2. "Le jour où il la laissa sur le parvis de l'église (...)"

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« Le jour où il la laissa sur le parvis de  l'église sans se retourner, sa vie changea. » 2014 pour http://justeunmot.skyrock.com/

-          Je ne t’ai jamais aimé.

Ses yeux sont noires, vides. Ses prunelles ne dégagent plus aucune émotion, alors que le jeune homme lui tenant la main vient de lancer cette phrase dure et sordide d’un ton détaché. Elle avale sa salive, alors que son teint vire au blanc pâle, et que ses doigts fébriles s’accrochent aux doigts forts de son amant, qui a tourné la tête, pour ne plus avoir à la regarder. De sa main libre, elle prend son voile du bout des doigts, et le relève de son visage, le laissant délibérément à la vue de tous, et surtout de la sienne. Elle se mordille la lèvre, et une larme coule le long de sa joue de manière complètement involontaire. La voilà, idiote, débile, malheureuse, devant l’autel qui aurait dû la combler. Et le pire, c’est qu’il n’a même pas le courage de la regarder.

Elle souffle un grand coup, et regarde sa magnifique robe qu’elle a payé des milliers de dollars avec un goût amer. Voilà ce à quoi a servi sa misérable paye annuelle ; une robe qui n’aura jamais servi plus que dix minutes. Elle glisse les pieds sur les sols, sentant la froideur du sol de l’église lui congeler ses fins doigts de pieds. Une mèche de ses longs cheveux bruns bouclés lui passe devant les yeux, mais elle n’a pas le courage de l’enlever.

Elle repense à son sourire qu’elle abordait devant son miroir, une trentaine de minutes plus tôt. Elle aurait fait une belle mariée, si elle s’était mariée.

-          C’est drôle. Je pensais que tu aurais eu l’idée de me prévenir avant l’échange des alliances.

Harry délie ses doigts des siens, et laisse sa main tomber derrière lui. Il regarde ses pieds, une fausse mine déconfite affichée sur le visage, un silence troublant s’installant entre les deux jeunes fiancés. Personne ne parle, personne ne bouge, alors que tous les deux auraient besoin d’exprimer ce qu’ils ressentent pour pouvoir comprendre, saisir, et tenter de ne pas trop en garder un mauvais souvenir.

Mais aucun des deux n’a envie de parler en premier ; Harry n’en a pas envie, car il se sent fautif ; Marina ne lâchera pas, car elle n’a rien à se reproche. Ils attendent, que quelque chose se passe, que quelque chose se dise, pour que les mots viennent naturellement, les détruisant chaque comme le ferait des couteaux, entrant dans leurs corps et détruisant tout ce qu’il y avait de vivant en eux.

-          J’en conclus que vous n’allez pas vous marier ? demande le prêtre à demi-mots.

Marina pouffe de rire, à la plus grande surprise de l’assemblée. Elle relève le visage, et regarde le prêtre avec désespoir et dégout, avant de dire froidement :

-          Oui, je pense bien que quelqu’un qui ne m’aime pas ne va pas me prendre pour épouse.

Elle se met alors à parler dans sa barbe, ses mots étouffer par les larmes et la tristesse, incompréhensibles aux oreilles attentives du prêtre, du fiancé et des invités. Elle secoue ensuite la tête, essayant de se reprendre, reprenant une grande inspiration, couper par quelques arrêts, que son cœur force à faire, ne savant plus comment faire pour travailler correctement. Il bat si vite, si fort, et si longtemps, qu’il en est perdu. Surtout que régulièrement, il s’arrête, comme pris d’une décharge électrique incroyable, insoutenable, incompréhensible qu’il ne saurait comprendre. Ses émotions sont incontrôlables, pour son âme, pour son corps, pour tout son être qui ne savent plus que penser et que faire face à cette scène qu’elle ne pensait jamais vivre. Cela l’agace, cela l’énerve.

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