Chapitre 11

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Mon mal de tête était toujours présent lorsque je repris conscience. Je constatais que je n'étais plus sur le sol de la cuisine, mais allongé dans notre lit. Je grimaçais. Ma tête me lançait et je sentis une douleur se réveiller dans mon dos. La dispute. La violence. Pour la première fois Tae avait été violent avec moi. Pour la première fois j'avais osé lui dore ce que je pensais. La porte s'ouvrit à ma droite et Tae entra dans la chambre, portant un plateau contenant un verre d'eau, deux comprimés et un bol fumant de ramen, un sourire tendre sur le visage. Visiblement il avait décidé de faire comme si rien ne c'était passé. De passer sous silence la dispute de la veille, et son accès de violence. Je n'allais pas revenir dessus, j'avais bien trop peur de le mettre en colère à nouveau, et il le savait.

- Tu es réveillé ? Comment tu te sens ?

Je détournais le regard, gêné. Sa tendresse, son attention, son sourire, tout semblait faux. Il voulait simplement regagner ma confiance. Je grognais une réponse approximative.

- Mal à la tête.

Son sourire se fit encore plus tendre et il me tendit le verre d'eau et les cachets.

- Tiens ça va te soulager.

Je me méfais. Si avant j'aurais accepté sans broncher cette médication, aujourd'hui je ne pouvais pas l'empêcher de me poser des questions. J'avais peur de lui, je me méfiais de ce qu'il pouvait me faire. Je finis par me résigner, ayant trop mal à la tête pour refuser un quelconque soulagement.

- Ta mémoire est revenue ?

Je me figeais à cette question. Pourquoi est-ce que j'avais l'impression qu'il appréhendait ma réponse. Avait-il si peur que ça que je retrouve mes souvenirs ? Qu'il se rassure, c'était toujours le trou noir. Je lui lançais un petit signe négatif de la tête et il sembla retrouver son sourire.

- Oh d'accord ! Tiens, mange un peu ça va te faire du bien ! Je te laisse te reposer un peu, je reviens de te voir tout à l'heure.

Il me laissa le plateau sur les genoux, déposa un délicat baiser sur mon front, avant de sortir de la chambre. Je ne manquais pas de noter le cliquetis du verrou. Il m'avait enfermé. A clé. Avait-il si peur que je me sauve ? Cette dispute l'avait changé. J'ai l'impression que j'étais en train de découvrir le vrai Tae. Et je n'aimais pas ça. Je décidais de me concentrer sur autre chose et attaquais mon bol de pâtes. C'était délicieux, comme d'habitude. Tae avait le mérite de très bien cuisiner. Au moins un bon point. Je terminais rapidement mon maigre repas et décidais de me pelotonner à nouveau dans les draps, j'avais besoin de dormir un peu, et d'oublier tout ça. Pour le moment.

Quand je me réveillais, je remarquais à travers la fenêtre que la nuit était en train de tomber. Je tournais mon regard vers la porte. Toujours verrouillée. Je n'aimais pas cette sensation d'enfermement. Je voulais retrouver ma liberté. Et pour ça j'allais devoir être obéissant. Le cliquetis du verrou se fit de nouveau entendre, et je vis Tae entrer, son ordinateur portable à la main.

- Je me suis dit que tu devais t'ennuyer un peu, tu veux regarder un film ?

Je répondis timidement par l'affirmative, et immédiatement Tae vint se lover contre moi, sous les draps. Il posa l'ordinateur sur ses genoux et lança un quelconque film d'action. Je regardais à peine, trop perturbé par son comportement. Il était trop gentil avec moi, trop prévenant. Il me manipulait. Et moi je me laissais faire. Je n'avais pas le choix désormais.

Le film c'était fini, et Tae m'avait de nouveau enfermé, avant de revenir peu après avec un plateau repas. Nous avions mangé tous les deux, dans le plus grand des silences. Je n'osais pas ouvrir la bouche, de peur de dire quelque chose qui le mette en colère. Le repas se finit tout aussi silencieusement, et après avoir débarrassé, non sans avoir enclenché le verrou entre temps, il vint à nouveau me rejoindre dans le lit. Je ne bougeais pas, ne disais rien. Et il en avait profité. Il m'avait fait l'amour, mais rien à voir avec l'autre nuit. Il agissait, je le laissais faire. J'étais consentant, oui, mais par obligation. Je le laissais faire ce qu'il voulait, de peur de le fâcher à nouveau. J'avais peur. Cette fois-ci quand je fermais les yeux exténué, une larme, unique, silencieuse, roula sur ma joue. Je lui appartenais. Entièrement.

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