Anaïs

Chapitre 2

Mon manque de confiance à sûrement été gravé sur mon front.
Non pas que le monde ait voulu me faire l'aumône de leur amour factice. Mais au contraire, les enfants quand ils voient une défaillance affective chez leur paire alors ils se lient d'un pacte silencieux pour enfoncer encore et encore l'être peu sûr de lui.

Je n'ai jamais eu d'amis.
J'ai eu une bande peu fiable.
Chaque matin sur le chemin de l'école je me demandais s'ils allaient être avec ou contre moi. Car il en était ainsi: c'était soit toute la bande avec moi ou toute la bande contre moi.

Un matin, je les vois regroupés. Je m'avance doucement. Tous ensemble, d'un même mouvement se retournent tous et m'accueillent avec le sourire. "Ah te voilà enfin, on avait hâte que tu arrives!! " dit la pire d'entre eux.
La plus manipulatrice. Celle qui trouvé toujours les mauvais coups. Elle s'apprête à me faire un câlin. Je suis sur mes gardes. Elle en fait un peu trop. Et soudainement me tire le pantalon jusqu'aux chevilles. Ma culotte à moitié abaissée. L'éclat de rire est général.
Je pars en courant et je ne peux retenir le torrent de larmes qui se créer en moi.

Comment être concentré à l'école aujourd'hui ?

Je me sens un être indigne d'être aimé. Pire, je ne leur en veux pas. C'est moi le problème. Je ne mérite que ça.
Ils sont toujours méchants avec moi, donc je ne prends plus cela pour une injustice mais pour une normalité.

Ce genre d'événement aura un impact considérable dans ma vie: ne jamais s'attacher aux amis.
Les amis ça n'existe pas.
Nous sommes juste des êtres qui trouvons agréable d'être entourés d'autres personnes qui nous ressemblent.
À chaque fois j'oublie cette règle et à chaque fois je suis amenée à m'en souvenir au vu des évènements.

Mais l'année de mes 13 ans, la donne a changée. Je me suis sentie enfin puissante.
Les élèves ne connaissaient pas le collège ni son fonctionnement. Moi au contraire, j'ai déjà bien sympathisée avec les surveillants.
Je n'ai jamais été forte à l'école.
Selon les années j'étais soit dans les derniers de la classe soit un peu en dessous de la moyenne. Mais je n'ai jamais été insolente. Au contraire ne faisant pas confiance à mes semblables, je voulais me faire aimer des adultes.

Quant à la maison il y avait des invités je me ruais sur leurs genoux. Les uns après les autres.
Je prenais ma dose d'amour.
J'étais collante mais ils ne se refusaient pas à moi car j'étais jolie et polie: une arme puissante.

Avec mes professeurs j'utilisais l'humour et je m'arrangerai de temps en temps pour avoir le professeur juste pour moi.
J'allais en fin de cours poser une question ou même raconter ma vie:    " Je vous annonce que je suis grande sœur pour la première fois depuis hier! " Et s'en suivait une conversation de quelques minutes bien agréables. C'était mon petit moment de bonheur: j'avais montré que j'existais, j'avais reçu un sourire ou de belles paroles. Je n'avais besoin que de ça pour survivre en milieu scolaire.

Je souviens même avoir reçu un été une carte postale d'une professeure de français. Je ne sais même plus pourquoi mais je crois qu'elle avait été touché par une de mes rédactions.

Le sujet était : décrivez votre jardin secret.
Il en faut du culot pour demander à ses élèves de d'écrire leur jardin secret.
Elle avait introduit en nous disant que le jardin secret c'est l'endroit où l'on aimerait se retrouver, l'endroit magique pour nous.

J'ai décrit un vaste terrain. Aussi vaste que vide.
Juste de l'herbe. Avec de hauts murs. Plus de 6 mètres.
Des fleurs grimpent de sorte que de l'intérieur on ne voit pas ces grands murs. Dans ce jardin secret personne ne pourrai me voir, ni m'entendre et ni même imaginer que je sois à l'intérieur.
J'ai décrit un endroit où je n'aurai jamais soif et jamais faim. Un endroit où je n'aurai aucun besoin.
Votre jardin secret.
Ce serai moi, le secret du jardin.

Je me souviens que le professeur a demandé à me voir après avoir rendu les copies.
Elle m'a demandée si j'allais bien.
Elle m'a dit avoir remarquée que je suçais mon pouce en classe. Elle m'a fait remarquer que d'ailleurs je ne faisais rien pour le cacher.
Elle m'a adressé un clin d'œil, un sourire et a ajouté : "Tu es touchante Anaïs. J'ai vraiment envie de t'aider. "

J'ai eu les larmes aux yeux. Elle m'a prise dans ses bras et m'a dit : "Tu peux y aller sinon tu vas être en retard."

J'ai vraiment été très surprise le jour où j'ai reçu sa carte postale.
Elle m'envoyait un bonjour de Bretagne et espérait sincèrement que je passais de bonne vacances.

Au lycée, en seconde j'ai eu un professeur très froid, très autoritaire. Qui, dès le premier jour, avait crié très fort car un élève avait demandé s'il pouvait ralentir un peu. "Quoi?? Mais vous ne manquez pas d'air. Vous croyez que c'est moi qui vais ralentir?? Mais non c'est VOUS qui allez apprendre à me suivre Monsieur ! " . Le vous s'adressait à l'ensemble de la classe. Après ça il parlait encore plus vite. Et il n'a jamais cessé d'être dur et de parler aussi vite de toute l'année.

Il était le chef et il parlait. Nous nous sentions ses esclaves et nous copions, copions, copions.
Il n'y avait pas beaucoup d'interactions dans son cours.

J'ai été tellement surprise à la fin de l'année lorsqu' il m'a interpellée: " j'ai appris que vous avez demandé une réorientation. Je voulais juste vous dire que je suis certain que vous allez faire de belles choses dans votre vie. Vous en avez toutes les capacités. Je vous souhaite beaucoup de réussite et de bonheur."
Je n'ai pas su répondre.
Je n'ai pas dis un mot.
Ni même merci.
J'avais mal dans ma gorge.
Je ne comprenais pas pourquoi.

Pourquoi ces mots, pourquoi moi.

J'étais très moyenne, je faisais pleins de fautes d'orthographe, et puis je redoublais.
Je quittais un lycée prestigieux (que l'on m'avait attribué d'office faute de place dans tous les autres lycées de la ville.) pour un lycée professionnel.
Je passais d'une seconde générale à un BEP.

Pourquoi m'avait-il dit cela: je n'en savais rien et je n'ai toujours pas compris.
Mais, ce que je sais, c'est que j'ai toujours lié des bons liens avec mes professeurs.

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Merci d'être arrivés jusqu'ici !
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