Book of regrets

Le début de la fin

C'était une journée normale qui s'annonçait . Une enquête normale. Une routine normale. Qui aurait cru que tout ceci allait être les prémices de ma chute?

Il s'ennuyait. Un curieux sentiment de lassitude étreignait son âme depuis quelques mois. Il avait l'impression de stagner. Pire encore, de reculer. Et rien, ni la douce chaleur qui lui réchauffait tendrement la nuque, ni la relative fraîcheur ambiante de son bureau qui lui permettait de ne pas suffoquer, ne lui assurait du réconfort. Bien sur, dénicher des informations sur un assassin n'était pas facile de base. Il le savait. Mais comment pouvait-il expliquer ce manque? Cette envie de changement ? La quiétude du quotidien, la douce routine qui se répétait inlassablement, les jours qui s'enchaînaient et se ressemblaient... Ce n'était pas pour lui. Le commun des mortels pouvait bien se contenter de cela. Mais pas le comte Phantomhive.

Ciel lança un regard circulaire autour de lui, sortant enfin de ses pensées morbides, et soupira. La paperasse étalée sur son bureau de bois massif ne l'inspirait guère, et le léger tic-tac de l'horloge comtoise l'agaçait au plus haut point. Il avait besoin de bouger. Le jeune homme n'en pouvait plus de cette atmosphère studieuse : ces piles de livres, maladroitement placées sur l'étagère de sa bibliothèque, qui manquaient de tomber sur le plancher, et ce silence oppressant, qui accompagnait chacune de ses journées. Depuis son voyage en Allemagne, il n'avait plus aucune affaire à traiter. De ce fait, aucun indice pour sa vengeance. Au début, il était satisfait de cette situation : il allait pouvoir prendre son temps, et se reposer après la mission compliquée que lui avait donnée la reine. Mais tout ce calme, toute cette détente... Ciel n'en avait décidément plus besoin.

« Quelque chose. N'importe quoi... ! Une enquête, c'est tout ! Un meurtre inexpliqué, des enlèvements d'enfants, un pays étranger qui se dote d'armes de guerre... Peu importe, mais vite! » Le jeune comte ne mesurait même pas l'étendu de ses mots. Pour lui, personne n'allait pouvoir le sortir de effroyable ennui : ce n'était qu'une vague prière dénuée de sens. Alors, qu'elle ne fut pas sa surprise lorsque, après quelques coups donnés à la porte, son fidèle majordome entra dans la pièce, une missive à la main. Et pas n'importe quelle missive !

_ Le blason royal ! s'exclama Ciel, tandis qu'il arracha violemment la lettre des mains de son serviteur. Une enquête, après tout ce temps ! Tu viens de la recevoir?

_En effet, jeune maître, répondit Sebastian en s'inclinant légèrement, tout en affichant un petit sourire, ce même sourire qui déplaisait tant à Ciel. Je savais que vous seriez impatient d'en explorer le contenu, sitôt l'aurai-je reçue. Il faut dire que vous n'étiez pas très vivace, ces derniers temps.

Ciel fronça les sourcils et ouvrit soigneusement l'enveloppe, malgré la légère impatience dont il faisait preuve. Il en sortit une délicate lettre dentelée sur les bords dont l'odeur de rose si particulière enivrait déjà toute la pièce. Les mots, inscrits à l'encre bleutée, brillaient sous les timides rayons de soleil qui filtraient à travers la fenêtre.

«Mon Cher petit,

Depuis peu, de nombreuses personnes disparaissent sans laisser de traces au sein de notre beau pays. Scotland Yard a répertorié une vingtaine d'enlèvements déjà. Il s'agit de dix jeunes femmes et presque autant d'hommes. Quelques enfants aussi, semblerait-il. Les circonstances sont toujours les mêmes : du sang dans les ruelles de Londres, et aucun témoin ne peut renseigner nos hommes sur cette affaire. Les enquêteurs n'arrivent guère à comprendre le lien entre ces victimes et de ce fait, l'enquête piétine. C'est pour cela que je m'adresse à toi, cher Comte Phantomhive. Je compte sur tes talents de détective et je souhaite que tu puisses résoudre cette investigation. Pour plus d'informations, il te serait préférable d'aller consulter les officiers de police... Tu y es autorisé, bien entendu. Ces disparitions m'inquiètent horriblement, tu dois à tout prix mettre fin aux agissements de ce kidnappeur. Que Dieu te protège »