Chapitre 22

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Le Roi reste sceptique face au récit que nous lui avons offert, mais grâce à la Reine Marion, nous sommes bien accueillis : chacun possède sa propre chambre luxueuse, sa salle de bain privée, et nous allons même prendre nos repas en compagnie de Quentin et de sa femme.

Je contemple ma chambre, dans laquelle reposent un grand lit immaculé, un bureau magnifiquement sculpté, un siège en velours, un petit canapé et une garde-robe gorgée de vêtements plus soyeux et élégants les uns que les autres. Face à moi, de grandes baies vitrées donnent une vue sur le jardin royal. Et plus loin, la forêt, la mer et le ciel... Le soleil est à son zénith.

Toujours ce décalage horaire entre ici et l'État...

C'est en m'étalant sur le lit mœlleux que je me rends compte que la journée m'a épuisée ; mes yeux se ferment d'eux-mêmes.

Je pense que je me serais endormie si personne n'avait toqué à la porte. Poussant un soupir, je vais ouvrir et tombe nez à nez avec une femme souriante. D'après ses vêtements simples, mais soignés, je note qu'elle est une servante.

- Bonsoir, Mademoiselle. Je suis votre femme de chambre. Je ne vous dérange pas, j'espère ?

- Non, non...

Mon filet de voix est si faible que je me demande si elle m'a entendue.

- La Reine m'a envoyée pour que je vous aide à trouver une tenue adéquate pour le déjeuner. Puis-je entrer ?

Trop exténuée pour refuser, je la laisse passer et m'assois sur le lit le temps qu'elle fouille dans la garde-robe. Je la surprends à me lancer quelques coups d'œil.

- Je vous observe pour vous trouver la tenue parfaite, se justifie-t-elle en retournant à ses recherches.

Elle s'éclaircit la voix.

- C'est aussi la première fois que je rencontre une humaine, alors... Désolée de me montrer curieuse.

- Pas de problème. Nous sommes juste des êtres... eh bien... non ailés, vous savez.

- Oui, bien sûr. Mais nous n'avons pas...

- ... la même façon de vivre ? Les mêmes idées ?

- C'est ça... Pouvez-vous essayer cette robe, Mademoiselle ?

Je me lève à grand-peine et enfile le long vêtement à l'aide de la femme de chambre.

- Hum... non, marmonne-t-elle en décortiquant mon reflet dans la glace de l'armoire.

Au bout de plusieurs essayages, durant lesquels seul le froissement des tissus est audible, elle reprend la parole :

- Comment est-ce ?

- La robe ? Elle est...

- Non. Votre vie.

Je m'immobilise.

- Oh, excusez-moi, je ne voulais pas vous importuner. Je ne vous poserai plus de questions de ce genre, je vous le promets !

Alors qu'elle me retire l'habit, ma langue redevient fonctionnelle.

- Ma vie est devenue un cauchemar.

Le Monde des Créateurs - Tome 1 : La Découverte [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant