Chapitre XII : La Princesse Palatine

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Si Henri se risquait à jeter quelques œillades au prince, celui-ci ne lui adressait aucun regard, le visage impassible. Si le favori ne le connaissait pas, il aurait pensé, comme beaucoup à la Cour, que le jumeau du roi était insensible, doté d'un cœur de pierre. Cependant, ce dernier était trop pris dans sa réflexion pour témoigner d'une quelconque émotion. Mais que pouvait-on y faire ? L'esprit de Charles ne s'accordait aucun répit et un rien pouvait le préoccuper. Enfant déjà, on lui faisait la réflexion de se perdre trop souvent dans ses pensées, le cardinal Mazarin lui disait régulièrement qu'il finirait philosophe s'il continuait ainsi. Bien entendu, cela était arrivé jusqu'aux oreilles de son jumeau qui, pour le taquiner, lui disait qu'il finirait comme Socrate.

En parlant de Louis, celui-ci faisait son discours d'accueil lorsque le duc d'Orléans et son amant arrivèrent.

Pour ne pas attirer l'attention sur lui, le prince préféra rester en retrait. Contrairement au comte, cela ne le gênait pas réellement. Certes il n'était pas aux côtés du roi - qui allait sûrement lui remonter les bretelles à ce propos - mais étant de grande taille, sa vue n'était que partiellement obstruée, il pouvait donc voir à quoi ressemblait la Palatine. Le duc remarqua, sans réelle surprise, que ce qu'on racontait d'elle était exagéré. Non elle n'était pas laide, ni masculine, mais d'une beauté discrète. Bien que de nombreuses personnes affirmaient qu'elle avait grand appétit, elle avait la taille assez fine. Son visage non poudré était également fin et était parsemé de taches de rousseur, Charles pensait également apercevoir quelques cicatrices laissées par la petite vérole. La nouvelle duchesse de Valois possédait de petits yeux bleus en amandes et, en dessous de son long nez, se trouvait une petite bouche rosée. Son visage était encadré d'une véritable avalanche de boucles blondes retenue par des rubans bleus. Cependant, sa robe ne mettait pas en valeur son teint laiteux. En effet, elle était en satin bleu clair, mais elle illustrait en même temps la richesse du Palatinat : son large col beige était orné de nombreuses perles et de pierres précieuses.

Quand le monarque eut terminé de parler, l'assemblée se dispersa. Alors que Philippe s'empressait de retrouver le chevalier de Lorraine - arrivé à la Cour dans la journée -, la princesse semblait seule, perdue.

—  Et si nous allions faire connaissance avec ma nouvelle belle-sœur ? demanda le brun à son amant.

Le blond acquiesça et les deux hommes se dirigèrent vers la jeune femme qui, lorsqu'elle vit le duc, fronça les sourcils tout en étudiant le visage du prince.

—  Bonsoir, je suis votre second beau-frère, Charles-Henri d'Orléans. Je suis ravi de faire enfin votre connaissance, se présenta-t-il en inclinant légèrement la tête, affichant un sourire amusé.

—  Oh, bien sûr ! s'exclama l'Allemande en faisant une révérence. Quelle idiote je fais ! rit-elle. Je suis Elisabeth-Charlotte du Pala... enfin, de Valois, se reprit-elle brusquement.

A la grande surprise du duc, la princesse parlait aussi bien français que lui, sans aucun accent.

—  Je puis vous assurer que vous n'êtes pas idiote pour un sou, madame, la rassura le prince en riant doucement, tout le monde ici m'a confondu avec le roi au moins une fois, même mon... ami, le comte de Clermont, ici présent, ajouta-t-il en tapotant légèrement l'épaule du concerné.

Henri fronça les sourcils quand il entendit son compagnon utiliser le terme "ami", cependant il ne répondit rien.

Charles avait hésité à employer le mot "amant". Il ne savait pas comment réagirait sa belle-sœur et ne voulait pas compromettre leur relation dès le départ.

—  Est-ce la même amitié que celle qui lie mon mari et ce chevalier de Lorraine ? demanda la blonde en désignant d'un geste de la tête Philippe qui, un peu plus loin, était toujours en compagnie de son amant.

Le Secret du RoiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant