Chapitre 3 - Écran de Diamants

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En média : Ludovico Einaudi - Experience

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LUDOVIC

Trois mois après l'accident.

Deux mois depuis mon arrivée à Colombe, le centre de rééducation.

Ce soir-là n'est pas un soir ordinaire. Ce soir-là n'est pas ce genre de soir ordinaire à Colombe, où la lumière des néons disparaît en attendant d'être ravivée par celle du jour. Ce soir-là est très spécial. Genre TRES spécial. TRES TRES SPECIAL. En fait, ce soir-là, c'est le soir où je vais me faire kidnapper.

— Essayez par tous les moyens d'faire tomber quelqu'chose à vos pieds pour qu'la p'tite minette en stage s'penche et vous dévoile ses beaux lolos ! murmure Jaques, un paraplégique d'une quarantaine d'année, à notre table du réfectoire.

— C'est facile pour toi, crache Bruce, paraplégique incomplet, en jetant un regard dans ma direction.

— Je vous donne des astuces pour mater, les gars ! Moi, je rêverai de toucher cette paire de nibards...

— Mais ça ne sert à rien ! le coupé-je, saoulé. On est même plus capable de bander, Jaques ! Qu'est-ce que t'en a à foutre de voir le décolleté de cette fille ?

Ma remarque cinglante ne l'a pas empêché de continuer à faire le con. Bruce, l'air légèrement triste, me regarde avec de la pitié. Même ici, ça n'empêche pas les regards de fuser.

— Vous les paraplégiques, vous êtes vraiment trop cons, craché-je.

Une infirmière passe, je l'interpelle, et elle va me coucher à ma demande.

Ce soir, je vais me faire kidnapper. Comment je le sais ? C'est celui que ma mère et moi avons choisi pour notre petite escapade nocturne, notre « kidnapping ». Après deux mois de Centre, les activités sont : rééducation, socialisation avec les beaufs de l'endroit, et ballade dans les jardins moroses. Trois choses absolument ignobles et qui s'enchaînent. Je commence à les connaître par cœur, ces jardins de ballades, et ma mère aussi. Que ce soit clair, ils nous SORTENT par les yeux, par le nez, ainsi que par tous les orifices de notre corps. Chaque jour, j'y déambule, poussé par ma mère ou par un substitue, dans ces jardins fanés, morts, inintéressants dans leur majorité, sauf la petite fontaine en marbre, qui ne marche pas, mais qui représente une sorte d'Hercule merdique, low-cost, dévisagé par le malheur de l'endroit. Impossible d'aller autre part que dans cet extérieur miteux. Impossible de se sortir Colombe de la tête. Impossible d'avoir la possibilité de s'évader.

« Impossible » ? Bof.

Sachant que le couvre-feu de Colombe sonne aux alentours de 21h00, personne ne peut sortir après cette heure-là. Sauf si vous êtes pote avec le personnel, dans ce cas-là, vous êtes le roi du monde. Hélas, je ne peux pas dire que beaucoup de gens du service m'aiment ici. Alors j'ai dû me débrouiller seul car je ne pouvais ni compter sur le personnel pour faire une entorse à la règle, ni sur les potes du secteur pour me couvrir. Vous avez pu voir ce que je me coltine à table, alors comment voulez-vous mettre en place un plan évasion avec un pervers et un idiot ? Dans ce monde, on ne peut compter que sur soi-même ... et sur sa mère, aussi.

NOS CORPS AMBULANTS [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant