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    Trois jours. 

    Ça faisait trois longs jours que Jay était resté là, sans voir la lumière du jour. 

    Un  souterrain. Un souterrain bien insonorisé; c'était tout ce que son père avait trouvé pour enfermer un garçon de seize ans.  

    Jay savait que son père connaissait le malaise qu'il éprouvait dans les espaces confinés, et il en avait profité apparemment: la pièce devait bien faire quatre mètres carrés et les murs montaient à moins d'un mètre cinquante. Autrement dit, Jay ne pouvait même pas tenir debout. Il n'y avait pas de fenêtre et si Jay n'avait pas repéré un verrou au plafond, il aurait pensé qu'il n'y avait absolument aucun moyen de sortir d'ici.

    Si, il y en avait un. Un qui se présentait comme facile d'accès.

    Mais jamais il ne choisirait cette option; il se l'était juré. Il ne voulait pas faire de mal à des innocents pour son père. Il devait être plus fort.

    Le maître de la foudre se demandait pourquoi le Maître lui demandait son avis alors qu'il pourrait très bien le contrôler et lui faire faire tout ce qu'il veut. Mais quelque soit la raison, ça n'annonçait rien de bon.

    Des souvenirs de Nya passaient en boucle dans sa tête. Sa voix, sa façon de se déplacer si naturelle, ses yeux qui le regardaient si intensément, son visage qu'il ne se lassait jamais d'admirer, ses cheveux qu'il pouvait passer des heures à enrouler autour de ses doigts... tout ça lui manquait. Au fond, il n'avait pas envie de croire à ce que Kai lui avait dit. Après tout, Nya ne voulait pas parler à son frère de leur relation. Peut-être était-ce pour de bonnes raisons, qu'elle savait que Kai ferait tout pour les séparer. 

    Mais comment démêler le vrai du faux? 

    Une voix retentit dans son esprit.

    Alors? Tu as fais ton choix?

    Jay changea aussitôt d'expression, bien que personne ne pouvait le voir dans l'obscurité et que de toute façon, il était seul. Il posa sa tête contre le mur froid et ferma les yeux. 

    _ Pourquoi tu me demandes ça? maugréa-t-il. Tu le sais déjà. Et en plus, tu n'as qu'à fouiller dans ma tête comme à ton habitude. Je ne deviendrais jamais ton second. Je ne tuerais pas.

    J'ai lu dans tes pensées. Je voulais juste savoir si tu avais le cran de me le dire en face.

    _ C'est très dur de parler en face à quelqu'un qui n'est même pas foutu de se ramener! s'énerva Jay. C'es trop dur pour toi de me regarder dans les yeux et de me dire "je veux que tu assassine des gens pour moi" ?!

    Le Maître lâcha un petit rire grinçant.

    Tu es bien comme...

    _ Comme la femme que tu aimais et que tu as tué qui, au passage, s'avérait aussi être notre mère, à Laya et moi, coupa Jay. Tu te souviens de cette partie de l'histoire?

    Le garçon n'avais plus peur de son père. La terreur qu'il éprouvait auparavant s'était transformé en colère. Il voulait en finir, même si ça impliquait de devoir tuer son père.

    Me tuer?  Allons mon garçon, tu n'y arriveras jamais! Je suis beaucoup plus puissant que toi. 

    _ Alors pourquoi...

    Pourquoi je ne t'oblige pas à travailler pour moi? Je le pourrais. Mais contrôler quelqu'un tout le temps limiterait mes capacités au combat. 

    _ Mais si tu connais ma réponse, pourquoi me garder ici?

    Je pense pouvoir te faire changer d'avis. 

    _ Tu te trompes. 

    Je ne me trompe jamais. Bientôt, tu me supplieras de travailler pour moi.

    Jay rit nerveusement. Ça lui faisait du bien de rire. Même si c'était dans ces circonstances.

    Il n'y a rien de drôle!

    _ Si! ( Jay ria de plus belle ) Tu crois vraiment que je viendrais te supplier... C'est tellement ridicule!

    Ce qui doit se passer se passera!

    _ Oui ô grand sage! pouffa Jay. Voulez-vous en profiter pour une petite séance d'introspection ou même un peu de méditation? Nous pourrions peut-être nous offrir quelques réflexions sur la vie, la mort ou encore l'amour... J'ai pris un abonnement auprès de maître Wu la dernière fois!

    Un peu d'humour aurait dans d'autres circonstances détendu l'atmosphère. Jay retrouvait ses anciens réflexes: cacher ses véritables sentiments grâce à son talent pour sortir des blagues ou des réflexions plus ou moins drôles à n'importe quel moment.

    Je crois qu'il est désormais inutile d'essayer de discuter: peut importe l'intensité de mon pouvoir si j'ai quelqu'un plein de puissance sous la main.

   A peine Jay prit conscience de ce que venait de dire son père que la trappe au plafond s'ouvrit et que le garçon sentit le Maître s'emparer petit à petit de son corps.



𝟙• Dɪsᴘᴀʀᴜs [Eᥒ Rᥱ́ᥱ́ᥴrιtᥙrᥱ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant