08. LES ÉLECTIONS

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– Depuis la vidéo tout se retourne contre moi ! 

Iris fulminait de rage et Jesse tentait de la calmer. Mais la jeune femme – qui le menaçait avec le bout de son sandwich à la dinde – n'en avait pas fini de cracher son venin. À l'autre bout de la table Chloé avait le regard plongé dans un livre de science, Wesley jouait avec les miettes de son repas. Seul Elliot, Mara, Jules et Jesse semblaient un minimum attentifs. 

– Il me faut un plan d'attaque ! Les élections, c'est dans une semaine. Les affiches d'Holly ont été vandalisées et tous le monde me crache dessus ! Les gens pensent que c'est moi ! Moi ! Je n'aurais jamais dessiné sur la tronche de cette pouffiasse la moustache d'Hitl... 

– On a compris. On a compris. Ce n'est pas toi. 

– Bah non ! Oh et puis, regardez... 

Jesse la regarda farfouiller dans son sac quelques secondes avant qu'elle n'en ressorte un bout de papier qu'il ne connaissait que trop bien.

– Tu'as gardé ton mot ? 

– Attends. 

Elle en extirpa un deuxième de son sac à main et le déplia à côté de premier. Même taille de papier, même police, même taille de caractère.

– J'ai reçu ça. Ce matin. Lisez, lisez donc ! 

Jesse se pencha vers le nouveau papier et fronça les sourcils. PAS DE MEURTRIÈRE COMME CONSEILLÈRE. Un frisson lui parcourut l'échine. Au bout de la table Wesley marmonna un truc comme "ça rime" et se mangea un regard assassin de la part de Jules avant de finir de boire son soda. 

–  Ça va trop loin. Bordel mais je l'ai pas buté cette fille ! 

Elliot baissa les yeux aussitôt imité par Jesse. Il devait se sentir aussi mal que lui. Pour leur amie tout d'abord, et pour le mot. Lui n'avait plus rien reçus depuis le premier mot. Et voilà que tout refaisait surface avec Iris. Pourquoi elle ?

– Bon vous savez quoi ? J'en ai marre, je sèche et je rentre chez moi. 

– Non attend, Iris ! 

Mara lui tendit le bras mais elle l'ignora et se leva, laissant en plan son repas. 

– Je m'en charge... 

Jesse se leva à son tour, remballant ses affaires à la vitesse de la lumière et courut rejoindre son amie qui avait déjà filé sur le parking du lycée.

–  Je suis avec toi Iris. On est tous avec toi. On va trouver le con qui fait ça et... 

–  Et quoi, hein ? Ce mec m'accuse d'avoir tué Kaya ! C'est... insensé. On la connaissait même pas ! 

–  Ça, c'est ce qu'on se répète tous putain... Mais on la connaissait ! 

–  Non. Écoute, la dernière fois que tu m'as vu lui parler, c'est la dernière fois où je l'ai vu, pigé ? Tu'n'as quand même pas oublié que c'est à cause de toi qu'on s'est disputé, hein ? Si j'ai fais ça, si je lui ai dit tout ça, c'est à cause de toi. Pour toi. Parce qu'on est amis. Et je ne l'ai plus revu après ça. Tu vas pas me lâcher maintenant, hein Jesse ? 

–  N-Non..., bafouilla-t-il.

Ok, là, il avait perdu tous ces moyens. Les yeux de sa camarade lui lançaient des éclairs et Iris avait l'air plus menaçante que jamais. Il avait horreur de la voir dans cet état. Elle était comme sa sœur, une fois mise en rogne, elle était inarrêtable et terrifiante. Mal à l'aise il la regarda s'éloigner sans rien rajouter de plus. Au fond de lui il espérait que le service qu'Iris lui avait rendu il y a quelques mois plus tôt étaient restés confidentiels, entre eux et rien de plus. Mais il en doutait fortement. 


La semaine qui suivit fut un enfer pour Iris et Jesse ne put rien y faire, tout comme le reste de ses amis. Il ignorait qui était la personne qui propageait des rumeurs idiotes et méchantes sur son amie, mais il avait quelques petits soupçons : pour Jesse, c'était la même et unique personne qui leur déposait les mots dans les casiers. Et enfin arriva le jour des élections. La fierté d'Iris semblait avoir disparu ce jour-là, mais elle monta tout de même sur scène au moment des dépouillements. Mais la gagne qu'il y avait autrefois dans ces yeux semblait avoir disparu. Holly l'emporta. Mais de peu, ce qui en étonna plus d'un. 

–  Ton score n'était pas si mauvais Iris... 

–  J'aurais pu gagner, s'il n'y avait pas eu la vidéo, ces histoires d'affiches et puis... Merde tient. 

Avec Mara ils étaient dans leur bar-restaurant favoris, non loin du parc aux pirates. Mara dégustait ses pancakes à peine cuits comme elle les aimait tant et Jesse s'était contenté d'une limonade comme Iris. 

–  Vous savez quoi ? J'ai qu'une envie, c'est de revivre la semaine de vacances qu'on a passée tous ensemble à la plage. C'était génial. Et il n'y avait pas encore toutes ces merdes qui n'ont de cesse de nous tomber dessus. C'était cool. Je donnerais tout pour revivre encore cette semaine-là. 

Et bien pas lui. S'il avait donné l'impression du contraire, Jesse n'en gardait que des souvenirs fades. 

* * *

Juillet 2017, début des vacances scolaires d'été.

Le week-end touchait à sa fin. Avec Mara et toute la bande il avait décidé de passer à la plage trois semaines pour fuir la chaleur étouffante de Jich Hills. Assis en tailleurs sur son lit Wesley faisait l'inventaire de son sac tandis que Jesse s'occupait de ranger les dernières affaires. 

– Tu as tout pris ?  

–  Ouais je crois que c'est bon... 

Wesley se laissa tomber sur son lit en soupirant.

 –  La flemme de faire la route. Il fait trop chaud. 

Jesse rigola, ce n'était pas lui qui allait conduire, c'était plutôt à Iris ou Jules de se plaindre. Son portable vibra et Jesse l'attrapa maladroitement. Encore elle. Cassie. Qu'est-ce qu'elle ne comprenait pas « je ne veux plus te parler » ? Sortir avec cette fille avait sans doute été la pire de ces erreurs, il l'avait regretté dès le moment où elle l'avait plaqué comme une vieille chaussette pour un autre gars rencontré à la plage. Franchement. Wesley s'était penché par-dessus son épaule avant de se saisir de son portable et de pianoter dessus à toute allure. 

– Hé ! Qu'est-ce que tu fous ? 

–  Je réponds, alors...... "Moi chui pas chaud par contre mon pote Wesley lui il l'est carrément !" envoyé ! 

–  Putain ! 

Il lui arracha le portable des mains, se vautrant à moitié sur son ami mort de rire. Ce n'était pas drôle. Elle allait le prendre au mot. Et au fond, cela ne l'étonnerait pas plus que Wesley trouve ça tentant. 

– Oh ça va, c'était pour blaguer ! 

– Bah c'pas drôle. 

– Tu es coincé. 

– Je ne suis pas coincé je suis juste... 

Wesley lui donna une tape sur la tête, attrapa son sac et lui lança qu'il l'attendrait en bas. C'est moi ou il vient de me mettre le vent du siècle ? C'était frustrant. Il tenta de rattraper le coup en envoyant un énième message à Cassie. « Oublie mon précédent message, Wesley s'est amusé tout seul. » Bon sang ce que ça pouvait le mettre hors de lui. Cassie, il n'en avait plus rien à faire depuis longtemps. Pourquoi était-il aveugle à ce point ? 

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