10. WARREN

147 26 9
                                    

Mara Miller patientait dans un café, pas très loin de son établissement scolaire. Elle sifflotait presque, ravie du coup qu'elle venait de monter. Ravie que Warren l'ait suivi bêtement, se voulant discret au passage, parce qu'il avait compris qu'elle avait quelque chose à lui. Maintenant, elle n'avait plus qu'à attendre. Que le garçon encore dans la rue, qui faisait les cent pas, prenne son courage à deux mains et l'affronte, elle, la tornade Miller. C'était le surnom que lui donnaient les élèves de sa classe depuis le début du cycle. Elle avait posé son portable sur la table, bien en évidence et se risqua à regarda à nouveau par la fenêtre du café. Leurs regards se croisèrent et celui de Warren se noircit pendant quelques secondes. Finalement, il entra, sans doute agacé de devoir attendre que Mara se lève et ne lui rende son téléphone portable. Rapidement il se dirigea vers sa table et fondit sur son précieux sésame.

–  Pas si vite... 

Mara aussi était rapide, et vive d'esprit. Elle avait posé sa main sur la sienne, lui intimant de s'asseoir en face d'elle. Juste pour quelques minutes, le temps de discuter. 

–  Je t'ai rendu ton portable. Maintenant, tu me dois des explications. 

–  Tu me m'avais volé, n'y a rien de juste là-dedans... 

– On s'en fou de ce qui est juste. Mettre des mots dans des casiers à la place de quelqu'un qui n'a pas assez de courage pour le faire, c'est quoi ? 

Il leva ses yeux couleur praline au ciel. 

–  Bon, tu veux quoi ?

–  Un nom. 

 –  Je sais pas qui c'est... 

– Tu sais au moins si c'est un garçon ou une fille, non ? 

 – Non. 

–  Pardon ? 

–  Non, je n'en sais rien. Écoute, j'ai reçu un texto un jour. Vingt dollars pour déposer des mots. Je trouvais les mots dans une planque, dans votre lycée et voilà. 

– Et... ? Tu ne t'es pas posé de questions ?

–  Franchement ? Non. Des querelles de lycéens, c'est tellement banal. Pour vingt dollars, je pouvais le faire. Et tout allait très bien jusqu'à que vous m'interceptiez.

Mara fronça un peu plus les sourcils. Cette histoire avait de moins en moins de sens. Quelqu'un envoyait Warren déposer ces mots. Elle le regarda pianoter sur son portable. 

– Et là, j'ai plus de nouvelles. À mon avis, qui qu'il soit, je crois qu'il a compris qu'avec moi, c'était grillé. Merci hein... 

– Bon heu... écoute, Warren... 

–  J'peux y aller ? Si j'ai accepté de te parler, c'est parce que je sais qu'il ou elle ne m'aurait pas à l'œil aujourd'hui. 

Elle se relâcha sur sa chaise et lâcha un soupiré avant de lui faire signe d'y aller. Elle le regarda s'éloigner sans rien dire, les yeux rivés sur son café, maintenant totalement refroidis. Elle espérait qu'il fouillerait ses poches de veste ce soir et qu'il y trouve son numéro. À quoi tu joues Mara... Elle-même n savait trop rien, mais elle avait le pressentiment que Warren pouvait toujours lui être utile pour mettre fin à cette blague. Pour elle il était hors de question que son lien avec Kaya éclate au grand jour. Il y avait des choses qu'elle voulait à tout prix garder pour elle. 

Ce soir-là Mara s'était retrouvée devant le poste de télévision avec son jumeau. Elle ne savait même pas pourquoi ils restaient sur la chaîne des informations. C'était toujours la même chose. Mais ce soir, il y avait du nouveau dans l'histoire. Et elle sentait son cœur se serrer au fur et à mesure que les journalistes, toujours avides du moindre détail sordide, poursuivaient leurs histoires et y allait de leurs petites investigations. On apprend à l'instant que le père de Kaya avait un alibi fiable le soir où sa fille a été tué. Il était en effet en rendez-vous avec le notaire, monsieur Ackerman, à son domicile. Si ce détail n'avait pas été confirmé plus tôt par les forces de l'ordre, c'est que monsieur Ackerman était hospitalisé depuis plus d'un mois après une grave chute de tension et des crises épileptiques graves. À présent la version des faits de monsieur Benneth se retrouve confirmée et nous sommes en mesure de vous ann... 

– Une nouvelle impasse..., murmura Jesse, les yeux rivés sur l'écran.

–  J'vais me couche, ça me gonfle cette histoire..., répondit-elle.

Son frère lui jeta un regarda surpris mais Mara ne tint pas compte de sa remarque et fila à l'étage avant de se glisser sous sa couette. Elle attrapa son portable, avec l'espoir de voir arriver dans la soirée un message de Warren. C'est idiot Mara. Ce mec tu lui as fait peur, tu'es passé pour une furie tout à l'heure... Et même lors de votre rencontre... Pourtant elle ne lâcha pas son écran des yeux pendant plus d'une heure. Et ce fut finalement quand elle se décida à fermer les yeux qu'il vibra, lui annonçant l'arrivée soudaine d'un message. « Tu es douée, je t'avais pas vu me glisser ce papier dans la poche. Tu'étais pickpocket dans une autre vie ? » Sans trop savoir pourquoi un petit sourire émergea sur son visage d'ordinaire si sévère. « Peut-être... ;) » « Mara, c'est ça ? Est-ce que je peux considérer que tu ne veux pas me botter les fesses ? » « On va dire ça comme ça, on va dire ça comme ça... » « Tu m'intrigues Mara Miller. » « Pas autant moi envers la personne pour qui tu distribues des mots. » Fin de la discussion. Ce soir-là, Warren ne répondit plus et Mara se sentit vexée. 

Juillet 2017, début des vacances scolaires d'été.

Mara entendit son frère hurler après Wesley et ce dernier ne tarda pas à faire son apparition, son habitue à sourire moqueur aux lèvres. 

–  Qu'est-ce que tu lui as encore fait ? 

– J'ai piqué son ex. 

Il éclata de rire, et Mara leva les yeux au ciel. Ils étaient fin prêts pour prendre la route, quitter la ville pendant quelque temps pour des vacances bien mérité. 

–  Il nous manque qui ? 

–  Mmh, Kaya n'est pas encore arrivée. Elle ne devrait plus tarder. 

L'inviter avait été l'idée de Chloé-J'ai-Un-Trop-Gros-Coeur. Franchement, ça barbait plus Mara qu'autre chose. Pour plusieurs raisons, Kaya était trop lisse, trop parfaite. Alors oui, elle pouvait lui trouver autant de défaut que de puce sur un rat. Mais c'était uniquement parce qu'elle pouvait être très mauvaise langue. Et en plus, elle passait son temps à relooker son frère ce qui lui plaisait encore moins. Jesse descendit avec ses bagages et ils chargèrent le tout dans la voiture. Et ce fut là qu'elle arriva, dans une robe jaune canari qui lui allait comme un gant, une paire de sandales couleur ocre aux pieds. Ses cheveux jais étaient lâchés et lui descendaient jusqu'aux épaules. Évidemment elle nota le regard de Jesse qui s'attarda quelques secondes sur la sublime apparition avant de se détourner vers la voiture et le coffre bien remplis. Chloé l'accueillis à coup de bisous et de bonnes paroles et Mara la salua rapidement de la main avant de monter à l'avant. Oh, que le voyage allait être long... 


* * *

Wow. La rentrée m'a totalement aspiré ! Enfin bref, me revoilà pour un nouveau chapitre, cette fois-ci sous le point de vue de Mara (j'avais très envie d'écrire au moins une fois avec elle, j'avoue...) et j'espère qu'il vous plaira ! ♥

SEVENOù les histoires vivent. Découvrez maintenant