71. Une passion indubitable et deux destins inexorables

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71. Une passion indubitable et deux destins inexorables

MERCREDI 15 JUILLET

Sept saisons. Cent quarante-quatre épisodes. Douze semaines. Six épisodes le vendredi, et six le mercredi. Un rythme, une constance dans mon existence dénuée de sens. Des dizaines de burgers dévorés, des centaines de sourires échangés, des milliers de souvenirs recréés.

Après avoir passé un mois en sa compagnie, je n'ai plus jamais douté qu'Orphée était mon amie. Il existait une complicité, un lien qui ne demandait qu'à être renoué. Moi qui me suis toujours méfiée de tout et de rien, je me suis vite décidée à lui faire confiance.

Trop, sans doute.

Mais quand votre monde est façonné dans un entrelacs de craintes et de faux-semblants, vous ne pouvez que vous raccrocher au premier ange venu, au risque d'être pris au piège d'un démon exclu du ciel. C'est donc avec un pincement au cœur que je m'installe une dernière fois dans le canapé du petit appartement de Falls Street, dans l'espoir que cette visite à Orphée ne soit pas la dernière. Nous n'en avons pas reparlé, depuis le début de notre marathon Buffy, mais je compte bien regarder plein d'autres séries avec elle. Même nulles, même incomplètes.

C'est curieux, étant donné que ma deuxième amnésie l'a pour ainsi dire effacée de ma mémoire, mais je me sens bien, à ses côtés. C'est comme si, enfin, les engueulades quotidiennes de Prya et Michael, les inquiétudes de mes profs et les regards inquisiteurs d'Harry Stewart prenaient leur sens. Comme si j'étais destinée à me trouver ici, avec elle.

Ou alors, je suis simplement nostalgique à l'idée de terminer Buffy... et ma junior year.

Ça s'est décidé à l'arrache, mais Duke Pennington organise une fête chez lui, vendredi, dans son immense manoir en périphérie de Brastlyn – je n'ai jamais compris pourquoi ses parents, des architectes renommés, s'étaient installés ici. J'ai rapidement décliné son invitation, expédiée via la liste de diffusion piratée du lycée, mais mon rendez-vous avec Madame Moore, ma psy, a fait flancher ma détermination. Depuis plusieurs consultations, elle me pousse à socialiser davantage, estimant qu'il n'est pas bon que je côtoie trop souvent Orphée, plus âgée que moi, sans échanger davantage avec mes camarades de classe. Je lui ai rétorqué qu'ils étaient tous cons, même Connor, et elle a sauté sur l'occasion pour me parler de mon ancien pote.

La discussion n'a pas été facile à appréhender, mais elle m'a aidée, je crois : plus j'y pense, plus je me dis que je devrais aller à la soirée de Duke, ce week-end. Je n'ai pas encore abordé le sujet avec mon amie, et sincèrement, je ne sais pas si je le ferai. Tout dépendra de sa réaction à la fin de notre marathon série.

C'est généralement comme ça que je procède, en sa compagnie : mon univers s'articule autour d'elle, quitte à créer un big bang personnel. J'ai eu du mal à m'y faire, au début, mais j'y suis habituée... et bien forcée de constater que cette routine insolite ne me déplaît pas.

MAUX DITSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant