Chapitre deux : L'ombre du passé (Shadow of the past)

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Le « Civic Center » de San Francisco était le quartier où trouver toutes les plus grandes institutions de la ville. De l'hôtel de ville au bureau fédéral d'investigations ou à la cour suprême, l'endroit était monumental. L'appartement de Sorène se trouvait non loin du bureau du F.B.I., dans un immeuble cossu d'une douzaine d'étages à quelques pas de l'opéra.

Dans le duplex situé au dernier étage, les invités du maître vampire discutaient de façon plutôt animée bien que la réunion n'ait pas commencé officiellement. Il manquait encore Amraël et Shadow et c'était sur eux que portait la conversation. Le débat opposait les quatre vampires qui avaient déjà rencontré le protégé d'Amraël à ceux qui n'en avaient qu'entendu parler.

Le quatuor, nerveux, reprochait la présence du jeune vampire à ce conseil tandis que les autres se montraient plus conciliants. Personne n'ignorait la conclusion morbide de la dernière visite de Shadow et de son acolyte. Malgré le fait que prés de cinquante années se soient écoulées depuis, la rancune était tenace pour certains.

Savoir qu'Amraël était capable de décapiter l'un des leurs d'un coup de pied ne rassurait personne. Même si les raisons qui l'avaient poussé à agir ainsi étaient valables, du moins aux yeux de la majorité.

Sorène, à la porte du balcon, écoutait d'une oreille distraite les différents arguments qu'avançaient ses comparses pour justifier leur point de vue. Il observait la rue, une cigarette à moitié consumée à la main. Étrange habitude qu'il avait adoptée dès 1843 pour avoir l'air moins inhumain.

Car si la majorité des vampires pouvait se faire passer pour des citoyens lambda sans éveiller les soupçons, Sorène devait admettre que ce n'était pas son cas. Son aspect trahissait sa nature fantastique.

Comme beaucoup de ses compagnons, le maître vampire possédait un physique attrayant et une grâce un peu mystique, deux atouts forts utiles pour charmer ses proies. Vampirisé à l'âge de vingt-quatre ans, son air juvénile le faisait paraître doux et innocent. Il était grand et mince. Ses longs cheveux blonds, tombant jusqu'à sa taille, semblaient de soie. Chacun de ses gestes paraissait dépourvu de maladresse, souple, précis et élégant. Ces qualités rassemblées étaient déjà suspectes, mais c'était ses yeux de couleur mauve qui étonnaient. Leurs pupilles étaient semblables à celles d'un chat, fines et verticales. La plupart des humains qui croisait ce regard félin étaient subjuguée et effrayée à la fois.

Sorène avait remarqué qu'il suffisait qu'il allume une cigarette pour détourner les esprits de l'attraction de son regard. C'était comme si ce comportement lui rendait son humanité... Après tout, même la fée clochette avec une clope au bec aurait perdu son aura fantastique !

Le vampire sourit à cette idée tandis que, derrière lui, le ton montait. Les dissensions ne se calmaient pas et il secoua la tête. Il n'avait pas envie d'intervenir mais il savait que seule son opinion mettrait fin aux hostilités. Jusqu'à maintenant, il n'avait fait part à personne de son avis au sujet du jeune Shadow. Mais la cohésion de son équipe était primordiale au regard des évènements qui se profilaient à l'horizon. Il devait trancher.

Il écrasa sa cigarette et se tourna lentement vers le groupe de vampires qui s'invectivait dans le grand salon. Il remarqua sur sa gauche que trois personnes n'avaient pas pris part à la conversation. Il n'en fut pas surpris. Ces gens là avaient d'autres préoccupations.

Sorène observa les dix autres invités en silence et ceux-ci se turent immédiatement. Le maître vampire avait une présence majestueuse qui imposait respect et retenue. Il s'agissait là d'un de ses pouvoirs. Le même que celui dont Shadow avait fait l'usage involontairement lors de sa première venue. Une capacité difficile à contrôler lorsqu'on était un vampire nouveau-né. Il en avait fait l'expérience lui-aussi.

L'Ordre et le Chaos tome 1 : Nuit et OmbreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant