You are mine, Human - Welcome to Hell (T2)

Chapitre 40.

Mes muscles saillent sous ma peau tannée de cuir. Je serre les poings si fort que je crois bien qu'ils ne sont plus qu'un seul et même muscle. Le regard noir, j'observe Logan secouer sa gueule avant de se remettre sur ses pattes, l'arbre éclaté lui ayant tranché le flanc, de façon trop superficielle à mon goût.

Cette colère sourde gronde en moi, à la façon d'une tempête prête à tout dévaster, et je suis peut-être paranoïaque, mais je jurerais voir un sourire étirer ses babines dont s'échappe un filet de bave.

Il me fixe, nos yeux ne se lâche plus alors qu'on tourne l'un autour de l'autre. L'auteur de tous mes malheurs... C'est lui.

Lui qui a essayé de m'arracher la seule rédemption que l'on m'ait jamais promis, le seul témoignage physique d'un Dieu que je pensais détourné de moi.

Lui qui a essayé de m'arracher ce paon blanc qui m'a été offert, innocente de cette bataille qui nous déchaîne depuis des siècles...

Peut-être devrais-je tout avouer ? Tout dire, pour qu'il réalise ses horreurs... Mais prisonnier de ma promesse, je me contente de le maudire et de le tuer de mes propres mains à moi. C'est le mieux que j'aie à lui offrir.

-Qu'est-ce que tu viens faire là, je gronde.

Il continue sa marche, lente et dangereuse, une flamme de rage dansant dans ses prunelles... Le temps s'allonge alors que je ne souhaite qu'une seule chose : voir son sang couler et sa vie s'éteindre. Je me déplace à une vitesse fulgurante vers Isil, alors que Linda reste près d'elle, assise au sol, sa couronne de fleur sur la tête, et vêtue de ce vêtement blanc. Je ne pensais pas qu'elle en sortirait habillée de cette façon... Il faut croire que cette bête façonne ma pensée...

-Ne penses plus pouvoir t'en prendre à elle... C'est la dernière fois.

Il s'élance dans la forêt. Sans crier, le voilà qui rebrousse chemin...

Mais il en est hors de question.

-Zak', Yémi ! Je rugis aussitôt en m'élançant à mon tour.

On file à toute vitesse dans les bois, mais il n'est pas stupide, Logann sait parfaitement qu'il ne s'en sortira pas. J'avance quatre fois plus vite que lui, facilement, mais il se sert de virage et détour pour... gagner de la marge ? Où pense-t-il aller ? Fuir ?

Cette fois... Cette fois, il est hors de question qu'il s'en sorte.

Je parviens à lui sauter brutalement au cou lorsqu'il sinue entre trois arbres de suite. Un de moins, et il m'aurait filé entre les doigts.

Aussitôt, mes bras se resserrent, et son corps se jette contre un arbre pour me faire lâcher ma prise. Il se met à rugir contre moi, jusqu'à ce que Yémi, une arme de fortune dans la main, lui saute brutalement sur le dos, un genou contre son pelage, et le plante furieusement, ratant son coeur de près, cette dernière terminant sa course dans son épaule.

Il glapit cette fois-ci en secouant son corps, délogeant Yémi qui roule plus loin, sonné.

Zakary fond sur lui, adressant une droite agressive. Le combo semble l'étourdir, mais très rapidement, car il dévoile ses crocs de façon menaçante, reculant vers un cours d'eau.

-Qu'es-tu venu faire ?

Son regard se plante de nouveau dans le mien. Moi qui me demandais comment il avait pu me pardonner d'avoir tué sa femme... Il ne l'a jamais fait. Aujourd'hui, je le comprends... Mais cela n'amoindrit en rien la haine que je lui porte à cet instant.

Isil... Personne ne touche à Isil.

L'enfermer loin de tous, c'est ce que j'aimerais faire de tout mon coeur... Mais ce n'est pas la laisser vivre, après tout.

