Promesse d'un temps ancien (Partie 2)

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La semaine qui suivie se passa dans une morosité horripilante. Le père de Maria l'avait contraint à reprendre son travail, prétextant avoir été assez laxiste avec elle depuis plus d'un mois. Toutefois, cela permis au père et à sa fille de reprendre un contact si injustement réduit, depuis la mort d'Aela.

_Maria, lui dit Gabriel en camouflant ses cheveux roux coupés court contre son épaule. Depuis quelques temps, je te vois beaucoup plus souriante, tu es enthousiaste, tu me parles beaucoup plus et, à nouveau, le son de ta harpe emplit notre maison si vide... Parfois, je t'entends rire et j'attends devant la porte, incapable de couper court à tes moments de bonheur. Pourtant, quand je rentre, tu n'en déchantes pas et ta bonne humeur m'est entièrement contagieuse... Je suis si rassuré que tu te sentes mieux, ma tendre enfant... Toi, d'habitude si posée, si studieuse, tu t'es mis à apprendre à danser, à chanter de bon cœur, et tu n'imagines pas à quel point cela me satisfait... Je ne t'entendais plus beaucoup rire depuis la mort de ta mère. Je m'en veux tellement, je n'ai pas su...

Maria lui sourit tristement et le serra contre elle, se voulant réconfortante.

_Tu as su, papa. Je n'avais pas besoin des autres ou du moins, je refusais leur aide. J-Je ne peux pas encore tout à fait te dire ce pourquoi je suis si... désinvolte, en ce moment, mais le jour viendra où... tu sauras. J'espère que tu réussiras à l'accepter... (Elle rougit puis se reprit, confiante:) nous allons rester ensemble toute cette semaine, je te le promets. Si tu veux, nous pourrons même aller au grand opéra ensemble, j'en serais si heureuse... Cela faisait tellement longtemps. Cependant, je reprendrai l'étude des plantes. Mon rêve est resté intact, ou mieux encore, il s'est embellit.

Gabriel lui prit ses mains, un sourire sincère aux lèvres.

_J'ai hâte que tu me le présentes, dans ce cas.

_M-Mais, je n'ai jamais dit que....

De son côté, Sebastian s'entraînait ardemment aux vols et aux manipulations scrupuleuses. Le cambriolage prévu était quelconque, il se fichait bien des propriétaires. Du moins, il essayait de s'en convaincre. Où était passée son habituelle indifférence ? Son détachement ? Tandis qu'il s'entraînait à manier son fidèle pistolet, pourquoi n'arrivait-il pas à se convaincre qu'il n'avait pas le choix, qu'il devait faire cela pour les autres ? Bien souvent, il avait songé à quitter l'auberge, à fuir tous ces enfants qu'il n'arrivait plus à protéger. Nombreux sont morts devant ses yeux, incapable de faire quoique ce soit pour eux. Après tout, lorsqu'un vol tournait mal et qu'il arrivait à s'échapper, il ne devait pas se retourner, telle était la loi de la rue. Quand il les voyait, par la suite, lapidés en place public ou pire encore, de quel droit pouvait-il agir ? Son acte n'aurait servi à rien, de toute manière, il aurait été tué également. Mais c'était lui, lui et lui seul, qui les avait conviés à cette pratique. C'était soit cela, soit mourir. Toutefois, à quoi bon se débattre lorsque tout le monde semble se liguer contre vous pour vous faire couler jusqu'au fond de l'abysse ? Il se sentait redevable envers tous ces enfants qu'il envoyait à la mort. C'était lui qui les choisissait, qui les éduquait à se défendre, à tuer. Une armée d'enfants qui deviendront peut-être comme lui ou qui pourriront dans les bas-fonds après s'être faits coupés leurs mains. «Continue à agir de la sorte pour l'instant, mon salut repose sur les épaules de Maria. S'il s'avérait un jour que je puisse devenir son majordome, alors je pourrais aider les enfants et me sauver, moi» C'est dans un manque évident que la semaine se passa, longue et usante. Il ne se passa pas une journée sans qu'ils ne pensèrent l'un à l'autre.

* * *

_C'est ainsi que tout prit fin. On ne se sera connu que sept semaines... J'aurais aimé tenir ma promesse, tu sais ?

Book of regretsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant