Chapitre 21

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Menace



Alors que je viens de promettre – à Mark ainsi qu'à moi-même – de devenir quelqu'un de bien, Mark me tapote le dos gentiment, recule, me jette un regard qui en dit plus que n'importe quelles paroles et sort de ma chambre en fermant la porte derrière lui. Je m'approche de mon lit et y reste assis pendant plusieurs dizaines de minutes, les yeux dans le vide, l'esprit tantôt vide, tantôt plein.

Il s'est passé tant de choses ces derniers jours... Depuis l'anniversaire de la mort d'Alison et ses filles. Mark et moi avons décidé d'en faire un nouveau départ. Oui, mais pourquoi ? Quel avenir me reste-t-il ? N'aurais-je jamais l'opportunité d'être un citoyen lambda ?

J'ai avoué à Mark que je le considérais comme mon propre père. Et il m'a dit qu'il tenait à moi. Cinq ans que je le connais. Depuis combien de temps a-t-il ces sentiments pour moi ? Combien de disputes et de remords aurions-pu nous éviter s'il me l'avait avoué avant ?

Et moi, depuis quand vois-je en lui cette figure paternelle, que je respecte et qui me rassure ? Peut-être cela a-t-il commencé dès que je suis venu vivre chez lui... et combien de disputes aurais-je moi aussi éviter si je le lui avais dit ?


Le lendemain arrive vite. Le repas de mercredi soir s'est fait dans un silence gêné. Les « merci », « c'est bon », « passe-moi le sel, s'il te plaît » ont été les seuls mots que Mark et moi avons prononcés. J'étais censé aller m'excuser auprès des parents d'Anthony et auprès de Lily Rose l'après-midi, mais les événements ont fait que tout cela a été repoussé. J'ai demandé à Mark de dire à Anthony et sa famille que je viendrai le voir à l'hôpital le lendemain, jeudi 12 février, pour m'excuser. Je dois assumer les conséquences de mes actes.


Nous nous rendons à l'hôpital de Lake Town – là où j'ai été hospitalisé après l'accident et le lieu où travaillait Alison Grace. On nous indique la chambre 326 comme étant celle d'Anthony Greenlight. Mark a acheté des fleurs le matin et déjà certains pétales ont commencé à faner en cette fin d'après-midi.

Lorsqu'on arrive au niveau de la chambre, une boule d'angoisse se coince dans ma gorge. Anxieux, je donne quatre coups secs contre la porte. Une voix féminine me répond :

– Entrez !

Après avoir jeté un coup d'œil à Mark, qui me soutient d'un hochement de tête discret, j'ouvre la porte et m'avance dans la chambre. Deux adultes quarantenaires sont installés sur des chaises en plastique, les yeux cernés, une main tendue entre eux pour se soutenir mutuellement. Mr et Mme Greenlight. Le premier, châtain comme son fils avec des yeux bleus, porte un polo de marque et un pantalon en coton. Il m'observe avec curiosité. La deuxième, les cheveux blonds coupés courts et les yeux noisette comme ceux d'Anthony, me dévisage sans masquer son mépris. Ce dernier est alité en blouse d'hôpital dans un lit entouré de diverses machines médicales, rehaussé par de gros coussins. Ses cheveux sont coiffés en arrière et ses yeux posés sur moi me font frissonner. L'un est au beurre noir, mais les deux me fixent avec dégoût, haine et animosité. Il a un pansement sur le nez, qu'ils ont dû opérer pour remettre l'arête nasale en place, une minerve autour du cou et de petits points de suture sur la joue gauche.

– Bonsoir, lance soudain Mark derrière moi alors que l'ambiance menace de devenir orageuse. Mr et Mme Greenlight (il tend la main vers l'homme et le bouquet de fleurs vers la femme) Mark Grace, le père de Zach.

– Bonsoir, Mr Grace, répond le père d'Anthony en se levant pour le saluer. Merci d'avoir fait le déplacement.

– Ce n'est rien ! Au contraire, Zach devait nécessairement s'excuser après ce qu'il a fait à votre fils.

The Debt [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant