Revenants

Le plus beau poisson

- J'ai une question.

Aiz et moi sommes actuellement dans mon jardin. Il fait chaud, le soleil brille et faute de vouloir retourner dans la piscine car je suis je cite « trop lourd et trop visqueux pour être coulé », nous nous étions mis d'accord pour faire bronzette dans l'herbe. Loin des autres, ensemble.

Malgré le calme de la situation, cela m'étonnais aussi que la vivante n'ait pas encore prononcé un mot depuis près d'une heure. Je dois dire que cette conversation commence plutôt mal.

- Tu ne pouvais pas t'en empêcher. Je l'embête pour me détendre.

- Quoi donc?

- Parler.

- Vas te faire Wallenstein.

- Okok, je rigole, dis moi ce qui te tracasse.

Elle prend une grande bouffée d'air pour ce donner su courage.

- C'est juste que depuis que je suis ici j'ai remarqué que tout le monde me regardait étrangement, comme si j'étais une bête de foire. Est-ce que par hasard tu sais pourquoi?

Parce que tu as un coeur qui bat contrairement à toutes les personnes ici présentes peut-être?

- Certainement car t'es la nouvelle. Ou parce que tu traînes avec le plus beau mec du campus à toi de voir.

Elle me frappe l'épaule et je rigole.

- Je ne pense pas que ce soit pour cette raison. Ni même parce que je suis la nouvelle d'ailleurs, sinon cela ferais bien longtemps qu'ils se seraient lassés. Non c'est autre chose. Soit je suis différente soit se sont eux qui le sont.

Ok peut-être que tout ne va pas si bien. Elle est vraiment intelligente. Un peu trop même. Si bien que je ne sais quoi répondre. Si elle découvre notre secret je n'imagine pas ce qui pourrait lui arriver. Et étrangement je n'ai pas envie que quoi que ce soit lui arrive. Enfin il faudrait déjà qu'elle devine qu'on est tous morts haha.

- Dans un sens tout le monde est différent à sa façon. Essayai je.

Elle laissa couler un blanc avant de répondre.

- Être normal c'est ennuyeux.

Je n'en doute pas une seconde. Je ne me souviens pas de mon ancienne vie mais je suis sûre qu'elle ne devait pas être aussi palpitante qu'aujourd'hui. La différence à quelque chose de bon. Cependant je ne pense pas  puisse mesurer la vraie valeur de ses mots. Elle n'est pas différente comme nous le sommes.

- J'espère que je ne vous dérange pas?

La voie de Marcus coupa le blanc qui s'était installé. Son corps, tout comme le mien, n'a pas vieilli depuis près de vingt ans. C'est un grand métisse aux yeux si clairs qu'on les croiraient blancs. On le prendrait pour un jeune adulte lorsqu'en réalité c'est un quadragénaire. Son rôle de traqueur lui demande des facultés physiques hors-normes, il a donc une musculature assez présente et développée. Cependant je reste et resterais le meilleur combattant d'entre nous deux. D'autant plus que son élément n'est autre que le feu. Même si je suis sûr de pouvoir gérer la situation si elle dégénère, sa visite ne me dit rien qui vaille.

- Que veux-tu Marcus? Je demande froidement.

- Je viens voir si tout se passe bien pour la demoiselle alors baisse d'un ton veux-tu?

C'est vrai qu'il est censé avoir une autorité sur moi. Je dois me calmer et passer pour un simple élève qui n'aime pas ce... ce quoi déjà ?

- La demoiselle comme vous dîtes s'appelle Aiz et son intégration se déroule très bien, merci de s'en inquiéter. Répond la concernée de manière brutale.

Marcus posa un regard glacial sur elle et la sonda quelques instants. L'humaine qui était confiante il y a quelques minutes devient tout à coup très timide et mal à l'aise. Il la domine avec son regard, chose pour laquelle il a toujours eu un don. Intimider les autres.

- Certainement faudra-t-il revoir son éducation. Lâche le traqueur avant de se tourner dans ma direction. Il est évident que ce n'est pas en ta compagnie qu'elle progressera dans ce domaine. Ses fréquentations laissent à désirer.

C'est un coup très bas et extrêmement lâche. Plutôt étonnant venant de lui je dois dire. Mais ayant un grand contrôle sur moi même je n'ai aucun mal à lui accorder une magnifique faux sourire. Nous réglerons cela plus tard sur le ring. En attendant je me contenterais de lui répondre à ma façon. Avec élégance et finesse bien sur.

- Ne m'envies pas pour si peu Marcus, nous savons tout les deux que tu as bien plus de popularité au près des femmes que moi. Il est vrai que j'ai péché le plus beau poisson du lac, mais c'est là une question de principe: la qualité à la quantité n'est-ce pas ?

Je reçu comme réponse le plus grand regard noir que Marcus n'a jamais pu faire. Sans un mot ou un regard de plus il tourna les talons pour repartir. Il y a franchement des moments où j'adore mon sens de la répartie. Et non je ne me lance pas de fleurs.

Puis en tournant la tête vers la nouvelle je me senti tout à coup très mal. Son simple regard me faisait culpabiliser. Pourquoi? Aucune idée, c'est juste ce qu'elle me fait ressentir à cet instant. Et avant que je ne puisse lui demander ce qui ne va pas, je senti ma joue me brûler et un bruit sourd retentit.

Je viens de me prendre une gifle monumentale.

La vivante se lève et part à toute vitesse sans un mot. Là je suis paumé. Qu'est-ce que j'ai bien pu faire de mal pour qu'elle m'en veuille? C'est bien une fille, je ne pourrais jamais la comprendre.