Ses pattes s'enfoncent dans l'eau lorsqu'il recule, à l'affût, ses oreilles se déployant vers chaque bruits alentours.

-Tu es encerclé, laisse tomber.

Il grogne en se lançant sur moi, mais je le saisis par la trachée et le hisse dans les airs, sa mâchoire claquant dans le vide, l'écoutant glapir à nouveau... Et ça me reprend et me trahit, ces sentiments que de me dire qu'il s'agit de mon demi-frère... Et que j'ai beau le haïr... Je ne peux être la main qui fait s'échapper son souffle.

Je l'observe, mourant sous ma poigne, implorant un air manquant. Je le jette au sol et il atterrit sur le dos, se tordant dans tous les sans pour se hisser sur ses pattes, sous les regards circonspect et étonné de Yémi et Zakary.

-Il est temps de mettre un point final à cette histoire, Arkin, tonne Zakary.

Je fais craquer mes muscles, observant mes mains escaladées de cet entrelacs noir qui recouvre de façon épaisse ma peau, la rendant insensible à tout. Si seulement il avait pu en être tout autant de mon coeur. Car là, face à moi... La chose la plus importante après Isil... Ma famille...?

Logan se jette sur moi, déchaîné, ses crocs se refermant autour de mes jambes qui ne cèdent pas, ma peau ébène ne lui permettant aucun intrusion dans ma chair. Il secoue sa gueule, et je le saisis par le coup, l'aplatissant au sol, sa gueule dans l'eau alors qu'il reprend forme humaine.

Je laisse sa tête sous l'eau quelques instants, l'observant simplement faisant taire mes sentiments.

-Tu es si stupide, je gronde.

Puis je l'extirpe, et il inspire à fond en crachant de l'eau. Je l'observe froncer ses narines, les sourcils haussés, la bouche grande ouverte. Puis il rit. Ce rire que je hais, que j'aimerais lui faire taire...

Alors il plonge de nouveau, secouant mollement ses bras, perdant de l'énergie peu à peu. Et je le sors une nouvelle fois... Comme je l'avais fait plus tôt avec Isil.

Un flash se plaque tout à coup durement contre mes rétines, retranchant mes plus grandes peur contre mon coeur. Successivement, des images insensées, une terre qui se fendille, des hurlements de cris, d'agonie...
Et Isil, les yeux clos, encore. Comme si...

Ce sont les mêmes images que j'avais aperçu lorsque l'on attendait le jet de Yémi.

Logan en profite pour se redresser et reculer, assis dans l'eau, reprenant ses esprits en secouant son visage. Ses traits m'apparaissent.

Qu'est-ce que cela a à voir avec lui ?

-Laisse tomber, je réitère, tu es encerclé, tu ne pourras pas t'enfuir.

Il sourit insolemment, ce même sourire que j'affichais constamment. Les rôles s'inversent. Là maintenant, je ploie sous son emprise. C'est mon erreur, que de l'avoir laissé approcher de trop près ma seule faille en ce moment, la seule qui me ferait renoncer à toute ma gloire, qui ferait s'effondrer une réputation durement acquise... Bien que je n'en ai que faire à présent.

-Le pire dans tout cela, c'est que si tu avais été accompagné d'une meute, tu aurais pu t'en tirer...

Et ça me frappe, de par sa logique imparable. Je me suis tant laissé aveugler par ma rage et ma douleur que mon esprit tactique et stratégique n'a pas su agir en temps réel, que je n'ai pas su déjouer son plan. Il me connaît terriblement bien... Beaucoup trop bien...

Comme pour répondre à ma réalisation soudaine, alors que je me redresse, tâtonnant aux alentours un semblant de pilier qui ne me fasse défaillir...

Un cri retentit, agonisant ensuite dans un silence mortuaire.

Et je chute à nouveau dans cette mélancolie fatale où je suis sans cesse acteur de sa perte, où tous s'évertuent constamment à me l'arracher, alors qu'elle est mienne, et malheureusement humaine.