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   Je voulais tenir ma promesse. Evidemment que je le voulais. Je m'interdisais de le revoir parce que j'avais réussi à me persuader qu'il était une mauvaise fréquentation. Newt ne m'apporterait rien de bon. C'était ce que je me disais pendant que je dévalais les marches avec l'idée de le rejoindre.

   Je ne voulais pas passer une nuit de plus en sa compagnie. Je voulais qu'il me laisse tranquille, je voulais pouvoir me reposer, mais je voulais avant le lui expliquer. J'ai poussé la porte de l'immeuble et elle s'était refermée derrière moi. J'ai ignoré le bruit sourd et les futures plaintes de mes voisins, et je l'ai regardé. Lui, là, devant moi, tout sourire, comme s'il avait attendu tout le jour de pouvoir me voir passer cette porte.

« Newt, je ne viendrais pas ce soir. »

   Il avait haussé un sourcil, sûrement surpris de ma phrase, et peut-être surpris que ce soit moi qui ait commencé à parler.

« Et tous les autres soirs. Je dois arrêter, ça ne me rend pas service. »

   Il s'était contenté de croiser les bras, sourcils froncés, attendant que je m'explique, sûrement.

« Aujourd'hui, je n'avais plus du tout envie de travailler et ça ne m'est jamais arrivé. »

   Il ne disait rien et ça me rendait fou. J'étais partis dans un monologue auquel je ne trouvais pas de fin. Face à son mutisme, j'ai fait demi-tour, je l'ai salué et j'ai claqué la porte. Et quand je suis revenu dans ma chambre et que je me suis penché à la fenêtre, Newt n'était plus là.

*

« Bon, je m'en vais les garçons.

-Fais attention à toi. »

   Gally était le plus protecteur de nous tous. C'était pour cela qu'il avait dit à Sonya de faire attention à elle, et aussi pour ça qu'il se trouvait chez moi avec Minho. On passait l'après-midi sur mon canapé, le lendemain, à parler de tout et de rien à la fois tout en jouant.

« Thomas, sourit un peu, tu tires la tronche depuis tout à l'heure.

-C'est faux, je tire la tronche depuis hier. »

   Mon meilleur ami levait les yeux au ciel face à ma réponse et Gally reprenait aussitôt :

« Tu devrais aller le voir, mec. T'as flippé pour rien, là.

-Le seul moyen que j'avais de le recontacter, c'était de ne pas le perdre. »

   Ils n'avaient rien ajouté. Ni dans l'après-midi, ni dans la soirée qui avait suivi, et encore moins le restant de la semaine. Il n'y avait rien à dire, il y avait juste à me supporter, moi et l'absence de mes sourires. Je m'ennuyais un peu. Je suivais mon quotidien, j'allais en cours, je travaillais à la bibliothèque, j'allais voir ma sœur. Mais je m'ennuyais quand même. Ou du moins, l'idée que ça ne recommence plus jamais contribuait à ma monotonie.

   Je pensais à Newt beaucoup plus que je ne voulais bien le dire. Les autres évitaient le sujet, comme pour espérer que j'oublie le chanteur parisien, mais ça n'accélérait pas le processus. Mes nuits se retrouvaient nourrit de plusieurs souvenirs.

   Une fois, en traînant des pieds dans un couloir de l'université, avec la vague idée de rentrer chez moi, j'ai vue une tête blonde au loin. Je l'ai fixé pendant un moment avant de me rapprocher. J'ai accéléré mes pas et je l'ai dépassé. Je voulais le voir, au fond je voulais que ce soit lui. Mais des têtes blondes, il en existe pas mal.

*

   A défaut d'étoiles, je fixais mon plafond. La nuit venait tout juste de tomber et les nuages dissimulaient toute lumière nocturne. Je pensais à mes cours, je pensais à mes examens, à Rachel, à mes amis. Je pensais à pleins de choses, aux nuits parisiennes, à la folie des grandeurs que nous décrivent certaines chansons et aux odeurs d'alcool des pubs islandais.

   J'ai fini par me lever. J'ai pris les premiers vêtements venus, à savoir ceux de Newt, et je suis sortit de l'appartement. J'ai fermé doucement la porte, j'ai descendu les étages sans y prêter d'importance, je suis arrivé dehors avec le claquement de mon passage et j'ai ressenti le vent sur mon visage.

   Je savais qu'au loin se trouvait le bruit de l'eau, parfois peut-être celui d'un bateau, et que les portes ouvertes de quelques bistrots sauraient m'accueillir. Pour une des premières fois de ma vie, j'avais envie de sortir la nuit. En fait, je pense qu'on le sait tous, je voulais le revoir. Alors sur un coup de tête, je suis entré dans la première bouche de métro venue, j'ai trouvé une place assise dans la rame que j'ai dû attendre cinq minutes, et j'ai regardé les stations défiler.

   Quand l'air parisien est venu à son tour me fouetter le visage, je n'ai pas attendu et j'ai couru vers la Seine. Une fois devant, je me suis retourné et j'ai vu la devanture du bar. Celui où Newt avait chanté.

Newt est un rêve  [Newtmas]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant