Trouble

Chapitre 17 - Visions

Le gazon crame sur mes lèvres tandis que je déambule dans le passage sombre et suintant qui mène à elle.

J'ai regretté mes paroles quand les siennes ne m'ont pas permis de me sentir en position de force. Alors au lieu d'occuper ma nuit à écrire j'ai réfléchi, mais visiblement pas assez puisque je me retrouve ici.

Le grillage rouillé me fait face et me défie d'un quelconque acte de bravoure, celui de l'appeler pour m'excuser de mon comportement plus enfantin que je ne l'accusais de l'être.

Je ne bouge pas.

Il fait froid mais pas trop, il pleut puis ça s'arrête.

Un couple passe et sourit, puis me dévisage et s'unit. Quelques volatiles noirâtres croassent sur ma tête et leur sonorité semble se railler de moi.

Trouillard.

Voilà ce que j'entends.

La ville s'assombrit, mon joint s'éteint, je n'ai plus le temps.

Qu'est-ce que j'attends ?

Pour passer ce grillage corrodé et la retrouver ou partir comme un lâche en courant ?

Mes gestes sont lents et craintifs à un tel point que cela me surprends moi-même. Je sors mon téléphone et cherche désespérant dans mon journal d'appel celle à qui j'ai fait de la peine. Sans succès.

Je réessaie, sans enthousiasme ni même l'envie de l'entendre, je crois que je cherche simplement à apaiser ma conscience bien corrosive avec moi ces derniers temps.

Elle décroche, son souffle m'octroie l'infime instant de la tenir en haleine, alors je me lance, les flots de mots se dégagent et je les vois étoffer la noirceur qu'émane de moi.

- Je suis désolé.

- De ?

- T'avoir fait du mal.

- Pourquoi ?

- Pourquoi quoi ?

- Tu t'excuses ?

- J'sais pas.

Le silence refait surface et me menace de la perdre si je ne suis pas plus loquace.

- J'avais envie de te revoir, je reprends.

- Tiens donc.

- Tu me manques.

- Tu mens.

Elle dit vrai, j'ignore pourquoi ces mots ont traversé ma pensée.

- Tu m'en voudras toute ta vie ? Je demande.

- Non, mais tu n'en feras pas partie assez longtemps pour que j'aie le temps de te pardonner.

- À ce point ?

- Ouais.

- Pourquoi tu me déteste ?

- C'est ce que tu voulais.

- Pourquoi tu dis ça ?

Elle renifle pour toute réponse.

Un ballon de foot roule à mes pieds. Je shoot dedans et ne préfère pas répliquer, de peur de m'enfoncer.

- Tu poses trop de questions.

- J'essaye de comprendre.

- Ne t'abaisses pas au niveau d'une gamine dont tu n'as pas de comptes à rendre. Tu risques de souiller ton esprit de jouvence.