A six heures du matin, Ilywen se leva sans bruit, les yeux encore ensommeillés. Cela faisait deux nuits qu'elle dormait peu et sa fatigue commençait à le lui faire sentir.
Mais peu importe ; elle n'avait pas le temps de s'appesantir sur ce fait. Cette journée exigeait qu'elle soit parfaitement éveillée et opérationnelle. La jeune fille s'empressa donc d'aller plonger son visage dans l'eau glacée d'un robinet. Revigorée, elle avala un petit déjeuner express – quoique consistant – et quitta aussitôt le refuge sur un joyeux au-revoir aux gardiens. Tous pensaient certainement qu'elle se rendait de l'autre côté de la vallée du Triglav. Ils ne devaient pas la voir prendre une direction opposée. Même si elle ne comptait évidemment pas revenir dans le coin, il fallait qu'elle évite le risque qu'ils appellent Eldarion.
C'est la raison pour laquelle elle commença par s'aventurer dans la direction du col du Krik ; col où elle était censé aller. Une fois hors de vue du refuge, elle bifurqua vers la droite du vallon et repéra vite les cairns millénaires évoqués par le topo. Ils étaient très espacés et généralement petits ce qui ne rendait pas leur repérage aisé. Fort heureusement, les prédictions météos avaient vu juste. Le ciel était assez dégagé. L'aube était claire et la luminosité du soleil suffisante.
La jeune alpiniste évolua sur les pentes du vallon pendant une petite heure. Munie de son sac à dos et de ses photos de cartes, elle fouillait méthodiquement le paysage des yeux en s'arrêtant de temps à autre lorsqu'elle rencontrait des difficultés de repérage. Les cairns se confondaient avec les rochers mélangés au touffes d'herbes vertes, et se tenaient rarement au sommet d'un roc. Parfois, certains étaient à moitié détruits et il n'en subsistait qu'un amas désordonné de pierres. En bonne habituée de la montagne, Ilywen arrivait toutefois à les distinguer ; la disposition des pierres n'était pas naturelle.
Malgré tout, elle perdit la précieuse trace alors qu'elle arrivait au pied des falaises et erra plusieurs minutes eu pied de ces dernières. Alors qu'en son for intérieur, elle commençait à se demander si elle n'avait pas suivi une fausse trace depuis le début, elle tomba providentiellement sur le commencement de la fameuse via ferrata. Heureuse et soulagée, elle ne se relâcha toutefois pas et observa son itinéraire avec un calme remarquable.
« Tu parles d'une via ferrata... grimaça-t-elle devant les quelques barreaux rouillés et tordus qui sortaient du rocher. Le mot est fort. Ces machins doivent dater de la préhistoire. Il me faudra un sacré miracle pour qu'aucun ne casse. »
Poussant un gros soupir, elle enfila son anorak bleu et empoigna la première tige de fer après avoir vérifié les attaches de son sac.
Jugeant probablement la progression trop facile jusqu'alors, le vent décida de se mettre à souffler par rafales. Surprise, la jeune fille tangua et faillit lâcher prise avant de se rattraper in extremis. Elle reprit son ascension en émettant un grognement résigné. Les vieux barreaux en ferraille étaient éloignés les uns des autres et la verticalité de la falaise n'arrangeait pas les choses.
Ilywen monta ainsi de plusieurs dizaines de mètres sans trop accorder d'importance au précipice qui filait sous ses pieds. Elle passa agilement un ressaut, effectua un dangereux saut au dessus d'un barreau rompu et profita d'une petite vire surplombante pour se reposer. Recroquevillée contre la falaise, elle promena un regard étincelant sur les montagnes environnantes.
Elle continua ensuite au dessus d'un petit vallon recouvert d'éboulis, frissonnant à cause de la fraîcheur causée par l'ombre du versant. Peu à peu, elle s'aperçut qu'elle changeait de zone ; le rocher devenait plus sombre et la falaise était tachetée de petits buissons qui s'évertuaient à pousser sur ce milieu aride. Les barreaux rouillés descendaient progressivement et la jeune fille sentait arriver le terme de la via ferrata.
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La quête de l'île céleste
AdventureIlywen est une jeune fille aux origines mystérieuses, solitaire et rêveuse. Au fur et à mesure qu'elle grandit, une nouvelle certitude enfouie au plus profond de son être refait surface. Si elle ne se sent pas chez elle sur Terre, serait-ce parc...