Partie 5 - Parasite

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Roman

Derrière moi, la porte s'ouvre dans un lourd grincement. Je pose rapidement ma canette de bière et tourne brièvement la tête pour voir de qui il s'agit. Je n'ai aucune envie de me faire prendre comme l'année dernière où j'ai eu le droit à un abaissement de salaire, sous prétexte que je dégradais les extérieurs du bâtiment. Foutaise!

Rien à voir cette fois-ci avec un agent de sécurité, il s'agit juste d'une fille qui a l'air un peu paumée. Je me retourne et reprend ma bière en fixant les bâtiments en face. Peut-être qu'elle ne m'aura pas vu, ou du moins qu'elle ne viendra pas vers moi.

Je l'entend s'avancer. J'entends surtout quelque chose venir frapper dans la cheminée. Je n'ose pas tourner la tête, espérant toujours qu'elle ne m'ait pas vu. Je n'ai aucune envie de devoir expliquer ma présence ici. 

- Aïe ! Tu te fous de moi? Tu fais quoi là, tu peux pas faire attention? m'exclamais-je alors qu'elle me donne un grand coup de bâton dans la cuisse.

Lorsque je tourne la tête vers elle, je constate que son bâton n'en est pas un, mais plutôt une canne. Je lève les yeux vers elle et remarque ses lunettes noires, très noires.

- Désolée. Je ne t'avais pas vu. s'excuse t-elle timidement.

Mes yeux s'attardent sur son visage, en partie caché derrière ce mur de vitres tintées. Ses cheveux bruns mi-longs lui tombent sur les épaules qu'elle semble voûter un peu plus en s'excusant.

- ça j'avais remarqué. Fais plus attention la prochaine fois. 

- Je pensais être seule.

Son corps semble tellement vouloir se recroqueviller sur lui même que j'ai l'impression qu'elle voudrait disparaître si elle le pouvait. Ce manque de confiance qu'elle dégage de tout son être me donne l'irrésistible envie de lui donner un coup de grâce. Elle ne devrait pas avoir envie de revenir ici. Je me lève alors d'un bond pour lui faire face. En m'attardant brièvement sur son corps je constate qu'elle ne doit pas mesurer plus d'un mètre soixante dix et son manque d'assurance aurait tendance à la rétrécir.

Sa réaction n'est pas celle que j'imaginais. Alors que je la toise de ma hauteur, elle se redresse et fait disparaître ce manque de confiance qui émanait de tout son corps. J'ai l'impression de faire face à une autre personne. Sa tête se relève vers moi avec une vive assurance et on dirait presque qu'elle me regarde. Pourtant sa canne, ses lunettes noires et le fait qu'elle ne m'ait pas vu avant m'indique le contraire. Ce changement d'attitude me surprends, mais je ne connais pas cette personne, et je n'ai aucune envie de m'attarder ici en sa présence plus longtemps.

- Et bien tu te trompais. tu n'es pas seule. dis -je pour conclure cet échange.

Je reste planté devant elle un court instant, avant de quitter le toit dans un claquement de porte.

__

Lessiver les couloirs, nettoyer les toilettes, remettre du PQ, aspirer les amphithéâtres, mon banal quotidien est de retour avec le roulement des étudiants qui entrent et sortent de l'université. La fin de la journée arrive et je termine enfin mon labeur. Il me tarde d'être chez moi. Je ne me fais pas prier pour quitter les lieux, d'autant plus que pour une fois je ne termine pas à 23 heure.

Arrivé chez moi je sors du frigo une bière et attrape mon paquet de cigarette dans la poche de mon blouson. Mon téléphone vibre au même moment. Une notification WhatsApp apparait avec le nom de Léopold. Je sais déjà ce qu'il veut me dire, mais je regarde tout de même la notification. 

 "Est-ce que ce soir tu vas te décider à bouger tes fesses et sortir avec nous?"

- "Pas ce soir Léo, j'ai pas la tête à ça. On se voit de toute façon dans trois jours pour fêter le début de la fin de ton master."

Rise Up [En cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant