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   Sonya s'était éclipsée dans sa chambre. Elle avait compris au regard fermé de Newt qu'il valait mieux ne pas rester. Ce soir-là, il avait quelque chose à me dire. Ma colocataire l'avait deviné face à son silence, moi grâce au crépuscule. Newt ne se déplaçait jamais le jour sans une bonne raison. Et j'étais persuadé que cette bonne raison en serait une mauvaise.

« Je dois partir pour l'Angleterre. »

   Il avait lâché la bombe sans me prévenir. Debout à l'entrée du salon, moi près de la table où nos assiettes trônaient encore.

« Tu...

-Oui, je pars. »

   Il ne m'avait pas regardé tout de suite. Je savais qu'il fallait que je dise quelque chose en particulier pour qu'il lève les yeux à ma hauteur, mais je ne savais plus comment on réfléchissait.

« Je n'ai pas le choix, Tommy. »

   Je savais bien qu'il avait raison, mais ça restait dur pour moi et je réagissais comme un idiot.

« On a toujours le choix, tu le sais autant que moi, Newt.

-Tu ne sais pas ce que je sais.

-En même temps tu n'as jamais voulu me le dire.

-Et alors ? Tu n'as pas cherché longtemps à ce que je sache. Tu n'avais pas besoin de savoir. On n'avait pas besoin de tout savoir, on se suffisait comme on était. »

   J'avais réussi à capter son regard, mais ça me faisait encore plus mal.

« Tu ne veux pas me dire pourquoi tu pars ?

-Ça ne te regarde pas, alors laisse tomber.

-Je ne veux pas laisser tomber ! avais-je crié. Je ne veux pas te laisser partir sans savoir.

-Tu es obligé... Tu n'as pas le choix, et ne me contredis pas. Qu'est-ce que tu essayes de prouver, là ? Je partirais quoiqu'il en soit.

-Je veux savoir qu'est-ce qui est si important pour que tu me laisses. »

   Mais je n'avais pas su le retenir. Newt avait claqué la porte et il disparaissait déjà dans l'obscurité encore timide de la ville. Je n'avais pas pu le rattraper, en y réfléchissant je ne sais toujours pas si ça aurait changé quelque chose.

*

   J'ai passé cette nuit-là à faire les cents pas dans ma chambre. J'ai évité de croiser Sonya pour ne pas rencontrer ses yeux tristes. Je voulais être seul, mais aux lueurs du jour je comprenais que je ne pouvais parler qu'à une personne.

   Je suis arrivé rapidement à l'hôpital. J'ai passé les portes automatiques sans m'en rendre compte et j'ai poussé la porte blanche sans prendre mon temps. Je me suis retrouvé planté devant Rachel, je ne voyais toujours pas ses yeux. J'ai voulu lui dire, lui raconter tout ce que je pouvais ressentir, mais je m'en suis retrouvé incapable. Tout était bien trop comprimé en moi pour que je puisse en sorti un mot. Alors à la place, je me suis mis à hurler.

   Je lui ai crié dessus. Je l'ai supplié de se réveiller, je le lui ais ordonné. Je lui ais dit qu'elle savait très bien comment faire, qu'elle avait juste à ouvrir les yeux et j'étais persuadé que si elle se remettait à bouger ça allait tout arranger. Ça me montrerait que tout était possible. J'y pensais sans m'en rendre compte.

   J'ai fini par lui demander pardon en explosant en larmes. J'ai fini à genoux près de son lit et je lui tenais une main. J'ai laissé passer un peu de temps, j'ai laissé mes larmes sécher d'elles-mêmes, et je suis sortis en lui accordant un dernier regard. J'ai rejoint Minho chez lui qui a tout de suite remarqué mes yeux rougis. Il a tout de suite compris.

   Je lui tout de même tout raconté. Il a hoché la tête, il a pris la posture sérieuse du meilleur ami qui réfléchit, et à la fin de toute mon explication, il m'a donné mon manteau que j'avais posé un peu plus tôt.

« On va à la gare. »

Newt est un rêve  [Newtmas]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant