés de tatouages étaient à l'air libre, comme s'il ne craignait pas le froid — ce qui devait, sans doute, être le cas. Un guerrier qui défiait les éléments.
Subjuguée, elle resta un long moment à se repaître de sa silhouette rassurante. Puis il se tourna vers elle, et lui fit signe. Aussitôt, elle grimpa à sa suite et agrippa la main qu'il lui tendit.
Il la fixa de son regard sombre et intense.
— Prête ?
Neve hocha la tête.
Elle ne l'était pas, mais elle n'avait pas vraiment le choix. Il leur restait un très long chemin à parcourir, et plus vite ils reprendraient la route, plus vite elle aurait une chance de se reposer dans un bon lit et de faire un bon repas.
Ils marchèrent des heures, le ventre vide.
Le paysage était magnifique, malheureusement, il ne regorgeait pas de beaucoup nourriture. La jeune femme vit bien quelques lapins détaler devant leurs pas, mais ils étaient trop rapides pour qu'ils puissent les attraper. Et ils n'avaient pas le temps de s'arrêter pour les piéger.
Cavan l'entraina à travers cette partie du pays qu'elle ne connaissait pas. Elle le soupçonnait, par contre, de très bien connaître son chemin.
Les guerriers ne lui avaient jamais expliqué dans les détails ce qu'ils faisaient exactement pour l'ancien roi, mais elle supposait qu'ils devaient régulièrement traverser le pays pour se déplacer, et se cacher.
Lorsque la pluie commença à tomber, Neve perdit une partie de sa bonne humeur. Le petit crachin se transforma vite en averse puissante et cinglante.
Cavan voulut faire une pause vers midi, mais la jeune femme refusa.
— Si je reste sans bouger, ne serait-ce qu'une minute, je ne pourrais plus repartir, déclara-t-elle le visage ruisselant de pluie.
Le guerrier l'examina un instant, hésitant à lui obéir, puis hocha la tête. Il déposa un baiser rapide sur ses lèvres, et la tira de nouveau derrière lui.
La journée n'était pas beaucoup avancée lorsqu'il décida de chercher un endroit pour s'abriter.
Le soleil n'avait pas montré le bout de son nez depuis le matin, et la nuit tomberait plus tôt que d'habitude. Ils n'avaient pas beaucoup progressé, mais il savait qu'il en serait ainsi, et avait pris son mal patience. D'autant plus qu'il se retrouvait, seul, avec une femme qu'il désirait, et faire durer le voyage n'était pas forcément pour lui déplaire. Il était cependant inquiet de se retrouver véritablement seul avec elle. La nuit dernière, il n'avait pas réfléchi, les gestes étaient venus d'eux-même, de manière naturelle, et s'il n'avait été bloqué dans son élan, il se serait passé beaucoup plus de choses.
Mais ce soir, ils savaient tous les deux comment ils allaient passer la nuit. Et ça le rendait terriblement nerveux. Il se sentait comme un adolescent à son premier rendez-vous. Il pesta, et se moqua de lui-même. Il était ridicule !
Il était adulte, avait couché avec beaucoup de femmes, et n'avait pas à se sentir éperdu pour une simple guérisseuse qu'il avait rencontrée même pas deux mois plus tôt.
Il secoua la tête et essaya de penser à autre chose.