Vingt-quatre heures, vingt-trois minutes

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Si j'en crois le nombre et les lits froissés dans le dortoir, j'ai devant moi l'ensemble ou presque des hors-la-loi qui me fixent du regard. Et au centre : Elaine qui discute à mi-voix avec mon frère et un homme que je ne connais pas mais qui semble pourtant peser lourd dans la discussion. Brun, cheveux coupés ras, regard dur et pupilles métalliques. Il arbore le tatouage des tactiles inanimés, un bêta violet gravé dans sa peau bronzée. Amaury m'abandonne, se faufile entre les murmures qui me désignent et atteint le trio. Bastien se jette sur moi pour me prendre dans ses bras.

« Nolan ! Tu es réveillé, tu vas bien ? Aucune douleur résiduelle ?

- Je vais bien, Bastien, je vais bien. »

Son inquiétude me touche plus que je ne voudrais l'admettre. Je retrouve mon grand frère, je le retrouve pleinement. Celui qui me regardait froidement, avec distance, qui refusait de me répondre et qui se pliait aux ordres d'Elaine, ce n'était pas mon frère. Celui qui, en revanche, n'hésite pas à me prendre dans ses bras pour me rassurer, c'est Bastien. Je n'ai pas le temps de me demander quelle aurait été son attitude si je n'avais pas été catégorisé qu'il me prend à nouveau dans ses bras, comme pour s'assurer que je suis vraiment là.

Il recule cependant rapidement, pour mieux se tourner vers Elaine qui me fait signe d'avancer et surtout d'approcher.

Posant sa main sur mon épaule, elle me force à faire face à tous les autres hors-la-loi. Plus de la moitié sont comme moi, avec un tatouage vert, mais je remarque sans peine que je suis le plus jeune avec Amaury et que tous les autres sont plus âgés que Bastien, pourtant de deux ans mon aîné.

« Je vous présente Nolan. La plupart l'ont aperçu à son arrivée, mais il n'était pas encore catégorisé à l'époque. »

Je cherche du regard des silhouettes connues mais la seule personne que j'ai vraiment rencontrée, autrement dit Alec, n'est pas présente. Je me demande ce qu'elle compte leur dire de plus.

« Il vous parlera un peu de lui plus tard. Bastien, Killian, vous les briefez sur l'exfiltration qu'on doit faire, Nolan, tu viens avec moi et je vais t'expliquer tout ce que tu as à savoir. »

Killian est donc celui qui discutait avec eux lorsqu'Amaury et moi sommes arrivés. Je comprends qu'on a interrompu une discussion importante. Briefing, exfiltration... C'est un langage presque militaire qu'ils emploient. C'est surtout une autre question à poser à Elaine que je suis sans plus tarder. Cette fois, pas question de marcher pendant plusieurs minutes, elle s'engouffre dans la première pièce venue composées d'un mobilier sommaire : des coussins éparpillés au sol et une pile de magazines.

« J'imagine que tu as des questions. »

Elle n'a certainement pas idée de leurs nombres. J'acquiesce, cherche par où commencer.

« Je ne vais certainement pas répondre à toutes aujourd'hui, mais aux principales, j'espère. Déjà, sache que je ne suis absolument pas désolée pour mon attitude des dernières semaines, ton isolement et les menaces que j'ai pu énoncer calmement. C'est en procédant comme ça qu'on est encore en vie, ici, alors qu'au-dessus les Agents de Forester nous recherchent. »

C'est une entrée en matière qui ne m'étonne pas d'elle : elle va droit au but, d'un ton sec qui ne souffre d'aucune réplique. Je crois qu'elle ne s'attend même pas à ce que je puisse vouloir répondre quelque chose. Le temps de reprendre sa respiration, elle enchaîne directement.

« Tu es un mutant. Comme dans les bandes dessinées, comme dans les univers de sciences fictions. Tu es un mutant, moi aussi, toutes les personnes arborant une marque de catégorie sont des mutants.

Tu auras 24h - tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant