Chapitre 8

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Vivre ou mourir



Le froid me fait claquer des dents sur le chemin du retour. Ma main qui porte le sac de course est gelée. Même mes genoux tremblotent. Lorsqu'un vertige me fait chanceler sur quelques mètres, je finis par me demander si c'est seulement le froid qui en est la cause.

J'ai l'impression d'avoir fait un marathon quand je passe enfin le petit portail de la maison. En suivant le chemin de pierre qui mène jusqu'à l'entrée, je ne peux m'empêcher de fixer la porte. Une angoisse aiguë me saisit à l'idée d'affronter Mark.

Les courses sont vite rangées dans le réfrigérateur et les placards. Je suis en train de jeter le sac en plastique dans la poubelle quand la voix de Mark s'élève derrière moi :

– Il restait de l'argent en plus ?

– Euh, quelques cents, pas plus, je réponds en me redressant.

– Tu peux les garder.

Il tourne les talons et retourne dans son bureau. Un soupir franchit mes lèvres. Il croit vraiment que je vais m'encombrer de petites pièces ? Des vrais billets, ça me ferait plus plaisir.

– Oh, Zach ? reprend Mark de son bureau.

– Oui ? fais-je en m'arrêtant à l'embrasure de ce dernier.

L'ancienne salle à manger est devenue une petite pièce seulement meublée d'énormes bibliothèques – dont la plupart sont remplies de bouquins sur le droit – d'un sofa en cuir marron accompagné d'un guéridon muni d'une lampe à pied vieillotte, et du bureau massif de Mark en je-ne-sais-quel bois, mais qui rend bien avec le large siège qui l'accompagne.

Mark est appuyé contre son bureau, le visage fermé. Des copies d'élèves pas encore corrigées traînent sur le meuble. C'est sa tanière ici ; j'y rentre rarement.

– Je pense que, comme moi, tu n'es pas de meilleure humeur que ce matin.

En effet, pensé-je en serrant les mâchoires. Je me sens beaucoup moins bien, même. Je garde ces réflexions pour moi et hoche la tête.

– Ce qui s'est passé entre Anthony, Maximilian et toi... J'aimerais que ça ne se reproduise plus à l'avenir.

– Oui, Mark.

– Comme convenu, tu réviseras tes cours, iras rentrer du bois et tu te coucheras tôt. J'aimerais aussi que tu passes la serpillère dans la cuisine et que tu nettoies la salle de bains et les toilettes.

Mark s'est tourné dos à moi et il m'annonce ceci d'un ton badin, comme s'il me disait d'aller me brosser les dents. Pour contenir la colère qui monte en moi, je serre les poings. J'ai de plus en plus l'impression d'être un chien pour lui, rien d'autre.

– T'attends que ça, hein ? lancé-je d'un ton cassant.

– De quoi ? demande Mark en se retournant, sourcils froncés.

– Que je me casse d'ici. Que je foute le camp. Que tu n'aies plus à me supporter !

Ses yeux deviennent sombres et brillants comme des obsidiennes. Les muscles de ses épaules se contractent ; je peux le voir à travers le tissu de sa chemise, ce qui me rassure peu.

– On peut savoir ce qui t'arrive, aujourd'hui ? grommelle-t-il d'une voix dure.

– Rien de spécial, rétorqué-je en le fusillant du regard. Mais tu... tu m'as giflé deux fois ce matin, juste parce que t'en avais envie ! (Mark ouvre la bouche pour répliquer, mais je ne lui en laisse pas le temps.) Tu m'interdis de me divertir, tu me tues à la tâche... Je ne suis rien de plus qu'un chien pour toi !

The Debt [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant