Wendy
Cela fait une semaine que je parviens à éviter l'imbécile. Non pas que ce dernier me fasse peur, cependant je crains que si je ne croise sa tignasse perpétuellement ébouriffée, on retrouvera son cadavre refroidi dans un coin sombre des prison de l'Agence. Malheureusement, je ne peux me permettre une telle fantaisie, puisque Wallace a pris l'étrange décision de nous appairer.
Je ne comprends toujours pas ce qui a pu lui passer par la tête. Jack a beau avoir fait ses preuves - de très belles preuves, car il est incontestablement redoutable - cela ne fait pas pour autant de lui un bon assassin. Je suis pratiquement sûre qu'il n'a jamais éliminé quelqu'un, même au cours de ses plus périlleuses missions.
Il est loin d'être prêt à affronter sa nouvelle condition.
Une semaine sans voir sa tête, mais ce beau travail venait d'être réduit en miettes par un simple appel : 10 secondes plus tôt, la voix de Dawkins résonnait dans tout les couloirs pour nous convoquer immédiatement, lui et moi dans son bureau.
Cela fait donc 10 secondes, maintenant 11, que je travaille à me construire le plus beau masque de glace que j'aie jamais fait. Sérieusement, à quoi pense le Maréchal ? Le fait que Jack parvienne à altérer l'impassibilité robotique de la Louve n'a pas pu lui échapper, c'est improbable... Cela lui est-il égal, désormais ? Maintenant qu'il aient de gagner un nouveau jouet, peut-être se désintéresse-t-il de moi ?
Je chasse cette pensée en entrant dans l'ascenseur. Le violon qu'il m'a offert le matin du gala est la preuve même qu'il est loin de m'avoir oubliée. J'attends et crains toujours sa convocation pour jouer devant lui.
Je pénètre 4 minutes plus tard dans le bureau du Major, calme et austère. Dawkins salue mon entrée d'un geste sec, le regard rivé sur mes bottes, puis à nouveau sur son bureau. Jack est en retard, naturellement.
- Louve, dit-il de sa voix rauque.
Je ne répond pas. Mon silence est parfois plus pesant que mes mots.
- Mission d'élimination, ce matin. J'aurais pu simplement vous l'envoyer, mais il fallait expliquer les détails à l'agent Jack.
- Je m'en charge, fais-je en tendant la main pour qu'il me donne la missive officielle et cachetée.
Il pince les lèvres mais s'exécute, conscient du jeu de pouvoir qui s'immisce dans mon geste : il a beau être mon supérieur, je n'en suis pas moins la fille de Wallace, doublée de la Louve.
- Vous vous rendez au nord, m'informe-t-il en tapotant et glissant ses doigts sur son bureau lisse et immaculé, projetant une série d'images derrière moi. Sur le territoire de l'ancienne Ecosse, dans la région de Dustbury.
La carte de pixels qui s'étend sous mes yeux m'expose une vaste forêt de vieux buildings, dont beaucoup sont encore illuminés de l'intérieur. Plusieurs passerelles traversent le paysage, une vingtaines de tramways filent d'une tour à l'autre et rejoignent une grande roue encore en usage.
- Une ville résidentielle, dis-je.
C'était plus affirmation et non une question, mais il prend la peine de confirmer en lisant les informations sur sa propre copie de ma missive :
- Skybuttocks. Quelques quartiers résidentiels avec une section entièrement commerciale qui frôle le Stratomulus. Interdiction d'y trainer, c'est une zone que l'Agence doit encore nettoyer. Il se peut qu'il y'ait encore quelques marchés-noirs, là-dessous.
- Je peux m'en charger.
- Ce n'est pas la mission demandée, et vous devez travailler avec l'agent Jack.
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Les Enfants de la Nuit
Science FictionNew Kingdoms, an 3324. L'Angleterre n'est plus que mécanique, fer et nuage. Les cités s'élèvent au fil des progrès technologiques et la terreur y règne en maître. Une journée d'anarchie, une nuit de cauchemars. Tant que le soleil brille, chacun est...