6 Septembre 2010

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"Où m'emmènes-tu ?
- Je te l'ai déjà dit, c'est une surprise. Arrête de me poser la question.
- Où m'em-
- Ederson, tais-toi ou je te laisse sur le bord de la route."

À ces mots, le blond se tut définitivement. À peine rentré chez eux, son ami l'avait embarqué les yeux bandés vers une destination dont il ignorait tout et ses plaintes, ses questions, ses tentatives n'y faisaient rien. Eurynôme refusait de lui donner la moindre indication. Alors il le suivait, guidé par la main du brun dans la sienne. Il avait l'impression de marcher depuis des heures, il n'avait pas l'habitude de faire autant d'efforts. Lorsqu'ils sortaient pour chasser, son acolyte faisait le travail et lui profitait, il ne s'était jamais plaint de cette méthode de travail de toute manière. Il préférait observer. Aucun bruit ne parvenait à ses oreilles, était-ce parce qu'il était devenu sourd ou le lieu vers lequel Eurynome les menait était-il vraiment isolé de toute nuisance auditive ?

"On est encore loin ?"

À peine avait-il terminé sa phrase qu'il sentit son ami lâcher sa main pour se déplacer derrière lui. En avait-il trop dit ? L'abandonnait-il réellement comme il l'avait prévenu ?

"Je-"

Il retrouva la vue et deux mains se posèrent sur ses hanches tandis que lui se trouvait premièrement ébloui par la lumière du jour qu'il ne connaissait que trop peu encore, une immense demeure se dressant finalement devant lui. Enfouie au fond d'un bois, il comprenait enfin d'où venait cette paisibilité, ce calme constant et cette odeur qui lui semblait pure et lavée de toute pollution du centre ville.

"Je suppose que tu ne te souviens pas de cette forêt." Avait seulement soufflé le brun dans son cou.

Ses mots ne sonnaient pas comme des reproches. Peut-être une once de déception. Ederson plissa longuement les yeux et détailla le paysage avec minutie. Il ne voulait pas le décevoir. Il allait se souvenir. Il le devait. Son compagnon se détacha de son dos, créant un vide qui lui glaçait ironiquement le sang. Ses dents s'emparèrent de sa lèvre inférieure et la mordillèrent nerveusement, le regard plongé sur ses pieds pour plus de concentration.
Eurynôme glissa son index sous son menton afin de retrouver un contact visuel avec le blond, passant son pouce le long de sa lèvre inférieure pour la dégager de l'emprise de ses dents.

"Je t'ai déjà demandé de ne plus faire ça, s'il te plait. Tu sais bien ce que j'en pense."

C'est en retrouvant les prunelles ébène de son ami qu'Ederson se sentit stable et apte à réfléchir correctement.

"11 octobre 1993. Lâcha-t-il alors soudainement.
- Tu vois quand tu veux."

Le sourire du brun s'agrandit alors qu'il posa ses lèvres au coin de celles du plus jeune qui finit par s'avancer lorsqu'il fut libre de se déplacer.

"Il n'y avait pas de maison auparavant.
- Maintenant il y en a une, avait simplement répliqué Eurynôme en haussant les épaules. Et elle nous appartient."

Les sourcils froncés, surpris, ayant sûrement mal compris, Ederson se retourna, cherchant dans les yeux de celui qui se tenait debout derrière lui, à quelque pas de là, une réponse à ses interrogations. Rien hormis un sourire qu'il ne savait s'il devait le qualifier de fier ou quémandeur.

"Bienvenu à la maison, Ederson."

Il avait mis des jours à visiter les lieux. Une pièce à la fois dans laquelle il restait des heures, parfois des jours, à poser ses yeux sur chaque détail de chaque centimètre de celle-ci. Chaque meuble, chaque coin, tapis, revêtement était passé au peigne fin. Il n'était pas sorti des mois durant, refusant de sortir sans être certain de connaître chaque parcelle de son nouveau lieu de vie.

Lorsqu'Eurynome lui annonça son départ dans une simple lettre à son intention, quatre années plus tard, il recommença à errer dans la demeure à la recherche d'une réponse à ses questions. Il devait y avoir un problème quelque part pour qu'il se retrouve seul sans le moindre repère. Il savait et ignorait tout à la fois. Sa solitude le poussa à chercher des réponses ailleurs, là où ses connaissances ne s'établissaient pas: auprès des êtres humains.

Ederson Aimé Klimph.Where stories live. Discover now