[10ème partie]

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   Sur le coup, comme d'habitude, je m'imagine pleins de trucs. Est-ce qu'elles vont bien ? Est-ce qu'elles sont toujours vivantes ? Est-ce qu'elles sont en bonne santé? Elles mangent bien, elles dorment bien ?  Une bombe leur est-elle tombée dessus? Sont-elles blessées? Ont-elles été séparées ? Un tas de question se posent dans ma tête, auxquelles je ne peux avoir aucunes réponses.

  Je commence à pleurer, de peur de les avoir perdues elles-aussi, alors que Smahane les attend avec impatience. J'ai tellement peur et sur le coup j'invoque Allah pour qu'Il les protège et les garde.

   Najib me prend dans ses bras, parce qu'il ne sait pas comment agir, je pense. Je trouve ça très gentil de sa part. En plus, je pense qu'il est aussi triste, car son pays à lui aussi, n'est pas protégé, ainsi que sa famille.

  Après ça, je cours vers Mama lui raconter ça. Elle est choquée comme je l'ai été mais elle reste optimiste et me rassure en me disant que ça va aller, en me prenant fort dans ses bras.

|le lendemain, 8 heures|

  Je suis tellement excitée de la journée qu'on va avoir. Je remarque que ma mère est déjà partie, je fais une petite prière pour que tout se passe bien pour elle et je descends prendre mon petit déjeuner. Bien sûr, Yassine est déjà levé et a mangé. Je le vois se préparer et le monsieur l'appelle pour l'emmener a l'école. Je lui fais un gros bisou et il s'en va, tout content.

|10h25|

  Nous sommes chez la dame. Sincèrement, il n'y a rien de tellement intéressant à raconter. La chose la plus importante à savoir est que la dame est très gentille, et qu'elle nous apprend très bien. On a appris l'alphabet, pour commencer. J'ai tellement aimé ! Je sens mon rêve à deux doigts de se réaliser !

  En rentrant, on mange, je joue avec les petites, pour pas changer. J'attends ma mère jusqu'à ce qu'elle rentre. Une heure, deux heures, trois heures passent. Et là, mon Yassou arrive, tout heureux, avec un sourire immense. Il me voit et court vers moi avant de me serrer dans ses bras.

  «Alors, comment ça s'est passé omri?
- Ohlala Naïla, c'était trop trop bien. Y avait pleins d'enfants dans la récréation [il essayait de prononcer ce mot en français, c'était trop drôle], ils jouaient. Au début, moi, j'avais peur, je connaissais personne. Et un petit garçon, m'a parlé. J'ai pas compris [il rigole]. Je lui ai répondu en arabe, et il m'a compris ! Il m'a parlé un arabe pas comme celui qu'on parle mais je l'ai compris un petit peu. Il m'a appris pleins de chose en français.
- Ah bon ? Comme quoi ?
- Bah arbre, il y avait aussi... euh... Mince ! j'ai oublié c'est quoi le mot. [C'était trop drôle de l'entendre dire des mots que je connaissais pas, et qu'il arrivait pas trop à prononcer.]
- T'es content d'avoir un copain maintenant ?
- Oui, trop !!!»

  Au même moment, Mama arrive, toute contente aussi. Elle nous raconte sa journée : elle a rangé les rayons de l'épicerie, elle vendait aux gens, le monsieur l'aidait à parler français et elle commence à dire quelques mots. C'est un peu compliqué au début, c'est normal, mais on va tous s'y faire, inchallah. Mais bon, rien d'intéressant à dire sur un travail dans une épicerie.

  Ensuite, on lui raconte notre moment chez la dame, et Yassine lui raconte sa journée.

|1 an et demi plus tard|

  Naïla, 12 ans, vit en France, parle, presque couramment, le français, connait l'alphabet et sait écrire et lire. Durant cette année, une routine s'est installée, on s'est tous amélioré en français, surtout Yassine et Mama. Elle travaille toujours dans l'épicerie, et gagne de l'argent, assez pour un appartement dans un HLM, T2, petit mais un chez-soi, dans le quartier Nord de Marseille.

  Najib, Mehdi et moi nous est inséparables, toujours ensemble. On a tous progresser en français, la dame est une très bonne professeure, elle nous a dit qu'il était temps pour nous, d'entrer au collège et qu'il fallait s'accrocher.

  Toujours pas de nouvelles de Maï et sa maman, et les choses s'empirent en Turquie. J'ai fini par me dire que plus jamais je ne la reverrai, les chances sont trop faibles, mais elle reste malgré tout dans mon coeur..

{Aimez, commentez, merci à toutes/tous.}

À travers les paroles d'une enfant palestinienneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant