15. LE POÈME

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Il hésita quelques instants à brûler le poème et la photo. À n'en faire qu'un petit tas de cendre qui ne pourrait plus l'atteindre, lui et ses souvenirs douloureux. Mais il n'en eut pas la force. Il la fixait, encore et encore, et soudain, il flanqua un grand coup de pied dans son armoire, éclatant tous ses orteils au passage. Il poussa un cri de douleur, frappa du poing sur le mur et envoya tout valser. Tout. Les fringues, les petites babioles sans importance qu'il entassait sur son bureau, ses oreillers... Il flanqua la photo et son poème maudit au fond d'un tiroir qu'il referma sans douceur avec un coup de pied et se laissa tomber sur son lit, le cœur battant, le souffle court comme s'il venait de courir un marathon. Alors c'était ça, hein ? Ou voulait-elle juste jouer avec ses nerfs ? Mais bon sang, dans quel but ? Il ne comprenait toujours pas. 

Son portable vibra quelque part dans sa chambre et Jesse se redressa mollement de son lit pour le chercher des yeux. Finalement il se laissa retomber dans ces draps. Tant pis, qui que ce soit, il attendrait. Il voulait juste être seul, ne plus penser à rien et... Dormir peut-être. Dormir et rêver, ne plus penser à son quotidien qui était devenu trop pesant. Et pourquoi pas... Clac. Clac. Il se redressa d'un coup en entendant ce drôle de son. Clac. Encore. Il leva les yeux au ciel, la fenêtre quelqu'un jetait des cailloux sur sa fenêtre comme un gamin de treize ans. Et il ne connaissait qu'une personne qui faisait ce genre de chose.

– Bah alors ! Jesse ! 

En bas de chez lui, Wesley agitait les bras. Rooh c'est pas vrai. Il referma sa fenêtre et descendit à la va-vite ouvrir la porte d'entrée. 

–  Tu réponds plus à tes messages ?  

–  Tu m'en as envoyé un il y a genre... Une minute. Laisse-moi le temps de répondre bon sang ! 

Wesley haussa des épaules et s'engouffra dans la maison. Mais je t'en prie, fais comme chez toi... Comme s'il était chez lui, Wesley grimpa les escaliers. 

–  Hé...  

–  Wouah, il s'est passé quoi ici ? 

Il venait de mettre les pieds dans sa chambre et se retourna vers lui, avec ce regard un peu trop malicieux qu'il avait si souvent. 

–  Rien du tout.  

–  S'tu veux rien me dire alors... Tient, ton portable, il est là. 

Wesley tapota du bout du pied son portable qui avait échoué sous un tas de fringues et Jesse le ramassa d'un geste rageur. 

– Tu veux quoi ?, demanda t-il sèchement.

– Tu n'as pas lu mon message, hein ? 

– Bah de toute évidence, non. 

La mine de son ami se renfrogna quelques secondes mais Jesse n'en tint pas compte. Où était-il lui, de toute façon, quand il lui passait des coups de fil important il y a quelques semaines ? Il le regarda tirer la chaise de sous son bureau et s'asseoir tranquillement. Toujours planté au milieu de sa chambre en bazar, Jesse croisa les bras et planta son regard dans le sien. Il voulait quoi ? Venir lui proposer d'aller faire la fête quelque part ? Ou lui faire un pseudo moral à deux-balles comme quoi inquiéter pour ces mots était vraiment débile ? Parce que oui, il le savait, Wesley s'en foutait de tout ça. Ou alors, il jouait vraiment bien la comédie. 

–  Je suis venu en ami Jesse... 

– Parce qu'on ne l'était plus ?

Wesley leva les yeux au ciel. Bah vas-y, dis-le. Dis-le que tu ne me vois plus comme un ami depuis cet été. De toute façon tu m'as déjà mis plus bas que terre, je ne vois pas comment ça pourrait être pire, songea-t-il. 

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