Neuf

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Ce qu'on a fait cette nuit là, il n'y a pas de mots pour le décrire. Et aucun des mots que l'on pourrait inventer ne serait assez juste, assez beau, assez doux. Cette nuit là, allongé dans l'herbe,  on a rêvé le vent, on a séduit la liberté, on a courtisé les étoiles.  Et la lune nous regardait en souriant, nous promettant qu'elle emporterait le secret de notre union  dans le ciel. Elle veillait sur nous, et on avait plus qu'à se préoccuper de nous. Rien que nous deux. C'était encore plus beau que ce que m'avais raconté Samy. Plus magique. La liberté était encore plus enivrante. Les étoiles plus brillantes. L'herbe encore plus douce. Et le vent. Il sentait si bon. Il soufflait beaucoup, mais j'avais pas froid, dans les bras de Samy.
On est resté là, assise dans l'herbe jusqu'à ce que le jour se lève. Et, au loin, on a entendu les policiers arriver. On s'est pas levés. On a pas bougé. On a pas sourit. On ne les même pas regardé. Ils nous intéressaient pas. Tout ce qui nous importait c'était la nuit qu'on venait de passer, tout les deux. Et la liberté qui nous avait porté, et la lune qui avait veillé sur nous.
Je me rapelle, un peu flou, le trajet, en silence. Main dans la main avec Samy. Et puis le commissariat. Les cris de ma mère.  La douleur cuisante de la gifle. Ses larmes. Ses bras qui me serraient contre elle. Moi, je bougeait pas. J'avais envie de la repousser, qu'elle me lâche, de lui dire que je préférais retourner de là où je venais, avec Samy que d'écouter ses mots d'amour faux et mielleux qui m'écoeuraient et me donnaient envie de vomir. Mais je me suis tu. Et j'ai acquiescé bêtement quand elle me parlait. Je ne voyais que Samy, à quelques mètres de moi, qui discutait avec les policiers. Au bout d'un petit moment à parler dans le vide, mais mère a fini par se rendre compte que je l'écoutais pas, et elle a dit :
-Tu dois être fatigué. On rentre.
Je voulais pas. Je voulais rester avec Samy, pas aller avec elle. Je voulais continue à regarder les étoiles avec lui. Alors il s'est levé, est venu vers moi, je me suis approché à mon tour, et il m'a embrassé. Ma mère a hurler que c'était sale, que ça devrait être interdit, elle m'a giflé encore et m'a tiré dans la voiture. Moi, je m'en foutais, Samy m'avait embrassé.

Ce fut mon dernier contact avec le garçon qui voyait les couleurs de la Vérité.

J'ai vu les couleurs de la VéritéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant