9. un chocolat chaud et un rencard.

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OLIVIER ET moi avions prévu un rendez-vous à la bibliothèque. Pas pour réviser, il avait simplement prévu de me montrer ses livres préférés et je pourrais faire de même. J'y trouvais une certaine notion romantique, d'autant plus qu'il savait l'amour que je portais aux livres.

Il passait donc me chercher chez moi. Ma mère, qui n'était pas au travail ce matin puisqu'elle était malade comme un chien, trouvait notre rendez-vous si romantique. Elle se disait ravie de me voir grandir et d'avoir mon premier petit ami.

Je remis le col roulé de mon pull en place, me fixant dans le miroir; ma mère nous préparait des chocolats chauds dans la cuisine et Olivier n'allait pas tarder. C'était un jour de novembre ordinaire.

La sonnerie retentit. Je retouchais mon rouge à lèvres dans un élan de panique, manquant crier à ma mère que je m'en occupais mais j'entendis la porte s'ouvrir. Trop tard.

"Oh, Olivier. Qu'est-ce que tu fais ici ?

- Bin, je viens chercher votre fille. Vous êtes pas au courant ? Oh, j'ai fait une gaffe ?"

J'entendis le rire de ma mère s'élever pendant que je dévalais les escaliers quatre à quatre. Olivier, un bonnet enfoncé sur le crâne, riait avec ma mère avant de me sourire quand il me vit.

"Ta mère était en train de me faire la meilleure blague du siècle. J'ai cru que tu m'assumais pas."

Ma mère esquissa un sourire. Elle ne s'était pas maquillée et portait son peignoir en éponge avec un pantalon de jogging : pas la meilleure tenue dans laquelle j'aurais espéré la voir rencontrer mon copain. Si on omettait le fait qu'elle l'avait déjà vu quelques fois par l'intermédiaire du chirurgien.

"Tu veux un chocolat ? J'en faisais pour Astrée et moi.

- Avec plaisir !"

Ma mère nous tendit les deux tasses fumantes et s'en prépara une pour elle même. Olivier regarda Stup qui le reniflait avec intérêt, y trouvant sûrement un nouvel ami.

"C'est quoi comme chien ? demanda-t-il en grattant le cou blanc de Stup.

- Un border collie.

- Trop bien. Moi j'ai deux bouledogues, grâce à ma soeur. Elle a eu sa période lubie pour les bouledogues alors maintenant on en a deux, parce que l'autre se sentait trop seule."

Il but une petite gorgée de café et regarda Stup courir dans les jambes de ma mère. Un fin sourire arqua ses lèvres.

"Ils sont très beaux, vos chiens, Olivier, pourtant. Ton père me les a montré en photo.

- D'ailleurs, il me fait dire que ses pauses café sont pas les mêmes sans vous.

- J'espère bien, s'amusa ma mère."

J'ignorais qu'elle était proche à ce point du chirurgien Anselme. Pour moi, c'était un de ses collègues, dont j'avais appris l'existence lorsqu'Olivier m'en avait parlé. Je me sentais vexée de ne pas être au courant.

Ils continuèrent à parler de son père, me laissant sur le côté, ce qui me vexa encore plus. Je me concentrais sur le fond de ma tasse de chocolat quand ma mère me fit enfin l'honneur de ne pas piétiner ce qui me restait de dignité en nous proposant d'y aller.

Je lui souhaitais bon courage et m'éloignais d'un pas heureux, papotant avec Olivier d'un ton joyeux.

* * *

Une fois dans la bibliothèque, nous nous mîmes en quête d'une table. Soudain, je reconnus le dos cambré et la touffe emmêlée de Benjamin : mon sang ne fit qu'un tour.

"Y'a Benjamin juste-là, constatais-je.

- Vas lui parler, me conseilla Olivier. Tu auras sûrement des explications. Tu veux que je vienne avec toi ?

- Peut-être que ce serait mieux qu'on se parle en tête à tête. Mais ne reste pas trop loin..."

Je m'avançais vers la table où nous avions l'habitude de nous installer, Benjamin et moi. Celle où il s'installait tout seul désormais.

"Cette table est prise, grogna-t-il sans lever les yeux de son livre de cours."

Je me laissais tomber sur la chaise sans écouter ses protestations plus longtemps. Il leva les yeux vers moi et afficha un moue contrariée. Voire l'opposé d'un sourire.

"Depuis quand tu vas à la bibliothèque sans moi ?

- Je te retourne la question. Je suppose que t'es pas venue pour me trouver parce qu'on se retrouvait jamais ici un samedi matin."

Il détourna légèrement les yeux, constata la présence d'Olivier et fit un sourire qui n'en était même pas un.

"Ah ouais, tu ramènes ton copain, maintenant."

Il planta ses yeux presque noirs dans les miens, avec une froideur terrifiante.

"Va le rejoindre, Astrée, je t'en prie. Ne perd pas de temps avec moi.

- Je veux juste que tu m'expliques pourquoi tu-

- Je ne veux pas t'en parler."

Je posais la main sur son livre, subitement très énervée. Toute cette rancoeur ressortait; je l'accumulais depuis tellement de temps que c'était impossible pour moi de faire abstraction surtout quand je me retrouvais face au problème.

"Benjamin, tu vas m'expliquer pourquoi t'as fait le con maintenant, d'accord ? crachais-je en maîtrisant ma voix. Pourquoi tu m'évites comme la peste, pourquoi tu fais comme si j'existais pas, comme si j'avais jamais existé. Parce que peut-être que tu t'en fous, mais moi je le vis mal. Alors prouve moi que t'es pas un connard et donne moi des explications."

Il y eut quelques 'chut' venus des bibliothécaires mais je les ignorais considérablement. Poings sur la table, je fixais Benjamin avec une telle fureur que ma maîtrise de moi-même me surprenait. Il se leva subitement, attrapa son sac et me cracha au visage :

"Si t'avais pensé un peu moins à toi, on en serait pas là, toi et moi."

Sur ces mots tranchants, il prit son sac et quitta la bibliothèque d'un pas furieux.

Je n'y comprenais définitivement rien, mais ce que je savais, c'était que le monde semblait s'effondrer sous mes pieds.

sorry for le retard j'avais : mal à la tête ✌🏼

La nuit pleure aussi.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant