Chapitre 14

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Raphaëlle, sors de ta chambre!

-Non, jamais.

-Raph, c'est bon arrêtes ton cinéma!

-Je veux qu'elle sorte de chez moi tout de suite.

-Elle est parti il y a une heure. Sors. On est en train de louper tous nos cours de la matinée.

Il tambourine sur la porte de toutes ses forces.

-Raphaëlle, sors. S'il te plaît.

Je ne lui répond pas. Je ne veux plus bouger. Je connais Violette depuis que je suis née. Elle est égoïste, superficielle et très très mauvaise. Nos grands parents étaient très amis. Et Violette disait être mon amie. Elle m'appréciait tellement que lorsque j'ai eu ma première montre en argent, elle a eu la même. Lorsque j'ai eu mon premier rouge à lèvre, elle en a eu un encore plus chère. Quand je suis tombée amoureuse à 8 ans de ce fameux Martin, elle est sorti avec lui. Et lorsque je me suis mise à la boxe, elle a fait de même. Violette avait tout pour elle, pourtant, elle avait la fâcheuse habitude de jalouser tout et tout le monde et de croire que sa vie entière était une compétition. C'était ce genre d'amie. Le genre qui nous suit pendant des années, et qui, malgré l'envie irrévocable de nous éloigner d'eux, tombent toujours sur notre chemin. Elle avait dû apprendre que Nathan vivait chez moi. Et elle devait croire que je l'appréciais. Elle avait voulu se l'approprier avant. J'en était sure.

-Raphaëlle je vais défoncer la porte maintenant. Qu'est ce qu'il y a? Tu es jalouse?

-Jalouse? Mais tu es vraiment malade.

-Alors ou est le problème? Ton père n'était pas la cette nuit et ma sœur non plus. Tu t'es levé du mauvais pied c'est ça? Je pensais pas que tu nous verrai ensemble, tu as débarqué comme une furie dans ma chambre.

-Mais bien sur, tu as raison trou du cul, tout est de ma faute.

-Arrêtes de parler mal. Pourquoi tu voulais me voir? La petite Raphaëlle qui en a marre de sa petite vie minable a fait un cauchemar c'est ça?!

La colère monte et je me précipite sur la poignée de la porte. Aux larmes de tristesse se mélangent les larmes de colère, et, en apercevant sa tête, tous mes sentiments se décuplent. Je le regarde droit dans les yeux, les mâchoires serrées et lui lance:

-C'est l'anniversaire de la mort de ma mère, enfoiré.

Et pendant que son visage se décompose, ma main s'empare d'une force qui m'était jusqu'à présent inconnue et atteint sa joue en un instant. Je vais pour lui claquer la porte dessus, mais il attrape mon bras et le serre très fort. J'essaye de me débattre mais rien y fait, il est trop musclé. Il passe son doigt sur ma joue et en essuie chacune des larmes. J'ai envie de lui dire d'aller se faire voir mais je n'arrive plus à parler. Il prend son souffle pendant quelques secondes, et me chuchote:

-Je suis tellement désolé. Tellement.

Il lache alors mon bras et pars doucement dans sa chambre. Je pose ma tête sur le côté de la porte, je ne peux plus bouger. J'ai la tête qui tourne. Il a enlevé tout mon chagrin en une caresse.

C'est insensé. C'est anormal. C'est impossible.

Quand Papa rentre avec Emma, il n'a pas l'air de très bonne humeur. Évidement il n'est pas très heureux des coups de fils qu'il a reçu du lycée, pour le prévenir que l'on était pas en cours avec Nathan. Mais je sais que ce n'est pas le seul malheur de sa journée. Lorsqu'il me trouve allongé dans mon lit, immobile, il s'allonge à côté de moi. Je sais qu'il n'aime pas parler de maman, mais il sait que c'est important qu'il le fasse. Alors il prend une bouffé d'air et me dit doucement:

-Elle serait fière de toi.

-Je n'en suis pas si sure pourtant.

-Crois moi. Elle serait fière. Ta mère était comme toi, tu lui ressemble tellement.

-C'est faux. Elle était joyeuse, sociable et dévouée pour les autres. Elle était tout ce que je ne serait jamais.

-Raphaëlle... J'aimerai que tu te vois comme je te vois. Cette jeune fille douée à l'école, adorable avec Emma, comme tu l'es avec ton frère, gentille et rigolote. Parce que tu as toutes ces qualités que ta mère avait. Tu ne veux juste pas les voir. Tu sais, ta maman est parti, mais tu n'ai pas partie avec elle. Tu as le droit d'aller bien. Tu as le droit de vivre. Parce que ta maman t'aimait et qu'elle aimait la vie.

Ma gorge se serre, mon nez me picote. Je me retiens de pleurer.

-Et si un jours je ne me souvenais plus d'elle papa?

-Les traits de visage s'oublient ma chérie, les expressions se perdent, les odeurs s'évaporent et les voix ne résonnent plus dans nos têtes. Mais s'il y a une chose que je peux te promettre, c'est que lorsque tu voudra penser à elle, elle sera là. Toujours. Parce que j'ai aimé ta mère, plus que je n'aurai jamais cru aimer quelqu'un, et crois moi, on ne peut pas oublier Elia Sanders. Jamais.

Il pense à maman. Il avait trouvé la femme de sa vie, il était prêt à lui consacrer chaque secondes de chaques minutes de son existence. Mais cette existence avait été trop courte. Était devenue trop amère. C'était ça l'amour. C'était ça d'aimer.

Il pense à maman. Et moi j'ai un très gros problème.

Je pense à Nathan.

SMOKEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant