Je veux être digne d'être le père de tes enfants.
Sa phrase résonne dans ma tête comme le pleur d'un enfant résonnerait dans une pièce close et vide. Elle réchauffe mon cœur et mon âme en deux temps trois mouvements. Ce don qu'il a de me rassurer, sans même avoir besoin de faire aucun effort. C'est dans ces moments-là que je me dis que ma vie, je souhaite la passer à ses côtés.
Je le regarde dans les yeux et lui sourit. Il me renvoie ce sourire en un encore plus beau puis je pose ma tête sur son épaule.
Malgré l'apaisement qu'il m'a procuré, je ne cesse d'avoir ce pincement dans mon ventre, ce sentiment qui m'effraie sans même savoir pourquoi. C'est si étrange.
Plus le train avance et plus ce pincement grandit, absorbant avec lui toute la joie que j'ai pu transporter de Turquie.
18h16
Je regarde mon téléphone après m'être réveillée.
« Passagers bonjour. Nous vous informons de votre arrivée à la gare de Marseille - Saint Charles. SNCF vous remercie de votre confiance et vous dit à bientôt. »
Nous sommes arrivés et mon angoisse s'est multipliée fois dix.
Je réveille Najib qui dort profondément, la bouche grande ouverte. Cette image est à la fois drôle et mignonne. Il est à croquer.
« Allez Najib réveille-toi, on est arrivés. »
Il murmure mais n'est toujours pas conscient, alors je pousse son épaule avec moi et le bouscule. Il se réveille enfin et me demande où nous sommes. Je ne peux m'empêcher de rire et lui réponds :
« On vient d'arriver en Turquie, que les vacances commencent !
- Déjà? »
Je rigole de plus bel, ce qui diminue un peu mon angoisse et lui explique que nous sommes arrivés chez nous. Quel imbécile il peut être parfois !
Sortis du train, nous retrouvons Karim, toujours avec ses mains dans les poches, et Leila, toujours avec son grand sourire. Ce que j'aime le plus chez cette fille devenue jeune femme c'est qu'elle ne cesse de sourire, toutes circonstances soient-elles.
« Alors, votre voyage s'est bien passé? nous demande-t-elle.
- Aussi bien que le vôtre je suppose, lui ai-je répondu. »
Elle remarque, malgré mon effort de cacher mon angoisse toujours présente, la froideur par laquelle je lui ai répondu et prend ma main pour marcher plus à l'écart des garçons.
« T'es toujours autant inquiète pour ton frère ?
- Oui, je ne sais pas exactement si c'est mon frère ou autre chose, mais une chose est sûre : quelque chose m'angoisse.
- Je pense que tu n'as pas de soucis à te faire, d'accord? Laisse-nous déjà arriver sereinement et ensuite si quelque chose se produit, c'est comme ça. En attendant, calme-toi et ne gâche pas ton séjour. »
Elle a raison. Je me suis fais des tas de films pendant tout le trajet pour aucune raison.
Nous continuons à parler tout en sortant de la gare et je me retourne pour voir les garçons. Ils sont arrêtés un peu plus loin derrière nous. Najib parle au téléphone avec je ne sais qui, et j'arrive à apercevoir de loin qu'il est contrarié. J'arrête Leila, en plein dans son monologue, et la tire par le bras pour les rejoindre.
« Qu'est-ce qui se passe?
- Rien, finalement ce n'est pas Mehdi qui passe nous chercher, d'après ce que j'ai compris, me répond Karim.
- Ok, pas de soucis... Merci... A tout de suite. »
Najib raccroche.
« Un pote... euh... passe nous prendre, nous dit Najib.
- Et pourquoi Mehdi ne peut pas? ai-je demandé.
- Je n'en sais rien, Naïla. »
Il répond en prenant son temps, comme s'il cherchait des mots. Il m'inquiète car lui-même a l'air inquiet.
Je ne veux pas lui demander car en ce moment j'ai clairement l'impression d'être parano et de paraître toujours inquiète. Je choisis donc de me taire et j'ai hâte de rentrer chez moi, ou pas.
Nous attendons près d'une heure avant que son soi-disant pote arrive.
« Si on avait pris le bus on serait déjà arrivés, lâche Leila.
- Carrément ! ai-je dis en rigolant.
- Fermez-la il est là, c'est bon, marmonne Najib.
- Quelle humeur ! rajoute Leila. »
Je ne préfère pas commenter son ton, je n'ai pas vraiment envie de m'énerver sur lui, même si son humeur m'agace fortement. Il n'a pas parlé de toute l'heure et n'a pas quitté son téléphone des mains, Dieu seul sait à qui il parlait.
On rejoint la voiture de son ami, que j'ai dû croiser deux ou trois fois dans le quartier. Je crois qu'il s'appelle Slimane ou Sami, j'en sais rien. Et ça m'est égal, ce que je veux sur le moment c'est rentrer chez moi le plus vite possible et ne plus supporter le comportement désagréable de Najib.
Trente minutes plus tard, on arrive enfin chez moi. Ma mère, mes sœurs et les parents de Leila nous y attendent. Je me jette directement dans les bras de ma mère et la serre fort. Elle m'a tellement manqué.
Je la regarde de haut en bas sans la lâcher et je remarque son teint fatigué et ses poches encore plus grandes sous ses yeux.
« Comment tu vas, benti?
- Je vais très bien Mama, et toi? T'as l'air fatiguée. Tu es malade ?
- Non, benti, le travail m'a fatigué un peu c'est tout.
- Tu es sûre ?
- Oui, benti, ne t'inquiètes pas. »
Il faut savoir que ma mère a fait d'énormes progrès en français et parle de mieux en mieux, même si ça a été plus dur pour elle que ça l'était pour nous.
Mais là n'est pas le sujet. Quelque chose ne va pas et je le sais.
Je me retourne et aperçois mes sœurs. Je les sers fort dans mes bras. Mariam ne peut s'empêcher de pleurer et là je comprends qu'il y a réellement quelque chose que personne ne m'a dit...
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À travers les paroles d'une enfant palestinienne
General FictionÂgée de 10 ans, Naïla a déjà surmonté tant d'épreuves auxquelles peu d'enfants ne le peuvent. Pourtant, sa foi et son espoir n'ont cessé de grandir au fur et à mesure du temps et elle doit faire face à de nombreux et tout nouveaux obstacles. À trave...