Face à face

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Petit à petit, je sens ma résistance s'épuiser. L'influence et la pression que Huygues exerce sur moi détruisent mes défenses les unes après les autres et je crois qu'il commence à se douter que quelque chose ne tourne pas rond chez moi. Je ne vais pas tarder à céder sous la pression, c'est comme s'il était en train de broyer mes tempes avec une poigne de fer. Il faut que je change de tactique, il faut que je trouve un moyen de le duper. Et il faut aussi que je gagne du temps. Sa voix se fait oppressante, son regard, incisif. Je perds pied petit à petit, lui concède une marque. Et soudain, tout explose derrière lui, rompant brutalement le contact visuel et auditif. La pression disparaît, comme un poids que l'on aurait ôté de ma poitrine. Son juron sabote son attaque, je reprends une nouvelle fois ma respiration, cligne des yeux. Notre attention est tournée vers la porte.

Pourquoi regarder la porte lorsqu'en face, il y a un homme capable de traverser toutes les matières ?

Bastien tombe du plafond, se réceptionne un genou au sol. Elaine tombe à son tour dans la même position seulement elle n'attend pas pour envoyer une boule de feu sur un Huygues trop surpris pour réagir. Bastien effleure les liens qui retiennent ma sœur au fauteuil, ils tombent et traversent la matière, déphasés avec la réalité. Avec un temps de retard, je me lève d'un bond, titube et me retiens à la première personne que mes mains rencontrent : Elaine. Aussitôt, elle m'attrape par le bras, me force à la regarder. Encore. Je n'arrive pas à la fixer, je n'arrive pas à fixer mon regard dans le sien. Une nausée s'impose, une migraine enfle.

« Justine, est ce qu'il a eu le temps de t'asservir ? »

Elle a une voix dure et cette autorité charismatique qui la caractérise. Pas besoin, pour elle, de mutation psychologiste, elle sait se faire obéir autrement. Et ma volonté n'est qu'une constellation d'éclats brisés. Je secoue la tête de dénégation, sursautant lorsque les cheveux blonds de ma sœur voltigent dans un même mouvement. Rends-moi mon corps, Nolan ! Je sursaute une nouvelle fois sous le regard suspicieux d'Elaine et de Bastien. Allez, Nolan, rentre dans ton corps, Amaury est peut-être sympa, mais je n'y suis pas à l'aise. Et... tu vas t'effondrer... Sa voix ne tremble plus, ne panique plus. Elle semble même beaucoup plus confiante, ce qui est génial. Le seul problème, c'est que je ne sais pas comment rentrer dans mon co...

Je reprends ma respiration, allongé sur le sol en terre battue du complexe souterrain. Justine n'a même pas attendu que je termine ma phrase pour m'éjecter de chez elle et me faire réintégrer mon moi, mon réel moi. Avec une maîtrise qui n'a pas lieu d'être. Peut-être m'a-t-elle fait venir volontairement, au final, mais je n'ai pas le temps de trop m'attarder sur la question, je bascule sur le côté, douleur dans la poitrine, douleur dans les poumons, douleur dans l'ensemble de mes muscles. Je suffoque, j'ai le vertige. Lorsque j'essaye de me lever, je tombe dans les bras d'un Amaury inquiet.

« Nolan, c'est toi, c'est vraiment toi ? »

Je ne prends même pas le temps de lui répondre trop occupé que je suis à regarder mes mains, mes bras, ce qui m'entoure. Je suis bel et bien de retour. Et l'expérience, sans être totalement déplaisante, n'est en rien une partie de plaisir. Amaury me secoue : il doit avoir peur que ça recommence.

« C'est moi, ne t'en fais pas, je... elle t'a parlé ? »

Justine m'a dit qu'il était sympa, j'imagine que pendant que je luttais contre Huygues, elle devait tenter de comprendre ce qu'il lui arrivait. L'autre mutant hoche la tête avec vigueur. Il semble se dire que comme tout va bien, il n'a pas besoin de s'inquiéter davantage et qu'il peut laisser couler son enthousiasme.

« Ta sœur est fantastique, Nolan ! Elle m'a expliqué ! Vous n'êtes pas catégorisé de la même manière, c'est juste...

- Fantastique ?

Tu auras 24h - tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant