— Je peux te montrer un truc ? demanda Ambre à Mathieu tandis qu'ils arrivaient devant leur immeuble de la rue Albert Camus.
Elle avait parlé d'un ton trop précipité, mais elle sentait bien qu'elle n'aurait pas pu faire autrement, étant donné qu'elle avait passé la journée à se questionner et à réfléchir à ce qu'elle allait faire. Il la regarda d'un air incrédule.
— Ben, oui, c'est quoi ?
— Dans une rue pas loin.
Elle lui attrapa le bras pour l'emmener vigoureusement, tout en restant amicale, dans la direction qu'elle souhaitait. Il rit devant sa détermination, et posa des dizaines de questions auxquelles elle n'avait pas vraiment envie de répondre.
— Non mais sérieusement, à quoi tu joues ?
— Tu vas voir.
Il finit par arrêter de rire, et elle comprit qu'il commençait à s'inquiéter. Il n'était pas si rare qu'elle ne soit pas réceptive à son humour, mais à ce moment elle devait être particulièrement soucieuse.
Ils parcoururent les mêmes rues et tournèrent aux mêmes intersections qu'Ambre la veille, jusqu'à arriver dans la rue du Petit Théâtre.
— C'est ici que tu as vu la fille l'autre soir ? demanda Mathieu en lisant la plaque. Qu'est-ce que tu veux me montrer ?
Elle répondit à peine, concentrée pour ne pas se tromper de chemin. Elle se souvenait très bien d'avoir tourné à droite dans la rue qui partait un peu plus bas. Elle accéléra le pas, un peu angoissée. Elle avait seulement envie qu'ils y soient, qu'elle puisse tout lui raconter. Elle continua à s'orienter, intersection après intersection.
Vint un moment où l'endroit ne lui parut plus familier. Elle fit demi-tour, entrainant toujours Mathieu à sa suite, pour choisir une direction différente. Celle-ci lui parut d'abord meilleure, mais quelques instants plus tard, elle doutait à nouveau. Elle tenta une rue qui lui paraissait correspondre, à moitié convaincue. Commençant réellement à s'inquiéter, elle se mit à courir pour voir le plus d'endroits possible rapidement. Elle ne parvint pas à revenir à l'impasse où elle s'était retrouvée la veille au soir.
Désabusée, elle s'arrêta au milieu d'un carrefour, entre les files de voitures qui passaient dans un sens et dans l'autre. Elle se sentait impuissante.
— Qu'est-ce qui se passe ? s'inquiéta Mathieu.
— Tu vas être furieux...
Il regarda autour d'eux, puis prit Ambre par les épaules et l'entraina plus loin, de sorte qu'ils se retrouvèrent sur le trottoir, et non plus au milieu du passage. La jeune fille se laissa tomber assise sur la marche d'un perron, sous les pieds des passants. Elle se prit la tête dans les mains, tremblante.
— Explique-moi, peu importe ce que c'est, il faut que tu me le dises.
— Cette nuit, je suis retournée au même point de rendez-vous que la dernière fois. Je n'avais eu aucune nouvelle de l'inconnue, mais j'avais cru comprendre dans un de ses charabias qu'en prenant ce genre d'initiative, j'arriverais à obtenir des informations.
Elle releva les yeux pour scruter son visage et vérifier qu'il ne se mettait pas en colère. On pouvait voir à ses traits qu'il se contenait pour pouvoir l'écouter. Elle se rappela l'état dans lequel il était lorsqu'il avait compris qu'elle n'avait pas tenu sa promesse la dernière fois.
— Mais je ne l'ai pas trouvée. Elle n'est pas venue, je n'ai même pas retrouvé le café où on avait été la dernière fois. Je ne comprends pas. J'ai cherché pendant je ne sais pas combien de temps et j'ai fini par partir dans d'autres rues, sans réfléchir.
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La métaphysique est un bien long mot
General FictionJe pense, donc je sais que j'existe. En revanche, comment être certain que tous les humains qui m'entourent ont eux aussi des pensées, et ne sont pas des machines déguisées ? Comment savoir si les objets que je vois et sens autour de moi sont réels...