29 Novembre 2016

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Jeudi 24 Novembre 2016

"<from: e.ydp@hotmail.com
To: ederson.klimph@hotmail.com>

Object: nice to see you

     Mon -très- cher Ederson,
Tu n'imagines pas avec quelle joie je t'écris cet e-mail. Je pense qu'il est temps pour moi de réapparaître. Aucune idée ne te vient en tête ?
Rendez-vous à 15h au Winter Wonderland à Hyde Park Mardi prochain.

- E.Y

P.S: Couvre-toi."

Mardi 29 Novembre 2016

Cinq jours qu'il avait reçu cet e-mail, cinq jours qu'il tournait en rond, à se répéter que non, ça ne pouvait pas être lui. Impossible. Comment aurait-il pu savoir pour son adresse ? Comment pouvait-il être certain que le lieu de rendez-vous lui serait toujours accessible ? Impossible. Tout bonnement impossible. Mais voilà, "E.Y", ça n'a pas trente-six significations. Qui d'autre que lui pouvait "réapparaître" ? C'est lui. Non. Impossible. Pourquoi ? Comment ?

Cinq jours qu'il se torturait l'esprit à coups de "Non. Impossible" "Ca ne peut-être que lui." Alors il pesait les pour et les contre, les raisons de se rendre à ce "rendez-vous" Pour quoi faire, d'abord ? En quel honneur ?

Aucune de ces interrogations ne l'avait freiné, pourtant. Il savait pertinemment que sa curiosité prendrait le dessus peu importe la situation. Alors il déambulait dans les rues de Londres en direction du parc qui lui avait été indiqué. Il avait déposé sa fille à la crèche dès le matin, ne voulant pas la mêler à l'histoire. Rien de tout cela ne la concernait et s'il avait raison sur la nature du protagoniste, lui seul devrait se confronter à sa personne. Son passé, son règlement de compte. Les mains enfoncés dans sa veste en jean doublée, il pensait, le regard rivé sur le sol, ses mains recouvrant son ventre arrondi qu'il protégeait comme on protègerait un bijou des plus sensible. Il sentait les regards des passants peser sur ses épaules, un poids qui l'abattait, lui faisait ralentir sa marche déjà peu pressée. Quoi encore ? Qu'est-ce qui cloche ? Mes lunettes de soleil ? Mon ventre ? Crétins. Ce n'était pas l'envie qui lui manquait de soulever ses montures aux verres fumés et transpercer ces idiots d'un simple regard qui leur glacerait le sang et les ferait déguerpir bien plus vite que leur ombre. 14h20 et ses pieds trainaient encore contre le bitume des trottoirs londonien. 14h35 et enfin un brin d'herbe foulait son pied droit. Son regard remonta peu à peu sur les passants emmitouflés dans leur parka ou leur doudoune à 100£ le cm². A les voir se tortiller ainsi, le blond s'interrogeait sur ce que serait la prochaine étape lorsque les températures chuteraient bien en-dessous de zéro. Il ne demandait qu'à voir cela. Lui se laissait guider en direction d'un banc non loin des bords de la Tamise. L'enfant à venir ne lui facilitait pas la tâche quant à son endurance faiblissante.

Son regard vaguait de promeneur en promeneur, passant du joggeur habitué des lieux à la dog-sitter trainée par 5 laisses, du cadre accroché à son Smartphone d'une main, à son Starbuck de l'autre, aux retraités venus perpétuer leur promenade de santé. Toutes ces personnes qui vivaient dans leur bulle sans lever les yeux sur ceux qu'ils frôlaient. Et lui, il attendait toujours. Qui ? Il n'en était même pas sûr. Pourquoi ? Comment pouvait-il le savoir ?

«Tu es finalement venu.»

Cette voix, il la connaissait, par cœur. Heureusement ? Malheureusement ? Pour cela, il ne se plaçait pas encore. Deux ans qu'il ne l'avait pas entendu et pourtant, elle n'avait pas bougé d'un octave. Il se tenait là, débout, à sa gauche, lui. Eurynôme. Eurynôme était de retour.

«Pourquoi ? commença le blond, le regard toujours fixé au loin.
- Pourquoi, quoi ?
- Pourquoi m'as-tu envoyé cet e-mail ?
- Je te l'ai dit, je suis de retour.
- Que veux-tu que cela me fasse ?
- À toi de me le dire, c'est toi qui est assis sur ce banc à m'attendre.»

Ederson Aimé Klimph.Where stories live. Discover now