33. À ses sentiments

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Il dormait.

Il dormait et son souffle faisait trembler les mèches caramel qui lui tombaient sur le nez. Une bribe de sourire lui était restée sur les lèvres, et je pouvais le revoir rire, courant dans la rue sur le chemin du retour, les bras écartés, embrassant la vie avec un bonheur qu'on ne pouvait qualifier.

Je l'aimais. Et je me demandais pourquoi cette putain de vie l'avait rendu si faible. Pourquoi elle l'avait choisit lui, alors qu'il m'avait choisit moi. Je me posais des milliers de questions lorsqu'il dormait. Lorsque j'étais loin de lui. Et j'en voulais à la vie de l'avoir rendu malade.

Mais je me rassurais, parce qu'il avait l'air heureux. Et je repensais à son sourire, ma plus belle récompense, contemplant les étoiles, debout, immense, sur le toit du monde que nous créions.

Avant de s'endormir, il m'avait encore remercié de l'avoir amené là-bas, des dizaines de fois, déposant sur mon visage autant de baisers.

Et j'avais seulement sourit, ému.

Je ressentais tellement de choses lorsqu'il était près de moi. Tellement de sentiments différents, qu'il m'était impossible de les exprimer. Alors dans ces moments là, je ne disais rien. Mais on se regardait, et il comprenait.

Ce soir, Jeno était redevenu insomniaque.

Parce que je m'inquiétais. Et je me creusais la tête, assis à son bureau, voyant ses mains serrer mon sweat contre son coeur, alors que je me penchais sur sa liste.

J'avais apposé deux nouvelles croix sur le papier.

• Monter sur les toits de la ville et regarder les étoiles
• Fumer une fois

Et depuis, je restais là, parcourant la feuille du regard, tapotant son stylo contre ma joue, lui jetant de petits coups d'oeil de temps à autre, le regardant inspirer mon odeur prise dans le tissu qu'il pressait contre son visage.

Finalement, j'avais replié la liste, la glissant dans mon sac avant de me coucher, essayant de ne pas le réveiller, passant un de mes bras nus contre lui, pour l'attirer contre mon torse, posant mon nez dans son cou.

Les yeux grands ouverts. Ne trouvant pas le sommeil.

Regardant le soleil monter dans le ciel.

La date hantant mes pensées.

*

Aujourd'hui, Jaemin avait décidé d'aller en cours. Et ça m'arrangeait.

Alors, heureux, nos mains entremêlées nous avions marché jusqu'à la gare, et nous nous étions assis à sa place habituelle dans le train, regardant mon village passer sous nos yeux, commentant comme deux gamins notre première rencontre. Ses joues prenant cette couleur si douce qui faisait s'envoler toutes mes pensées noires.

Arrivés à quai, il avait attrapé son bus, qui l'avait arraché à mes bras douloureusement. Puis j'avais rejoint l'appartement de Mark, jouant avec le double de ses clefs, la foule immense qui m'entourait ne perturbant même pas ma quiétude.

J'étais pressé de me mettre au travail. Déjà heureux à l'idée de pouvoir réaliser un de ces voeux. Alors je ne pensais qu'à lui, esquivant les corps compacts qui me bousculaient, atteignant enfin la porte de l'immeuble du blond.

「 Il regardait passer les trains - Nomin 」Où les histoires vivent. Découvrez maintenant