Chapitre 6

102 8 0
                                    

— Allô ?

Quand ses parents lui téléphonèrent, Ambre était plongée dans une colle sur la photographie, et plus précisément sur l'évolution de ses usages au fur et à mesure de la popularisation des appareils, du portrait de famille commandé à un professionnel, aux souvenirs de vacances postés sur Instagram. Son père lui avait envoyé un SMS pour savoir s'ils pouvaient discuter ce soir-là, et elle avait accepté malgré le travail sous lequel elle croulait, en se disant que c'était une bonne excuse pour se détendre un peu. Ses parents l'appelaient donc tous les deux ensemble sur leur fixe, et elle pouvait aisément les imaginer assis l'un à côté de l'autre sur le canapé, collés pour mieux entendre, tous contents d'avoir de ses nouvelles.

— Coucou, ça va ? demanda-t-elle en mettant le haut-parleur pour pouvoir les écouter en laissant le téléphone posé près d'elle.

— Oui, et toi ? Tu fais quoi ? dit son père avec enthousiasme.

— Je prépare une colle d'art de l'image. Le sujet est intéressant mais j'en ai déjà un peu marre.

— C'est pour demain ?

— Non, je passe vendredi matin. Ça me laisse un peu de temps.

En réalité, elle avait l'impression qu'elle n'arriverait pas à suffisamment réfléchir d'ici-là, mais elle ne pouvait pas se plaindre, car c'était sa faute si elle n'avait pas assez travaillé ces derniers jours, à force de mener sa petite enquête au lieu d'étudier.

— Tu ne nous as pas beaucoup fait de messages cette semaine, dit la voix de sa mère un peu plus lointaine dans le téléphone, tu étais trop occupée ? Ou tu n'avais rien à nous dire ?

Sa voix souriait mais on pouvait tout de même y déceler l'inquiétude, voire le reproche. Sa mère avait beau ne pas énormément manifester son attachement, Ambre savait qu'elle en attendait beaucoup en retour.

— J'ai beaucoup de boulot... Là ce n'est pas la période la plus facile, au milieu de l'hiver, commencer le deuxième semestre...

— Tout va bien, tu as eu des notes ces jours-ci ? demanda son père en reprenant apparemment le combiné des mains de sa femme.

— Hum... Oui, un dix au dernier DS de philo. La même note que la dernière fois. Le prof a noté certaines qualités quand même.

— Ben c'est très bien tout ça !

Ambre ne répondit rien, elle feuilletait les documents qui accompagnaient son sujet de colle, à la recherche d'un passage qu'elle avait repéré plus tôt. Elle n'était pas trop d'humeur à papoter, mais elle avait peur de vexer ses parents si elle raccrochait trop vite. Comme la conversation était boquée, elle se sentit obligée de la relancer.

— Et vous deux, tout va bien à la maison ?

— Oui oui... fit son père, en réfléchissant apparemment à ce qu'il avait à raconter.

Il se souvint de nouvelles d'un cousin qu'il avait reçues le week-end précédent dans un mail à la tante d'Ambre. Il lui fit le récit de son embauche dans son tout nouveau travail et son emménagement dans un appartement qu'il venait de trouver. Ambre n'écoutait que peu attentivement, essayant de ne pas trop se déconcentrer de son travail, mais surtout parce que la fatigue l'entrainait dans des pensées vagues et incohérentes.

Quand son père se tut, elle fut gênée de ne répondre que par des bruits d'approbation. Elle n'avait pas vraiment de question à poser.

— Bon, et toi, il ne s'est rien passé de spécial ces jours-ci ? renchérit son père. On aimerait bien t'entendre, tu dois bien avoir des choses à nous raconter !

La métaphysique est un bien long motOù les histoires vivent. Découvrez maintenant