19. un jus de pomme et une discussion dans l'herbe.

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LORSQUE JE retrouvais Benjamin, il était dans la cuisine.

"Bin dis donc, tu t'étais faite choper par un Kraken ou quoi ?

- Je te raconterais.

- Chouette, encore plus de ragots."

Il prit un gobelet vide qu'il remplit du jus de pomme avant de me le tendre.

"On va dehors ? Il y'a trop de monde ici."

Je le suivis dans le petit jardin, loin du coin des fumeurs. Déotile s'y trouvait à présent, en compagnie de Gloria. Elle croisa mon regard et fit comme si elle ne m'avait pas vue.

Je m'assis donc dans l'herbe avec Benjamin.

"Alors, dis moi tout."

Je lui expliquais la situation pendant que le garçon arrachait l'herbe sur laquelle il était assis.

"Bin on a plus qu'à espérer qu'ils se mettront ensembles, ces deux-là, mais ça a l'air mal barré, parce que Déo quittera pas Lucas.

- Oui enfin, là, elle est conne.

- Non, elle se rend pas forcément compte qu'il lui plaît, tu sais. Ca arrive plus souvent qu'on le pense. Quelqu'un nous aime, on l'aime en retour, mais on s'en rend pas compte. Et tout le monde à l'extérieur le voit.

- Ca t'es déjà arrivé ?

- Non, mais c'est quand même plus courant qu'on le croit."

Il regarda la brune au loin avant d'ajouter.

"Tu sais, Déotile elle a juste envie d'être safe. Elle se risquera pas à larguer Lucas, elle a trop peur.

- Faut dire qu'il est flippant, ce mec. C'est ça le paradoxe.

- Comme la plupart des mecs, ricana Benjamin."

Il me regarda longtemps et puis se mit à me sourire.

"Tu sais, j'crois que si j'en avais l'occasion, je serais même pas une fille. Pourtant, je trouverais ça génial d'être une fille. En fait vous êtes hyper solidaires entre vous. Et vous êtes super jolies. Mais si c'est pour pas être payée de la même manière, qu'on veuille voir un petit bout de peau sans arrêt mais crier à la pute dès qu'il apparaît, eh, je préfère rester un mec.

- C'est pas génial d'être une fille, parce que t'as tes règles et ça, c'est vraiment nul.

- Je crois que le terme exact, c'est de dire que c'est pas génial d'avoir un utérus."

J'haussais un sourcil ; il avait très probablement raison, je n'étais pas l'experte en tout ce qui concernait le genre ou la sexualité. Je n'étais pas experte en grand chose, à dire vrai.

"En tout cas, ça te concerne pas.

- A toutes vous entendre, j'ai envie de dire que c'est tant mieux pour moi.

- Je pense que t'as de la chance sur ce point là, oui."

Je regardais mon téléphone, pour vérifier l'heure et mes notifications. Aucune nouvelle d'Olivier. Voir ça me fit un petit coup au coeur.

"Et toi, personne dans ta vie ? Genre... même pas un petit flirt, rien ?

- Hum, non, pas vraiment. La musique, quoi. Et c'est déjà beaucoup."

Il soupira en levant le nez vers le ciel, puis vers leur maison illuminée de néons sûrement achetée pour les occasions comme celles-ci. Cela dit, ils devaient sortir souvent.

La nuit pleure aussi.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant